Citations sur Les portes de fer (68)
Qui l'on est a-t-il tant d'importance? En tout cas, qui l'on semble être a encore moins d'importance. Mais, sur le moment, dans le passage coloré et bruyant du temps, il peut y avoir une certaine ivresse à faire peau neuve.
C’est un des mythes de notre époque émancipée qui veut qu’une bonne vie sexuelle sauve tout.
De même que la Terre avait une atmosphère d’oxygène qui conditionnait toute la vie, la vie humaine possédait également une atmosphère. Celle-ci s’appelait imagination ou faculté de conception et, comme l’oxygène, elle était une condition de notre respiration, dans son acception intellectuelle. Les sceptiques avaient raison quand ils disaient que l’amour était le produit de l’imagination, puisqu’il n’avait pas d’existence en lui-même, en dehors de notre conscience, mais ils se trompaient quand ils en concluaient qu’il pouvait être mis au rebut comme illusion. Parce que tout ce qui était important pour l’homme au-delà de la simple survie, tout ce qui nous distinguait des animaux, tout cela n’existait que grâce à nos représentations.
«Personne ne mérite d'avoir une faible estime de soi.»
J’ai réfléchi à ce qu’elle avait dit alors que je revenais de l’Île aux Musées en direction de Checkpoint Charlie. Je n’arrivais pas à saisir ce que je ne comprenais pas. J’ai jeté des coups d’œil aux différents éléments de socialisme réel que je croisais en chemin. Les nuances toujours grises des voitures, comme si un éclat de couleur était l’expression de la décadence bourgeoise tardive. Les piétons qui ne se distinguaient pas immédiatement des piétons de l’autre côté du Mur, sauf que leurs vêtements n’étaient pas aussi chic. Étaient-ils plus ou moins heureux ? Je ne savais qu’en penser. Que m’aurait-il fallu savoir pour le découvrir ? Y avait-il un homme pour le savoir ?
"Ne crois pas que les sons délicats viennent des cordes les plus sensibles,
Pense plutôt aux tons durs et froids, des cordes trop tendues
Ne crois pas que les roulements du vacarme viennent des ailes les plus fortes,
Pense plutôt au silence crispé, juste avant la falaise qui tombe dans la mer
(Poème de Gustav Munch Petersen, cité par le narrateur)
"C'est vrai que tu n'as pas peur?"
"Oui, c'est vrai. Je ne sais pas pourquoi. Je devrais bien avoir peur. Et ce n'est même pas parce que je serais devenue croyante. Non, je ne sais pas. J'ai toujours eu le sentiment d'être regardée, si tu comprends ce que je veux dire.
- Comment ça?
- C'est comme si tout ça me renvoyait un regard, n'est-ce pas? Comme s'il y avait une grande présence. Je ne sais pas si c'est quelque chose de religieux.
(...)
Oui, cela me fait de la peine. Cela me fait de la peine de vous faire de la peine, mais tout cela durera ce que ça durera. C'est peut-être lié au fait de ne pas être trop envieux. C'était bien comme ça."
Il (mon père) n'était pas bête et, aujourd'hui, je serais enclin à lui donner raison mais il y avait un fond de mécontentement glacé dans son mépris de mes clichés révolutionnaires. Plus tard, je me suis dit qu'il aurait tout aussi bien pu se montrer compréhensif, mais quand ma mère est tombée malade, sa froideur m'a manqué parce que sa gentillesse était encore plus insupportable. Était-ce tout simplement parce qu'elle sentait la mort ?
(à propos des adolescents )
Je les aime bien dans leur vulnérabilité maladroite. Ils sont comme Bambi sur la glace avec leur moments d'étourderie vertigineuse et leur spleen accablant. Ils posent sur le monde des regards bien trop éveillés, parfois terrifiés, parfois rebelles. Un monde qui leur paraît soudain tellement étranger parce qu'ils n'y ont pas de place évidente. Mentalement, ils sont nombreux à avoir quitté la maison, socialement, ils ont à peine appris à marcher.
Dessiner, c'était dire, sans mot, ce qu'on avait vu.