Je consomme, donc je suis
Le premier roman de Valérian Guillaume tient en une phrase. Mais son originalité n'est pas seulement stylistique. Il nous entraîne dans un centre commercial où, à côté de tous les produits qui s'offrent à lui, il va tenter de trouver l'amour.
Une longue phrase pour une longue déambulation. le narrateur de ce roman au ton très original se promène dans les centres commerciaux, tue le temps en passant d'une boutique à l'autre : «Je me laisse voyager de produit en produit de boutique en boutique de vendeur en vendeur je n'achète que très rarement mais le plaisir de la découverte et de la connaissance est unique j'ai envie de tout savoir et pour ne pas manquer les opportunités je tente d'apprivoiser mon environnement un peu comme les chiens quand ils arrivent vers vous pour vous sentir et ça peut paraître idiot mais à chaque fois je sens que ça me fait du bien c'est comme des petits voyages mais faut y aller doucement car c'est bien connu les voyages ça creuse l'appétit». Des pérégrinations qui le mènent au Corner, le café où il croise Martine, la serveuse qu'il apprécie beaucoup et retrouve des connaissances. Reste l'une des attractions phare de ce temple de la consommation, la piscine. Un endroit qui devient en un instant magique, car il fait la connaissance de Leslie, la plus sympathique des caissières puisqu'elle va jusqu'à lui offrir un bonnet de bain afin qu'il puisse se baigner. de quoi tomber immédiatement amoureux!
Encore faut-il trouver un moyen d'engager la conversation, de se signaler. Trop tard, elle a déjà fini son service. Gontrand l'extirpe du coup de son rêve pour le ramener au Corner où s'échangent les potins, où se noient aussi les illusions. Quant aux intrépides et aux optimistes, ils y forgent leurs ambitions.
Oui, c'est décidé, il va prendre son courage à deux mains, offrir à Leslie les DVD de Feedjy school, sa série préférée et lui avouer son amour! Mais avant, il ne manquera pas la semaine mexicaine à Carrefour où il a bourré l'urne de ses bulletins de participation au concours pour tenter de gagner un voyage.
La déception de n'avoir pas remporté l'un des prix de cette belle animation commerciale sera estompée par le sourire de Leslie. Un sourire magique qui l'exalte, l'emporte, le transforme. Pourtant il ne peut rien contre les démons qui l'habitent, qui le font transpirer, qui le font pleurer, qui l'entrainent à se jeter sur la nourriture pour satisfaire leur énorme appétit.
En choisissant d'oublier toute ponctuation, Valérian Guillaume fait de ce premier roman un symbole de la boulimie consumériste, une logorrhée impossible à arrêter et qui va finir par tout engloutir, y compris cet amour pour lequel le narrateur aurait tout donné. On passe alors de la fantaisie au drame, des couleurs au noir. Un premier roman choc et un nouvel auteur à suivre!
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