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Citations sur La Nuit Morave (9)

Si c’était un rêve, alors le sentiment qui l’avait pénétré était d’une force, d’une rémanence particulièrement rare à l’état de veille. Et il observa en passant que la joie, grande et continue, la reconnaissance, l’inclination, le bonheur de vivre, de plus en plus, il ne les ressentait presque plus que dans les rêves.

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Écrire ? Qu’est-ce que cela signifiait pour lui autrefois ? Bien une échappatoire avant tout. Mais pour échapper à quoi ? A la "réalité" ? A la contrainte de la réalité ? Au monde ? Aux exigences du monde ? Non. Ou si, plutôt : si le fait d’ouvrir la bouche, d’être contraint de parler, ce "Allez, vas-y ! Raconte !" était une de ces exigences du monde, alors il se sentait poussé à s’y soustraire, et pas par le biais du silence par exemple, mais justement de l’écriture. Lui qui, alors, dans la Nuit Morave, ne faisait que parler et parler, il avait recherché l’écriture voilà des décennies pour éviter cette maudite oralité.


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Et qui contemple les humains, il meurt de chagrin.
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Les bruits de l'autocar, du moteur, semblaient désormais de plus en plus comme les accents et l'expression même de cette colère. Ne manquaient plus que les paroles - sinon tout était réuni pour composer une tirade rageuse. Le chauffeur faisait hurler le moteur de son car, le faisait mugir, vrombir, crisser, rugir, cracher, grincer des dents, glapir, chanter faux, s'élever menaçant, comminatoire (oui), et tout cela en rythme, gardant bien cette cadence accordée au tremblement de la colère en lui et qui avait quelque chose d'un prélude instrumental, comparable vraiment, désormais, à ces premiers sons sur la grosse corde, corde unique, de crin tressé, de la gusla des Balkans, vacarme et désordre apparent où toutefois, si l'on tendait mieux l'oreille, les sons ne se confondaient jamais, se distinguaient isolément et cependant succédaient l'un à l'autre en une rythmique justement. C'est une colère sauvage mais contenu, oui, joueuse, qui s'échappait du moteur et de l'autocar tout entier, lesquels servaient d'instruments au conducteur pour son ouverture, et la lumière changeante des phares, rythmique elle aussi, code, pleins phares, inutile sur la Magistrale constamment vide, faisait partie de ce jeu. Dans un instant s'y joindraient les paroles, la voix, qui ne serait pas nécessairement une voix chantée.
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Plus il mettait d'horizons entre lui et son pays natal, plus tel ou tel détail oublié là-bas devenait présent pour lui, et, dans les environs de la destination principale, bien des buts isolés s'offraient alors. Et il apprit ce faisant que, parfois, pour ainsi dire contrairement aux lois de la physique, l'éloignement des corps renforçait plutôt la puissance d'attraction des buts.
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Il ne souhaitait pas monter dans le car des émigrants, mais néanmoins fuir ces Balkans, les Balkans des villes frontières sans frontières palpables, les Balkans des mille frontières invisibles, toutes mauvaises et profondément hostiles, de vallée en vallée, de village en village, de ruisseau en ruisseau, de tas de fumier en tas de fumier, les Balkans des petits enfants lanceurs de pierres, des baisers soufflés si méprisants, de cet ail qui ne rendait les vampires que plus avides de sang encore. Fuir les ténèbres de ces Balkans-là pour les métropoles festonnées de lumières aux taxis hurlant dans les trouées des gratte-ciel, aux ponts où chaque couple d'amoureux était comme un salut de paix, aux fleuves où sur des bateaux l'on célébrait des mariages, des baptêmes, la conclusion de quelque affaire, ou simplement, pour rien, trois fois rien, l'on donnait des fêtes, pourquoi pas même sur un bateau aux roues à aube imitées comme sur un vapeur du Mississippi, du nom de Louisiana Queen. Et en même temps il souhaitait fuir ces Balkans-là pour les autres Balkans, tels qu'il les avait toujours connus dans les années d'avant, plus profonds que toute autre région sur la terre, par exemple sur sa péniche de la Morava, souhaitait, fin du voyage, retourner sur sa Nuit Morave.
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... cette femme qui pourtant comme aucune autre encore correspondait à ses rêves et à leur ardeur, une ardeur homme-femme, lui apparaissait de plus en plus, dans l'absence, comme une menace. Une menace? Oui, pour sa solitude. Pour ses expériences en solitaire, pour quelque expérience que ce soit: avec elle à ses côtés, c'était impossible.
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Et tant de soupirs à entendre pour qui avait des oreilles pour entendre, pudiques, sans un mot, comme jamais encore. Seuls les effrontés, les bouffis d'eux-mêmes, les impudents survivaient? Non la pudeur elle aussi avait survécu, mais pas comme il était écrit.
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"Ce n'est que lorsque je suis absorbé que je vois ce qu'est le monde." "Ce n'est que lorsque je suis ravi que je vois ce qu'est le monde."
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