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sur 234 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
C'etait Borges qui avait ecrit: “Des divers instruments de l'homme le plus etonnant est sans doute le livre. Tous les autres sont des extensions de son corps. le microscope, le telescope, des extensions de sa vue; le telephone est extension de la voix; nous avons la charrue et l'epee comme extension de son bras. Mais le livre est autre chose: le livre est une extension de la memoire et de l'imagination". Ce livre pourrait servir d'exemple a Borges, une extension reussie de la memoire et de l'imagination.


C'est une saga familiale sur cinq generations, des centaines de pages pleines d'amour et de haine, de peu de joie et de beaucoup de tristesse, d'ideaux eclates, de blessures et de morts, de blessures physiques et morales, celles faites a d'autres et celles qu'on s'inflige soi-meme, et de morts, de nombreuses morts, pas toutes naturelles, pas toutes de vieillesse.


Une epopee classique sur l'effondrement d'une famille, d'une culture, d'un environnement social. Sur un siecle. Avec tous les changements survenus avec le temps. Et autour de cette famille, c'est le destin epique d'un pays, captif d'une grande puissance, sequestre par elle et claquemure dans un systeme totalitaire, tyrannique: la Georgie.


La narratrice, Niza, mene une enquete effrenee pour reconstruire l'archeologie familiale, ses petits secrets et ses grandes entreprises, les peripeties de la vie de chaque generation, et transmettre ce recit a sa jeune niece, Brilka, lui transmettre la memoire de la famille, comme un talisman conferant un meilleur avenir.


Tout commence au debut du XXe siecle par un georgien qui concocte une recette de chocolat euphorisant, mais qui peut avoir des effets malefiques. La recette passera les generations par les filles, jusqu'a Niza, qui par son recit abolit la malediction qui y est imbriquee.
Les femmes sont les grandes protagonistes de cette saga, toutes de grandes heroines de tragedie. Un seul homme dans cette famille, Kostia, mais de nombreux autres, recueillis par les femmes de la lignee, aimes par elles, et qui seront les instruments de leurs malheurs.


