Oblivictus fait partie de mes achats de la Foire du Livre de Bruxelles 2019. Ne connaissant pas l'éditeur, je me suis approchée de leur petit stand. Mon regard s'est porté sur ce bouquin en raison de son titre accrocheur et de sa couverture soignée qui sent bon la science-fiction.
Juillet 2038. Mila attend patiemment à l'extérieur du laboratoire de ses parents pour aller manger avec eux. Ils travaillent dans le domaine de la mémoire. Un sujet qui passionne également leur fille. Soudain, une série d'explosions souffle le bâtiment. Mila se réveille allongée sur un lit d'hôpital où des urgentistes s'affairent autour d'elle. En état post-traumatique, elle se débat et reçoit un tranquillisant. En attendant que celui-ci fasse effet, elle est laissée sous la surveillance d'un infirmier, Rafael Alcaroz, qui profite du moment pour lui faire une injection dans le cou. Elle devient la patiente 34.
Mila se réveille du coma le mois suivant. Son frère Noa, un as de l'informatique, est à son chevet complètement paniqué par son état et rassuré qu'elle se réveille enfin. Suite au choc de la mort de leur parent, une partie de leur mémoire a disparu. La fratrie va devoir se serrer les coudes pour retrouver l'histoire manquante. La mémoire effacée.
Ce roman d'anticipation explore une réalité basée sur les attaques terroristes réelles de novembre 2015 puis fictives de 2019, et du protectionnisme qui en découle. le territoire est découpé en communautés soit disant pour raviver la solidarité. La peur de l'intrus reste pourtant forte. Pour passer de l'une à l'autre, des camps d'intégration sont organisés. Une certaine communication via le sport existe tout de même bien qu'elle suscite plus la rivalité que la cohésion. Mila et Noa sont des citoyens de Mirenvella dans l'arrondissement de Bellevue. Après l'attentat à la bombe, ils vont être transférés dans celui de Bonne Aventure.
La première partie de l'intrigue est captivante. Dès le début du prologue, j'ai été happée. Il commence sur une touche un peu philosophique et contemplative, et enchaine sur la description du personnage principal et de l'univers dans lequel il évolue. L'enchantement dans lequel j'étais plongée, s'est rompu dans la seconde partie du livre lorsque l'histoire tourne plus à la romance qu'au combat.
Rafael est le genre soft du bad boy. Il est asocial, antipathique, hautain et peu aimable. Il préfère éviter le contact et la communication mais il prend soin de ses patients. Comme dans beaucoup de romance de ce type, il a un triste passé qui permet d'excuser son comportement odieux auprès de Mila. Celle-ci tombe amoureuse de lui parce qu'il existe un loi universelle disant que deux âmes sont faites l'une pour l'autre et que même si l'autre agit de manière horrible avec elle et lui fait dire qu'elle le déteste, elle ne peut défaire le lien qui les unit. Bref, vous l'aurez compris. Je ne suis pas une adepte du coup de foudre au premier regard juste parce que le mec à une belle nuque et une tablette de chocolat, alors qu'il se comporte comme un enfoiré même après l'évolution de leur relation de couple. Étant une humaine paradoxale ce type de romance peut m'émouvoir. Certains livres ont déjà réussi cet exploit car je peux comprendre que tout le monde n'est pas un génie des relations sociales et que l'on peut agir de façon maladroite.
Oblivictus n'entre pas dans le camp des vainqueurs.
L'intrigue en elle-même est bien développée et plutôt cohérente. Toutefois, en étant attentif il est possible de comprendre les événements, les retournements de situation et les identités des personnages avant qu'ils soient exposés. Contrairement à ce que j'avais compris suite au résumé et à la dédicace de l'autrice, l'histoire ne se compose pas comme une réelle enquête avec des indices dissimulés et une résolution finale. Il s'agit plus d'une suite de révélations qui permet de comprendre pas à pas ce qui s'est passé. Certaines actions m'ont semblé improbables pour une personne blessée. Pour ne pas trop en dire, j'exemplifierai seulement par le passage où Rafael laisse Mila porter un sac à dos sur le ventre alors que son abdomen est suturé. Je doute qu'une personne ayant un bon sens médical comme lui la laisserait faire.
Les personnalités de Mila et de Rafael ont été bien travaillés par l'autrice dans l'ensemble. Néanmoins, la réaction de notre amnésique suite à son sentiment de trahison vis-à-vis de son frère, et à la fin, est trop irréelle et rapide. Vu sa situation et sa condition, elle accepte trop facilement les explications à mon goût.
Enfin, le style de
Sylvine Ploix-Hugé est agréable et fluide. Son roman est parsemé de termes et d'explications sur le sujet de la mémoire. Les pathologies sont facilement compréhensibles et ce fut un plaisir d'en découvrir plus sur cette matière. Certains passages furtifs possèdent un côté moralisateur. En plus de l'individualisme et la peur de l'autre, elle met en avant la dépendance à la technologie, l'impatience des gens qui ne savent plus attendre ni prendre le temps d'apprécier ce qui les entoure comme si on avait peur de s'ennuyer.
En bref, l'histoire d'
Oblivictus est intéressante pour le côté scientifique sur lesquels il est basé et pour les idées probables et réalistes de l'univers. C'est juste dommage qu'elle change de trajectoire en cours de route et se transforme en romance sur fond de science-fiction.
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