Pleurer, ça sert à quoi ? A vider son chagrin. Ou à se consoler.
Comment savoir quand la pensée devient rêve, et le rêve pensée ?
Un jour, il lui arriva une pénible aventure (il n'avait pas encore l'expérience requise d'un voleur de crottin). Un vieux chameau lui lança un crachat de gros calibre qui le recouvrit de bave; des œillères trouées permirent à la sale bête de reluquer l'aveuglon, en train de lui subtiliser la boule de crottin qu'elle venait de déposer par terre. Certains animaux possèdent un sens de la propriété plus féroce que celui des humains.
La nuit sentait le Paradis. Jasmin et fleur d'oranger embaumaient l'air. Le relent à graisse de mouton s'estompait. Le feu s'était éteint, le silence s'éveillait. Un chien perdu aboya au loin. On entendit la mélopée du muezzin, apportée par la brise : des lambeaux de la prière du soir, égarés dans les ruelles.
... des maçons construisaient un mur autour d'un village, "pour masquer son état de délabrement", expliqua quelqu'un. Eviter au touriste la vue de la misère. Tout un programme. "Ils n'en ont rien à branler les touriste ! C'est notre misère !"
Puisqu'on forçait les gens à devenir aveugles, se dit l'enfant, il n'avait pas à se faire trop de souci ; nul ne remarquerait un aveugle de plus dans un monde où voir n'était pas autorisé.
Ce sont les rêves qui nous permettent de vivre avec un peu de dignité.