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Dans une petite ville entre l'Aveyron et Clermont-Ferrand, Jacques Bangor, anciennement mi-commercial mi-designer de lingerie fine, est actuellement au chômage et son peu d'entrain à retrouver du travail risque de lui faire perdre le bénéfice de ses indemnités. C'est un « rabalaïre », c'est-à-dire, en occitan, un homme qui va chez les uns et chez les autres, qui farfouille, qui ne tient pas en place. C'est un grand amateur de vélo, mais surtout il a l'esprit très occupé par ses nombreuses amours et aventures sexuelles, avec des hommes et des femmes, même s'il se définit lui-même comme homosexuel. Son attirance envers autrui ne suit pas les canons habituels et il aime aussi, par exemple, les hommes laids, voire difformes, ou les vieilles femmes. Il lui arrive tant de choses qu'il ne sait plus où donner de la tête, tout cela dans un contexte d'attentats islamistes qui peuvent le toucher de près. Il semble perdre peu à peu le contrôle de sa vie, et la rencontre qu'il va faire avec un tord-boyaux stupéfiant, dans un hameau perdu en montagne, ne va pas contribuer à le lui faire retrouver. ● Depuis 2014 et son premier roman Ici commence la nuit, j'attendais avec grande impatience le nouveau livre d'Alain Guiraudie, connu surtout comme réalisateur de films (L'Inconnu du lac, par exemple). Il faut dire que son premier livre avait été pour moi une vraie gifle littéraire. Je n'étais pas revenu de son audace et de son originalité. Et voici que pour la rentrée littéraire 2021 il publie un pavé de 1040 pages, rien que ça ! le volume m'a fait peur, je dois le dire, et j'ai différé la lecture jusqu'à maintenant. ● Mais quel livre ! Là encore, de quelle liberté Alain Guiraudie ose faire preuve ! Son monumental roman ne ressemble à aucun autre. Tout est perçu à travers la conscience de Jacques ; le roman restitue le flux de ses pensées, brassant et mettant en relation une somme de faits, d'états d'âme, de sentiments qu'on ne songerait pas forcément à relier. Les personnages sont hors du commun, leurs réactions et leurs aventures tout autant, l'histoire va dans tous les sens sans que le récit ne manque jamais de tenue et on s'y retrouve toujours. Tout est un peu décalé par rapport à la réalité qui fait notre quotidien. Tout est fabuleusement original, y compris la fin, sublime. On ne s'ennuie pas une seconde aux tribulations de Jacques et des autres nombreux personnages. ● C'est sans aucun doute le roman le plus original de la rentrée littéraire, et quel écho a-t-il eu ? Quels articles dans la presse ? (Un dans Elle et une mention dans Les Inrocks.) C'est tellement dommage ! Même s'il risque de ne pas plaire à tout le monde, avec ses scènes très osées et sa prose volontairement relâchée, on ne lui laisse pas assez la chance de rencontrer son public. Je vous le conseille vivement.
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Ah Jacques ! L'entropie croissante de ton univers fout un bordel inimaginable dans ta vie. Ta fabuleuse disponibilité pour toute la palette de tes émotions sensuelles pourrait se résoudre dans une pansexualité heureuse et tranquille, mais, simultanément, t'abandonnant à ta générosité amoureuse et sexuelle, tu vas compliquer un peu et finalement beaucoup ton existence de chômeur hédoniste. Hommes ou femmes, jeunes ou vieux, minces ou dodus, surtout dodus, dits beaux ou dits laids (souvenir sonore de Dylan ou Trenet), flics ou curé, ou qu'importe, il suffit de l'émotion, fût-elle mystique. Même le sublime paysage d'un col pyrénéen, tu lui as fait l'amour.
Qui pourrait faire face, Jacques, sinon toi ? Soucis, tracas, frayeurs, angoisses, bonheurs aussi, engendrent des jaillissements de pensées qui semblent surgir perpétuellement de ton cerveau en fusion. Un feu d'artifice dont les fusées sophistiquées – oh les belles rouges ! –, se métamorphosent en d'autres coloris. Tes pensées y ressemblent : affirmations rutilantes immédiatement nuancées par les doutes nécessaires et souvent, étincelles finales, la méditation des conséquences. D'un tourment à l'autre, d'une émotion à l'autre, s'irriguant l'un l'autre s'édifie un réseau anastomosé complexe, qui englobe tout. Qu'importe la fantaisie des événements, ton esprit en action tu l'exposes. Tu m'as fait rire aussi, souvent, tant je reconnaissais les exaltations, les vrais réflexes et les petites lâchetés.