8 chapitres, un par protagoniste (et portant son nom comme titre), precedes d'un prologue narrant les efforts d'un chocolatier qui reve d'enraciner les saveurs et l'esprit de Vienne en Georgie mais est depossede par la revolution bolchevique.
Je passe en revue ces chapitres, et leurs hero[ine]s:
1.- Stasia. La fille du chocolatier, reve de devenir danseuse a Paris, mais sera vite mariee a un officier de l'armee rouge, servant toujours loin d'elle, qui lui fera deux enfants pendant ses breves permissions. Sans arret a sa recherche, elle rencontrera d'autres femmes qu'elle aimera et qui la marqueront a vie, surtout une poetesse d'avant-garde, Sopio, immolee par la revolution et dont elle elevera l'enfant, Andro. Cet enfant sera le premier d'une lignee de garcons que les descendantes du chocolatier aimeront, une apres l'autre, des amours toujours tragiques. Stasia ne reviendra a sa passion de la danse que pour son arriere petite-fille, Niza, qui se rappellera toujours son ultime pas de deux.
2.- Christine. La petite soeur de Stasia. Tres belle, elle se mariera a un haut fonctionnaire du regime, mais devra ceder ses faveurs au “petit grand homme", comme est designe ici le terrible Beria des services secrets. Son mari se suicidera et elle se brulera la moitie de la figure a l'acide. C'est elle qui acceuillera plus tard le fils et le petit fils d'Andro.
3.- Kostia. Frere de Stasia. Communiste convaincu, il s'enrolera dans l'arme de mer et y fera une belle carriere, devenant un grand ponte. Il sera tres dur avec les siens et poursuivra sans relache Andro, qui avait pris le parti de nationalistes pro-allemands, et toute sa descendance. Il fera tout pour l'envoyer au goulag et des annees plus tard faire torturer et tuer le fils de celui-ci, qui avait eu le malheur d'engrosser bien malgre lui sa fille Elene. le parti est sa patrie. le parti est sa vraie famille.
4.- Kitty. La fille de Stasia. Elle aimera Andro, sera torturee a cause de lui, perdra l'enfant qu'elle porte de lui et ne pourra plus en avoir. Eternelle opposante, elle sera exfiltree hors de l'URSS avec l'aide d'un ami de Kostia poste a Londres et arrivera a faire une fulgurante carriere de chanteuse. Louve solitaire malgre un pitoyable amour lesbien, elle finira par se suicider.
5.- Elene. La fille de Kostia, qui l'eloigne des siens pour lui offrir une education a Moskou. Mais Elene se revolte, se cloitre dans une apathie provocatrice et par defi viole le fils qu'Andro a eu au goulag, et qui a ete recueilli par Christine, Misha. Kostia la fera avorter de force, et elle le fuira pour s'aboucher avec des marginaux, reprouves par le regime et par son pere. Elle aura deux filles, de deux peres differents, que son pere lui soustraira pour les eduquer a sa maniere.
6.- Daria. La plus belle des filles d'Elene. La preferee de son grand-pere Kostia qui la choie. Elle snobe sa soeur Niza jusqu'a ce que celle-ci se mette en danger pour lui permettre de jouer un premier role au cinema. Elle devient une petite star, mais mariee a un homme qui la maltraite, elle decline, et dans son desespoir finit par se suicider (ou etait-ce un accident? On ne saura jamais).
7.- Niza. Elle n'est pas belle mais tres intelligente. Delaissee et meprisee par le grand-pere qui les a recueillies, elle trouvera un soutien aupres de son arriere grand-mere Stasia, qui lui passera peu a peu les histoires de la famille. Elle aussi, comme les femmes des generations anterieures, s'eprend d'un rejeton du vieux Andro, de Miro, fils de Misha (que sa mere avait viole). Mais elle veut fuir, loin de sa famille, et lui est un indecis, alors elle part seule, grace a un mariage blanc, pour l'Allemagne, ou elle vivote jusqu'a ce qu'apres quelques annees un telephone de sa mere lui apprenne que Brilka, la fille de Daria, a fait une fugue et lui enjoint de la ramener a la maison. Elle rattrappera la fillette de 12 ans, et constatant son desarroi, decidera de lui ecrire et lui dedier l'histoire de la famille, tout le deroulement d'espoirs et de douleurs, pour qu'elle puisse surpasser des fatalites hereditaires. C'est comme si Niza, qui c'etait eloignee pour ne plus souffrir, reprenait par le truchement de Brilka le chemin de retour vers sa famille, et cette fois en essayant de cicatriser les blessures du passe et de prendre, avec et pour Brilka, un nouveau depart.
8.- Brilka. le chapitre est vide. Rien n'est ecrit. Ce sera a Brilka de l'ecrire, et Niza espere surement que ce sera un chapitre plus heureux, ou au moins plus serein.


Brilka, qui vit au moment ou l'URSS s'est effondree et n'est plus que la Russie, ou la Georgie a retrouve son autonomie, peut etre une nouvelle page, une page blanche. Chez tous les autres personnages, tous ceux et toutes celles qui l'ont precede, le totalitarisme a laisse ses traces, des traces douloureuses de peche et de faute. Dans un long deroulement de situations-limite les protagonistes delabrent, desagregent les categories morales, trespassant souvent la fine ligne, la frontiere floue qui separe la cruaute des bonnes intentions. C'est le dilemme bien connu de la fin et des moyens, epluche ici a l'echelle de la famille, de gens proches entre eux. La cruaute est plus significative, plus notoire, chez les hommes, qui ont tous ou presque laisse une partie de leur ame a la guerre ( et il y en a eu, des externes et des internes fratricides, en ce siecle! ), mais les femmes n'en sont pas denuees pour autant.


