Je ne voulais pas voir la Russie avec les yeux d'un touriste, mais avec tes propres yeux. Avec vos yeux. C'est une chose d'assister à un spectacle d'un fauteuil d'orchestre ou de la scène, c'en est une autre de le faire au milieu des figurants.
Le camarade était génois. C'est dire que l'idéal, pour lui, signifiait une chose, et les affaires, une autre.
...où le lecteur découvrira, sous le complet austère du militant (et par la grâce de quelle permission divine ?) un nouveau Don Camillo : à la main, un livre rouge frappé de la faucille, du marteau et des mots :"Pensées de Lénine" ; à la bouche, les commandements et les inépuisables ressources de la dialectique marxiste-léniniste ; un Don Camillo qui a quitté son "petit monde" pour affronter, avec Peppone et quelques camarades-élus, les vastes étendues sovkhosiennes, les colères de la mer noire et le grand vent de la coexistence ;
...où le lecteur retrouvera le Don Camillo de toujours, pétri de piété et de malice, aux prises avec un Peppone dont la nouvelle dignité de sénateur, guide d'une cellule en voyage, n'a altéré ni l'impétuosité ni la bonhomie ;
...où le lecteur apprendra enfin comment un regard brûlé au feu de Naples, le sens des affaires à la gênoise et l'efficacité milanaise peuvent, en toute innocence, bouleverser les normes industrielles et les concepts sentimentaux des républiques socialistes soviétiques.
(quatrième de couverture)
L'époque était à la détente. L'U.R.S.S., ne regardant point à la dépense, avait choisi pour ses hôtes le plus somptueux palace de la capitale. Quelque chose dans le goût du métro, avec plus de mille chambres et des salles, des salons, des boudoirs et des ascenseurs à n'en plus finir.
Le métro de Moscou est l'orgueil de l'Union soviétique. Pour avoir une idée de ce dont il s'agit, il n'est que de songer à un cauchemar assyro-babylonien. Marbres,cristaux, lampadaires, mosaïques, stucs, fresques, hauts-reliefs, bas-reliefs, statues, ciselures, bronzes, argentures, dorures : on s'étonne que les tapis-brosses ne soient point de vison.
Peppone le dévisagea d'un œil soupçonneux. puis lui tourna carrément le dos. Bah, fût-il Satan en personne, que pourrait tramer un prêtre isolé, enfermé dans le compartiment d'un train qui roule à toute allure au cœur de l'U.R.S.S. ?
La nuit tombait. Pas un arbre, pas une bicoque, rien ne rompait la monotonie de l'immense plaine onduleuse et balayée par le vent. Seuls les champs se succédaient à l'infini, et on les imaginait sans peine transformés en un frémissant océan de blés d'or ; mais le pus éclatant des soleils de l'imagination n'arrivait pas à réchauffer les cœurs gelés par cette accablante tristesse. p. 124
Rien ici (en Russie) ne relie l'homme à son prochain. ici chaque homme est une brique : avec d'autres briques, il constitue un mur, il est partie intégrante d'un ensemble solide. Sorti du mur et jeté au milieu d'un champ, il n'est plus rien, il devient n'importe quoi d'inutile.
Serait-il perdu au fond de la campagne et enseveli dans le brouillard le plus épais, un homme, là-bas, (en Italie) ne se sent jamais séparé du monde. Un fil invisible le relie à ses semblables, à la vie, lui transmet la ferveur et l'espoir.