Ton récit, Jacques, quelle épopée ! du col cévenol de l'homme mort jusqu'au pied des Grands Causses, allumé, tout schuss vers des amours sans exclusives, j'ai tremblé pour toi.
Quel plaisir de lecture !
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Célinien par le flux,
Rabelaisien par l'esprit,
Huysmansien par les circonvolutions métaphysiques,
'Rabalaïre' est un grand roman français, attaché à la tradition mais inventant sa propre langue, son propre univers, sa propre logique. Roman d'initiation métaphysique, roman fantastique, roman de terroir, roman mystique, c'est un livre est à la fois exigeant et profondément populaire ~ non seulement le peuple [sa langue, ses modes d'être, ses traditions] est son sujet, mais le style est populaire, la forme est populaire : jamais Guiraudie ne se paie de mots, jamais il n'use d'arguments d'autorité littéraire, sa langue ne cherche jamais à impressionner ou à dominer le lecteur, elle gagne toute son épaisseur au fil du récit. C'est une flamboyante course de fond, pas un sprint démonstratif.

'Rabalaïre' n'est pas de ces romans dont on pourrait citer telle ou telle phrase emblématique ou pleine d'emphase égotique. Ce qui impressionne c'est l'ensemble, c'est le flux dans sa continuité, la somme d'actions inconstantes et indécises qui finissent par former cette splendide cathédrale romanesque.

Ambitieux et modeste, foncièrement sexuel et profondément spirituel, ordinaire et surnaturel, trivial et picaresque, Guiraudie embrasse tout, étreint bien, fait feu de tout bois, produit sa propre logique, et nous emmène jusqu'au bout du bout de son voyage au bout de la nuit de l'inconstance du désir, de la clandestinité du crime et des mystères de l'amour.

Guiraudie était depuis fort longtemps mon cinéaste français préféré ~ c'est aujourd'hui aussi mon écrivain favori.
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Arrivé dans les dernières pages de Rabalaïre, je me suis fait la réflexion que je n'avais jamais rien lu de tel ! Pourtant j'en ai lu des livres mais là, plus de mille pages d'un seul tenant, sans fin de chapitre pour caler son marque-page, sans même les deux sauts de lignes qui parfois séparent un chapitre en plusieurs parties plus petites, là aussi pratique pour faire une pause. Rabalaïre, c'est une narration sans début ni fin, à la première personne du présent, c'est un quotidien assez déroutant dans les méandres duquel nous sommes entraînés presque malgré soi. Au début, c'est à vélo que Jacques nous entraîne sur les pentes du Col de l'homme mort et poursuit son rêve cycliste, puis ce sera, l'hiver et le froid arrivant, en voiture ou à pied. Jacques ne peut pas rester en place, il a une bougeotte d'enfer et toujours une gaule qu'il découvre chaque fois, émerveillé par sa vitalité !
Rabalaïre, c'est de la littérature de l'extrême. C'est l'histoire d'un mec qui poursuit son phallus, jamais intéressé par autre chose que le destin de sa semence, jamais vraiment préoccupé par autre chose que cet endroit magique, Gogueluz, village imaginaire situé dans une région montagneuse indéterminée. L'action se déroule en continue dans un triangle Gard, Clermont-Ferrand, les Pyrénées. Ceci dit, les distances ne semblent pas préoccuper beaucoup le personnage principal.
Dans Rabalaïre, il y a beaucoup de monde, des personnages que Jacques nous décrit toujours avec précision, guidé par l'intérêt érotique que chacun d'eux présente, qu'il soit jeune ou vieux, homme ou femme, gendarme, paysan, curé ou islamiste radicalisé. Jacques se définit comme homosexuel, mais ça n'est pas si simple, il est bien autre chose, il se découvre peu à peu comme tout sexuel, tout phallique.
Au-dessus de Gogueluz il y a une forêt dans laquelle il se passe de drôles de choses, il y a des endroits dans lesquels vivent des hommes et des femmes sans âge, sans eau courante ni électricité. Des plantations dans lesquelles poussent des plantes dont je ne vous dirais rien de plus sinon qu'elles attisent les convoitises.