C'est donc une lecture qui prend aux tripes. Bien sur, il y a eu des moments ou je me suis dit que c'etait trop long, sans raison veritable; des moments ou la repetitivite de l'action m'a agace. Les meres, generation apres generation, ne s'occupent pas de leurs propres enfants, elles les laissent a d'autres, et souvent s'occupent mieux d'enfants etrangers; ou pas vraiment etrangers, mais de la lignee parallele, celle qui est poursuivie par les hommes et aimee par les femmes. Generation apres generation, les descendantes de Stasia aimeront les descendants de son amie Sopio, qui en paieront le prix. Et elles s'occuperont des enfants qu'ils feront avec d'autres femmes. Une repetitivite qui peut lasser, voire exasperer. Et tous les personnages attrapent a un moment ou un autre des pulsions destructives. Tous changent abruptement et sont detruits par ou dans ce changement. Comme une recette litteraire rabachee a l'exces. Et les incipits de chaque chapitre, slogans communistes ou vers de poetes dissidents, qui n'eclairent presque jamais la suite, eux aussi m'ont semble courir apres la recette du best-seller pour intellos. Bref, tout n'est pas parfait dans ce livre. Et pourtant il emeut souvent, il prend aux tripes. Il recele de tres belles pages. Malgre les longueurs c'est un livre absorbant. Une des belles oeuvres produites en la peripherie de l'empire russe, dans la meilleure tradition de la litterature russe, bien qu'elle air ete redigee en allemand. Si je veux la caracteriser en un mot: opulente. Ou fastueuse. Ou luxuriante. Choisissez vous-meme (apres l'avoir lue, ce que je conseille).
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Ouf ! j'ai fini ce pavé de presque 1000 pages imprimées serrées et je me retrouve bien embêtée pour chroniquer cette (trop) longue fresque romanesque qui m'a promenée dans tout le XXe siècle, de Tbilissi à Berlin, en passant par Moscou, Paris, Londres, Vienne et j'en oublie. Niza, la narratrice installée à Berlin, raconte à Brilka, sa nièce de 12 ans qui vient de fuguer de chez elle, l'histoire complexe et dramatique de leur famille. Pour ce faire, elle remonte à son trisaïeul, le fabricant de chocolat dont on ne connaît que le nom de famille (Iachi), artisan devenu prospère avant 1917, l'année de tous les changements en Géorgie, en Russie et, pour simplifier, dans ce qu'on appelle « les pays de l'Est ». Pour la descendance des Iachi, on s'y retrouve assez facilement grâce à l'arbre généalogique présenté sur un des rabats de la couverture. J'ai pourtant dû rapidement en faire un autre, celui des descendants de Sopio, l'amie de Stasia, car les membres de cette « famille » vont être liés de très près aux Iachi, et les liens tissés sont d'une importance capitale pour la compréhension des traumatismes que subissent les personnages de génération en génération. L'histoire des deux familles est indissociable de l'Histoire du XXe siècle. Je ne connaissais à peu près rien de la Géorgie avant de lire ce roman, et Nino Haratischwili donne une foultitude de renseignements parfois passionnants, parfois superflus à mon avis. le roman permet de mesurer l'emprise et le sadisme du « petit grand homme » (Lavrenti Beria ne sera nommé que dans la septième partie), le poids de la dictature locale et celui de la présence du « grand frère » soviétique, les compromissions nécessaires à la simple survie, la déportation, la corruption, les privilèges d'une certaine élite et la peur omniprésente même dans la vie quotidienne.
***
« Je vais commencer par Stasia pour arriver à toi, Brilka », dit Niza à sa nièce dans le prologue qui sert d'introduction et qu'il est, je crois, nécessaire de relire à la fin du roman. Cette saga se compose de huit parties titrées du prénom du personnage principal ; sept parties pleines d'histoires et d'Histoire, de rebondissements, de drames et de tragédies, d'amours et de déchirures, celles de Stasia, Christine, Kostia, Kitty, Elen, Daria, Niza, et une huitième suivie d'une page blanche : l'histoire de Brilka reste à écrire. Dans la septième partie, celle où Niza devient le personnage principal, au moment de la naissance de Brilka, cette dernière passe du statut de destinataire à celui de personnage à part entière, et Niza s'en explique dans les pages 851-852. Cet artifice m'a semblé original et les raisons qu'expose la narratrice se révèlent touchantes et pertinentes. Je crois pourtant que ce beau roman aurait gagné à être plus condensé. J'avoue m'être parfois ennuyée çà et là malgré la qualité et la profondeur de l'écriture, surtout pendant la partie dévolue à Elen, peut-être parce que je n'ai pas réussi à éprouver de véritable empathie pour ce personnage difficile, alors que Kostia, malgré son intransigeance, réussit par moment à montrer ses failles. Un beau roman dans l'ensemble qui me poussera à lire le Chat, le Général et la Corneille
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Un grand merci à la masse critique de Babelio et aux Editions Piranha pour m'avoir invité à la dégustation de la huitième vie, aussi onctueux qu'un bon chocolat chaud (ceux qui l'ont lu comprendront).

