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Critique de clesbibliofeel


Traduction de Michel Aucouturier
Paru en mars 1989, folio classique
Nicolas Gogol a été célèbre de son vivant mais, écartelé entre la satire sociale qui lui sert de trame et l'incompréhension de la critique et du pouvoir dont il dresse un tableau "contrasté", il aura du mal a trouver sa place, ce qui l'amènera à un exil volontaire de 12 ans en Europe puis un retour tragique en Russie. Les soirées du hameau sont "le feu féerique de ses débuts" et en cela ces soirées sont passionnantes.
En couverture de l'édition 2017 de cette édition folio classique, on découvre une belle reproduction du tableau de Philippe Maliavine : « Réunion paysanne ou danse paysanne » qui donne le ton. Il s'agit d'un peintre que je ne connaissais pas, dont les tableaux, représentent bien l'âme russe avec une débauche de couleurs et de mouvements. Né en 1869, il a traversé des périodes mouvementées, aussi bien en Russie qu'en Europe ou il est mort en 1940 dans les conditions difficiles imposées par les nazis. On voit dans ce tableau un tourbillon de couleurs vives, typique de ce peintre, tons vifs, jaunes, rouge, grenat. Les paysannes dansent dans un paysage champêtre, leurs visages épanouis respirent le bonheur et la joie de vivre. C'est une bonne introduction pour ces contes de vie campagnarde idéalisée ou nature, plaisirs et imaginaire allaient ensemble.
Mais revenons-en au texte. J'ai vraiment apprécié la traduction de Michel Aucouturier. Il transmet de façon époustouflante le côté féerique des pages d'un écrivain débutant : Nicolas Gogol. Dans la préface, il dit très justement « la prose, par son rythme, par ses images, se fait musique et peinture, tente d'imiter ce qu'elle décrit ». C'est tout à fait réussi et bravo à Michel Aucouturier, en traducteur génial et érudit, qui dans l'ombre se met si bien au service d'une littérature d'exception.
Il s'agit de récits prétendument racontés par l'Apiculteur Panko le Rouge. À la publication de ces récits en 1831, Nicolas Gogol à 22 ans. Il utilise avec talent ses souvenirs, le folklore, les vieilles légendes pour mettre sur le papier des contes circulant dans les campagnes, notamment lors des longues veillées d'hiver. Il accède avec ces récits à la célébrité et devient un « classique » de la littérature russe.
Gogol dresse un portrait haut en couleur de cette Petite-Russie de son enfance. La Petite-Russie c'est l'actuelle Ukraine et, au passage, on visualise bien à travers les récits de Gogol, les liens culturels ancestraux avec la Grande Russie.
La foire de Sorotshintsy : les bottes de la jeune fille sont rouges, la casaque du jeune homme blanche, et le rythme des phases emmène le lecteur dans la danse après des péripéties tirées en grande partie du théâtre comique. Quelle poésie, par exemple lors du passage du pont, ou Gogol décrit le reflet à la manière d'un peintre : « le ciel, les feuilles vertes et bleues, la foule, les charrettes chargées de poteries, les moulins, tout se renversa et se mit à marcher la tête en bas, sans se noyer dans le bel abîme d'azur ».
La nuit de la Saint-Jean : histoire racontée par un sacristain et toujours rapportée par Panko le Rouge, sans parler de Gogol et de la traduction-réinterprétation de Michel Aucouturier… On est dans un vertige de transmission orale puis écrite, cadeau de la mémoire civilisationnelle (qu'il faudra opposer à l'immédiateté des échanges informatiques).
Une nuit de mai ou la Noyée : le temps et la ronde des saisons avec des chapitres au nom des différents protagonistes.
La Dépêche disparue : histoire présentée comme vraie car un bon conteur « doit être crédible s'il possède son art ».
La nuit de Noël : une histoire de sacs qui tient de la magie et plus encore.
Une terrible vengeance : une histoire qui évoque Dracula mais même pas peur !
Ivan Fiodorovitch Chponka et sa tante : on est prévenu d'emblée par le narrateur, à cette histoire il en manque la moitié..., qu'à cela ne tienne, elle nous est racontée telle quelle et la faconde aidant, ainsi que les digressions permanentes, le narrateur peut bien s'arrêter quand il veut...
Le terrain ensorcelé : une époque où le signe de croix suffisait pour repousser le malin Satan, heureuse époque !
De bien belles histoires qui traversent le temps avec bonheur. «Voici de la vraie gaieté, sincère, sans contrainte.» (Alexandre Pouchkine)
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