Citations sur Un coin de ciel brûlait (29)
Ainsi on en est là, se dit-il, prêts à se massacrer entre nous pour quelques cailloux. La rébellion, toute cette merde n’est que l’excuse pour que certains puissent s’enrichir. Nous sommes des assassins aveugles, des pantins entre les mains de salopards avides comme cet Américain, comme Popay et comme ce chef du Hezbollah.
"Souvent je me dis que les gens ne voulaient pas savoir. Et puis, même lorsqu'ils savaient, qu'est-ce qu'ils en avaient à branler que la bague de fiançailles ou la rivière de diamants achetées chez un joaillier reconnu de la place Vendôme à Paris, à Midtown dans Manhattan ou à Hatton Garden à Londres, aient coûté la vie, les bras, les pieds, les tripes d'une bande de nègres d'un pays que personne ne sait placer sur une carte?"
- Souvent, je me dis que les gens ne voulaient pas savoir. Et puis, même lorsqu'ils savaient, qu'est-ce qu'ils en avaient à branler que la bague de fiançailles ou la rivière de diamants achetées chez un joaillier reconnu de la place Vendôme à Paris, à Midtown dans Manhattan où à Hatton Garden à Londres, aient coûté la vie, les bras, les pieds, les tripes d'une bande de nègres d'un pays que personne ne sait placer sur une carte ?
A présent, le jeune homme était allongé sur le ventre sur deux tables d'écolier mises bout à bout dans le seul bâtiment en dur de toute la région, une école primaire bâtie dix ans plus tôt par une ONG suisse. ll y avait encore une banderole défraîchie qui clamait : «Eduquer, c'est croire à demain». Mais demain avait déchanté. Plus aucun enfant n'apprenait ici, La guerre civile les avait renvoyės aux champs. Le soir, ils se terraient avec leurs parents dans leurs misérables cases de banco, espérant échapper aux rebelles, aux Kamajors, aux soldats des forces armées sierra-léonaises. A tout le monde en réalité. Il ne restait rien du mobilier et des livres de classe. Tout ou presque avait été pillé, excepté les deux tables sur lesquelles Neal était allongé, regardant par la fenêtre.
Le colonel a des projets pour toi. Il dit que sous tes airs de chiens apeuré, il y a un chien de guerre qui sommeille.
– Je le sais, mais je dois vous demander de ne pas diffuser cette photo.
Tanya prit le temps de réfléchir quelques instants.
– Ça va à l’encontre de ma règle à moi.
– Qui est ?
– L’inverse de la vôtre : informer les gens, quoi qu’il advienne. Les pires saloperies se cachent dans l’ombre des petits accommodements.
– Al Qaïda s’est financée grâce aux diamants de la Sierra Leone, dit-elle.
– Mohammed et Gailani étaient envoyés par un certain Abdullah Ahmed Abdullah, un proche de Ben Laden. Ils avaient pour mission d’acheter un maximum de diamants juste avant les attentats. Ben Laden savait qu’après le 11 septembre tous les comptes auxquels il avait accès, ainsi que ceux de ses proches seraient bloqués. Al Qaïda ne pourrait plus se financer grâce au système bancaire international.
– Les diamants permettent de contourner les interdictions bancaires, dit Tanya.
Amanda sourit.
– Exactement. Forte valeur intrinsèque, non traçables et négociables partout sur la planète. D’après ma source au FBI, Abdullah et le général Mosquito étaient en contact depuis 1998. La petite plaisanterie durait depuis des années.
Tanya tenta de se représenter les sommes en jeu.
– Ils ont dû se constituer un trésor de guerre de plusieurs millions de dollars.
– Plusieurs dizaines de millions de dollars, peut-être même plusieurs centaines de millions, vous voulez dire. De quoi voir venir.
Ce serait un coup de génie incroyablement ironique : créer de toutes pièces une prétendue rébellion pour s’emparer de mines de diamants, et lorsque la guerre est en voie de s’achever, investir l’argent qu’on a gagné grâce aux massacres dans des mines parfaitement légales et déclarées…
– Nous ne pouvons pas tuer tous les gens qui représentent une gêne, Monsieur.
– Bien sûr que si, nous pouvons ! Pourquoi ne pourrions-nous pas ? Cette nation s’est même bâtie sur ce principe.
Comme toujours, les dictateurs se bercent d’illusions. Taylor pensait qu’un peu d’aide suffirait à sauver son régime, mais c’était d’un défibrillateur dont il aurait eu besoin. Les dictateurs aiment à penser que leur sort sera différent de celui de leurs prédécesseurs, qu’ils sont plus malins, que leur pouvoir est plus stable. Ils sous-estiment souvent l’adversité et la haine de leur peuple. La peur qu’ils instillent est une arme à double tranchant ; bien dosée, elle tient les rênes serrées, mais quand, par effet de surdose, les gens n’ont plus rien à perdre, là, les véritables ennuis commencent.