Ah, la Géorgie ! Quant on a eu la chance de la visiter, même sur un laps de temps relativement court, c'est un pays qu'on n'oublie pas. Pour ses habitants, chaleureux et bons vivants, et pour ses paysages d'une beauté à couper le souffle. Pour qui connait (un peu) la Géorgie, la Huitième vie de Nino Haratischwili est un pur bonheur, une saga familiale sur six générations qui embrasse l'ensemble du XXe siècle. Mais pour qui ignore tout ou presque de ce pays, que d'aucuns considèrent à tort comme une « région » russe, toujours cette confusion entre Union soviétique et Russie, pour celui ou celle-là, le voyage dans le temps et l'espace sera sans doute fort dépaysant et mouvementé. Cette fresque au long cours qui commence au début du XXIe siècle et s'y achève, se permet un flashback qui va occuper les 960 pages du livre au gré de la remontée du temps, en suivant de façon croisée les personnages d'une même famille géorgienne, et ceux qu'ils côtoient. On pense évidemment au « grand » roman russe mais le caractère caucasien du livre et de son auteure (même si Nino Haratischwili vit en Allemagne depuis près de 15 ans et écrit en allemand) lui donne souvent un ton différent qui n'est pas si loin du réalisme magique latino-américain, en particulier celui que l'on retrouve dans les premiers livres de la chilienne Isabel Allende. Tout au long de la huitième vie, la romancière fait résonner la grande Histoire dans l'intimité des existences et de la famille Iachi, dont quelques uns des membres successifs ont droit à un chapitre particulier. Ce qui n'empêche pas Nino Haratischwili de mener plusieurs intrigues en parallèle, tout en rappelant à intervalles réguliers les grands événements du siècle et leurs conséquences directes ou collatérales chez les Iachi. C'est assez vite l'histoire de l'Union soviétique qui donne le tempo en particulier quand son « guide » s'appelle Staline (son nom n'est jamais prononcé dans le livre comme si son origine géorgienne était une raison supplémentaire de le honnir). Les personnages du livre sont ballotés par les mouvements de l'histoire et leurs contradictions mêmes y sont ancrées. le roman est d'ailleurs basé sur de multiples oppositions au sein de la famille Iachi, ses membres se construisant ou se détruisant dans ces antagonismes intimes. Il serait trop long d'énumérer tous les personnages de cette saga séculaire, chacun d'entre eux est amoureusement défini avec force détails par la romancière, avec leurs qualités et leurs défauts, et une destinée le plus souvent funeste. On pourrait reprocher au livre son côté mélodramatique mais les tragédies personnelles s'inscrivent dans le cheminement d'un siècle terrible et Nino Haratischwili les décrit avec une belle humanité. Dense et luxuriant, La huitième vie se lit comme un feuilleton passionnant avec moult rebondissements. Tout commence avec une recette de chocolat chaud, doté de pouvoirs magiques, qui passera de mains en mains, et qui constituera une sorte de sortilège récurrent souvent malheureux pour les Iachi. Il n'est pas besoin d'en savoir plus pour embarquer dans cette croisière vers le grand large romanesque.