Pour terminer cette mise en bouche, sachez qu'Alain Guiraudie à écrit un millier de pages assez facile à lire, le langage n'y est pas alambiqué, nous frôlons même le langage parlé de Céline. Ce n'est pas par la langue que Rabalaïre nous ensorcelle mais par la magie du monde tel que le narrateur le perçoit et le vit.
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Commencé en octobre 2021, Rabalaïre m'a accompagnée de longs mois, quelques pages par soir sans se presser, pour ne pas le finir trop vite. Fidèle aux écrits (livre et films) d'Alain Guiraudie, le roman se passe dans la tête de Jacques qui raconte sur 1000 pages en flux de conscience ses errances entre le sud-ouest et Clermont-Ferrand. C'est sa passion pour le vélo qui lui fait découvrir le col de l'homme mort et ses habitants dont il tombe sous le charme, troquant ainsi de passion. Il n'a qu'une idée en tête : faire partie de ce monde et découvrir tous ses secrets. Petit à petit, il s'immisce ainsi dans la vie des habitants du hameau. Guidé par son obsession presque maladive pour le sexe (chaque nouvelle personne rencontrée est une personne à qui faire l'amour, peu importe le sexe, l'âge, la disponibilité, etc.), Jacques, sans le savoir, va détruire le microcosme du col de l'homme mort, et ses amours avec.
Une particularité très appréciée de ce roman : l'écriture de l'occitan.
Quelle tristesse que ce livre ne m'accompagne plus chaque soir.
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1038 pages.
En effet c'est très long.
Mais on replonge facilement dans les tribulations de notre cycliste altruiste et un peu nymphomane. Un livre drôle et original. Une écriture malicieuse et désinvolte.
À tester. Si vous n'accrochez pas au bout de 50 pages vous saurez vite que Rabalaïre n'est pas pour vous.
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Attention, pavé. C'est la première chose que j'ai envie de dire sur le deuxième roman du cinéaste et désormais écrivain Alain Guiraudie, publié aux éditions P.O.L. Plus de mille pages écrits petit avec assez peu de retour à la ligne. C'est un pavé. Certes on peut dire qu'il y a 200 pages en trop, mais sur 1000, ça a peu d'importance car c'est un pavement fascinant par ses choix radicaux, et une vraie expérience de lecture. Vu que ce pavé vous ne pourrez emporter nulle part (vu son poids) mais que vous aurez hâte de rouvrir chaque soir, quitte à vous fouler le poignet, pour continuer à lire les aventures de Jacques.
C'est lui, le Rabalaïre, un mot occitan pour dire un gars qui va à droite à gauche, un pique-assiette sympathique : Jacques, 47 ans. Un Français ordinaire qui vit dans la ville imaginaire de Bellegarde dans le Sud. Il est au chômage et aime à faire du vélo. C'est au détour d'une montée au col de l'Homme Mort que Jacques tombe amoureux du village de Gogueluz, et des gens qui le peuple : Rosine, la patronne du café, le curé du village, Enric un berger vieillissant, Jordan, un jeune mystérieux, Gabin, un fou furieux.

Le roman se structure sur ses visites, une recherche d'emploi qui l'amènera à Clermont-Ferrand, quelques courses à vélo, mais le centre, c'est « ce pays », où vient y traîner dans l'espoir de percer un mystérieux secret....
Lien : https://lesmonstres.org/2021..
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Très partagé sur ce livre. Intéressant sur les idées qui traversent le personnage. Beaucoup de scène crues, de sexe et peut-être un peu trop à mon sens. Cela ne m'as pas choqué, juste par moment c'est peu crédible et trop fréquentes. L'écriture est agréable et l'intrigue est prenante. Seul la fin ne m'as pas plus.
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Quelle étrange roman, et quelle expérience que d'en faire la lecture ! Nous côtoyons la pensée ininterrompue du narrateur durant 1040 pages, sans chapitre ni même un seul paragraphe pour reprendre son souffle... Ce narrateur, est-il aimable ? est-il détestable ? du moins est-il difficile de s'ennuyer à ses côtés.
Tour à tour fasciné ou agacé, on se replonge pourtant dans la lecture, et l'auteur réussit à garder notre attention captive de l'impression d'être dans une spirale dont on ne sortira jamais...
C'est un exercice de style étonnant, mais peut-être 200 ou 300 pages de moins en aurait rendu la recommandation plus simple ?
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