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Stasia, Christine, Kostia, Kitty, Élène, Niza, Daria, Brilka, des prénoms dont je vais certainement me souvenir longtemps tant leur histoire m'a transportée durant toute la lecture de ce roman de près de 1 200 pages.
1 200 pages que j'ai dévorées ; roman que j'ai refermé avec regret, ralentissant même ma lecture pour ne pas quitter la famille Iachi.
De l'ancêtre, Ketevan, le fabriquant de chocolat, inventeur d'une mystérieuse et irrésistible boisson au chocolat, à l'adolescente fugueuse , Brilka, Nino Haratischwili nous conte le destin d'une famille géorgienne sur près de 100 ans. Entremêlant l'intimité de cette famille et L Histoire très douloureuse et mouvementée de son pays natal, Nino Haratischwili nous tient en haleine avec un souffle romanesque impressionnant.
Partagé en Livres, un pour chaque personnage essentiel de cette famille reliés par Niza, la passeuse de mots et d'histoires, ce roman est passionnant, plein d'amours, de violence et d'espoir.
J'ai beaucoup appris sur le sort de la Géorgie, pays à l'ombre de l'écrasante Russie puis devenu République de celle-ci dominé par un régime de terreur, avant de devenir indépendant.
Stasia, Christine, Kostia, Kitty, Élène, Niza, Daria, Brilka, je ne les oublierai pas ; Andro, Guiorgui également mais surtout Ida dont le destin m'a bouleversée.


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Imaginez une malédiction. Liée à un chocolat chaud. Un livre qui traverse les années et les époques. Une saga familiale qui nous amène en Géorgie, en Russie, à Londres et à Berlin de l'année 1900 jusqu'aux années 2000.

Voilà à quoi il faut vous préparer avec ce pavé de plus de 1000 pages.

Tout commence en Géorgie lorsque le père de Stasia Iachi met au point une recette d'un chocolat chaud, exquis. La voie d'un succès assuré pour son entreprise familiale. Sa fille chérie, Stasia donc, rêve de danse mais rencontre un officier qui va emporter ses rêves de Paris, pour une vie de femme mariée. 

La Révolution russe éclate et les malheurs vont s'attacher à travers les années à la famille Iachi à l'image des tournants de l'histoire. 

Ce roman, chaudement recommandé, est très réussi. 

Les membres de la famille Iachi sont très bien construits, fouillés. Aucun n'est manichéen ou monolithique. On les comprend, on les aime, au fil des pages, avant de leur en vouloir, ou de les détester. 

Ils sont mis en avant puis passent en arrière plan quand la nouvelle génération entre en jeu. Pourtant, le poids des secrets et des trahisons est toujours présent, empoisonnant l'existence des enfants. 

C'est aussi toute l'histoire du vingtième siècle qui défile. L'autrice le fait, parfois, de façon succincte, en évoquant des anecdotes. Cela m'a, d'ailleurs, un peu gênée au début de ma lecture où j'aurais aimé plus d'immersion dans la réalité de l'époque. Mais disons qu'il s'agit là d'un détail. 

Car l'intérêt du lecteur est intact, page après page, Iachi après Iachi. 

Un roman qui mérite toutes les chroniques enthousiastes qu'il a reçu. Comme vous l'aurez compris, je rejoins la cohorte des lecteurs qui vont recommander ce roman. 

Et vous, prêt à rejoindre les adeptes de la famille Iachi ? 
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Une incroyable fresque du XXe siècle à travers les yeux d'un petit pays du Caucase à l'ombre de sa grande soeur soviétique, à laquelle il a donné de biens sinistres et puissants personnages...

On suit dans ce roman de l'écrivain géorgien Nino Haratischwili les déboires d'une famille frappée d'une étrange malédiction, qui semble être liée à leur consommation incontrôlée d'un délicieux chocolat chaud dont la recette aurait dû rester secrète. Et au fur que la malédiction s'abat, des fantômes apparaissent pour certains des membres de la famille...Ce quelques touches fantastiques ne doivent pas faire oublier l'histoire avec un grand H que nous conte l'auteur, consacrant certains passages entiers à nous rappeler l'enchaînement d'évènements mondiaux retentissants, dans lesquels s'inscrivent ses personnages, certains plus attachants que d'autres.

Et tandis que les conflits prennent le monde à la gorge, on découvre leur pendant quotidien, humain, à travers les membres de la famille Iachi et les atrocités qu'ils subissent...ou déclenchent. Leurs portraits psychologiques - complexes - ne fait qu'ajouter de la profondeur au récit, tout comme cet insupportable égoïsme et volonté de puissance qu'ont les hommes du roman, imposant à tous ce qu'ils pensent être l'unique voie pour atteindre la plénitude, tandis que les femmes s'efforcent de les épargner, portant seules leur fardeau et ne ployant jamais sous son poids.

Une très belle ode aux femmes dans toute leur grandeur et leur déchéance, mais aussi un tableau esquissé avec une grande finesse du monde de l'Est et du climat politique de la Géorgie et par extension de l'URSS. Si les premiers et les derniers chapitres m'ont agacée par la manière qu'à la narratrice de s'adresser sans cesse à sa nièce, plombant la fluidité du récit, le coeur de cette huitième vie, mêlant personnages réels et personnages de fiction dans un tableau criant de vérité et de cohérence, fait oublier le nombre conséquent de pages qui défilent, et donne au lecteur un roman véritablement passionnant sur la Géorgie.
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Ce roman raconte l'histoire de la famille Lachi en Géorgie dans le tourbillon du 20ème siècle.
La saga commence en 1900 à la naissance de Stasia et nous fait traverser la Révolution russe, la seconde guerre mondiale, l'emprise de Staline et le déclin de l'URSS à travers l'austérité du monde communiste mais aussi la chaleur et les tourments de chacun des personnages dont le destin sera irrémédiablement lié à l'Histoire de la Géorgie.
La narratrice, Niza, appartient à l'avant-dernière génération et entreprend de raconter l'histoire familiale à sa nièce, la comparant à une tapisserie dont les fils sont si noués qu'on ne peut les dissocier.
Les personnages sont essentiellement féminins mais entièrement contrôlés par un seul homme, Kostia. Des drames, des bonheurs, la grande Histoire : des ingrédients classiques pour ce type de roman, à l'exception d'un seul qui restera secret et qui s'intègre dans la préparation d'un chocolat chaud, recette familiale qui se transmet de génération en génération.
Le prologue est un peu brouillon mais ensuite le récit trouve son rythme à travers une structure classique, chaque partie concerne un des personnages par génération.
C'est assez prenant, le style empreint d'humour voire de sarcasmes n'a pas été pour me déplaire.
Bien que très romancée, cette histoire ne tombe pas dans l'écueil de la romance. Les relations amoureuses et familiales sont crédibles, souvent dramatiques mais pour l'européenne occidentale que je suis, il ne semble pas pouvoir en être autrement dans ces territoires privés de toute intimité, de tout confort, de liberté.
L'auteur prend le temps de décrire ses personnages, de les replacer dans leur environnement émotionnel mais aussi économique et historique. Ils évoluent progressivement et le lecteur les accompagne dans les différentes étapes de leur devenir. Leur profondeur les rend terriblement attachants.
Bien que d'un volume qui demande réflexion avant d'entamer la lecture (plus de 900 pages), aucune longueur n'est à déplorer.
C'est donc avec plaisir que je recommande ce roman, une saga pour l'été plutôt enrichissante au parfum enivrant de chocolat chaud.
Mes remerciements aux Editions Piranha et à Netgalley.
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"Les longs livres, quand ils sont lus, sont généralement surestimés, parce que le lecteur veut convaincre les autres et lui-même qu'il n'a pas perdu son temps." Je tombe sur cette remarque alors que j'achève mon plus long pavé de l'année de 955 p.
Forte de cette mise en garde un peu spécieuse je vais tâcher de ne pas tomber dans le travers évoqué.
Retracer l'histoire d'une famille sur un siècle nécessite du temps et du souffle. le projet est d'ampleur car il s'agit de rendre compte des vicissitudes de la Géorgie. L'origine de l'histoire est située pendant les dernières années de la Russie tsariste et les premiers soubresauts de la Révolution soviétique et couvre le tournant du XXIe siècle et de sa première décennie.
Dès le livre I - et passé le prologue actuel - le récit suit l'ordre chronologique et se lit un peu comme un feuilleton. Les qualités littéraires de cette saga ne sont pas celles de l'Échelle de Jacob de Ludmila Oulitskaïa mais on ne compte pas, en revanche, de véritables longueurs.
Comme dans la littérature russe le roman est marqué par la présence omniprésente du drame, drame lié aux événements politiques mais aussi aux personnages forts tous marqués par un destin tragique. L'originalité, pour nous, tient plutôt en l'espace, la Géorgie, l'héroïne du livre, qui, une fois libérée du carcan soviétique, va se retrouver plus exposée encore, ajoutant aux tourments de la transition des conflits avec l'Abkhazie et l'Ossétie. La famille Iachi jusqu'ici favorisée, va prendre de front cet effondrement moral et économique.
L'auteur donne la parole et met en valeur les personnages féminins, piliers plus ou moins stables de la famille. Ces femmes souvent fantasques ne sont pas déterminées par leurs choix politiques ou idéologiques mais plus par leur quotidien.
Certains thèmes traversent le récit romanesque, la danse comme catharsis à un milieu étouffant, l'alcool qui permet d'oublier, les mariages ratés récurrents et puis d'autres thèmes à la limite du fantastique, un mystérieux Chocolat chaud doté de pouvoirs maléfiques transmis en cachette aux femmes par un arrière-arrière-grand-père inspiré, des anges en bois sculptés obstinément, des fantômes de morts tragiquement disparus qui réapparaissent .
Le roman se termine par un huitième chapitre, véritable ouverture sur Brilka, jeune fille vivant à Tbilissi en 2007 qui est une page vide .
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Ce roman fait son poids.
Eh oui, plus de 900 pages quand même !
Cela pourrait en effrayer plus d'un mais il suffit de trouver le bon moment pour l'entamer et entrer dans cette grande saga familiale.
Tous les ingrédients sont réunis pour en faire une fresque addictive et solidement construite.
Nous suivons huit vies, huit femmes, huit âmes à travers tout le XXème siècle, au départ de la Georgie (pays d'origine de l'auteure).
Et l'histoire se mêle à l'Histoire, celle des heures sombres.
Drames, passions, violences parsèment les huit vies que l'auteure nous raconte avec talent, dans un livre à la fois documenté et profondément humain.
Alors malgré ces 900 et quelques pages, peu de risque que vous vous ennuyiez à sa lecture !
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Fresque historique grandiose !

Je reste sans voix face à cette épopée si bien ficelée.

La narration nous entraîne à travers les époques et les évènements qui bouleversent la Géorgie et surtout les vies des personnages.

Le fil rouge du roman est impressionnant car l'autrice nous ramène toujours là où elle veut.

Il y a évidemment des personnages auxquels je me suis attachée tout au long des 1180 pages. J ai traversé leur vie. Des vies ordinaires avec des incidents malheureux ou étincelants.

Difficile de résumer un tel livre !

Si certaines époques, protagonistes m ont plus intéressés que d autres, je ne me suis ennuyée à aucun moment. J ai été portée par ces petites histoires qui font la grande.

Une brique digeste à ne pas manquer !
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