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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Vers le soir de sa vie, dans une nuit qui s'étend autour du foyer, après la tempête et des souffrances qu'on devine très profondes, une femme raconte.

Les récits de ce livre s'étirent sur un siècle, depuis 1830, dans l'Amérique mythique des premiers colons, avec l'isolement d'un couple et de leur enfant dans une nature belle et dangereuse, que l'homme cherche à façonner avec des moyens dérisoires, et où il est confronté à la douleur, à la perte, et cette ouverture sonne comme un avertissement envers ce qui va suivre.

Puis on lit (et autant que l'on lit, il semble que l'on écoute) ce qui est, peut-être, l'histoire de cette femme, Ginny, partie à quatorze ans, et de son plein gré, vers 1850, pour épouser et vivre avec Linus Lancaster et deux filles, Zinnia et Cleome, dans une propriété au bout du pont de pierre au coeur du Kentucky, une terre promise qui en réalité s'avéra être un enfer, un lieu de violence et de meurtre.
Amoureuse des livres, des chants et des histoires, Ginny, petite fille avait écrit l'histoire d'une princesse qui réussissait à devenir la reine des nuages. Transformant tout en boue, Linus, son mari, a vite brûlé ses livres, les seules histoires pour lui sont celles de la Bible, tandis qu'il garde toujours son fouet à portée de la main.

"Ombre.
C'est là que j'ai été, et que je suis, là que je poursuis mon triste chemin. Donc, si en évoquant aujourd'hui mes tous premiers jours passés dans cet endroit du Kentucky auprès de mon mari Linus Lancaster je déclare voir briller sur nous tous la lumière d'un lieu charmant et indemne de toute blessure, vous saurez, et je peux dire qu'il ne s'agit que du stratagème conçu par un esprit désireux de changer ce qui fut mais qui s'en trouve incapable."

Il y eut enfin l'errance jusqu'en Indiana où, depuis quarante ans, marquée par les stigmates de sa vie antérieure malgré son changement de nom, cette femme fait des ménages chez Lucious Wilson, un homme dont la bonté est arrivée trop tard pour l'atteindre dans cette vie-là.

"Lucious Wilson vint se tenir dans l'embrasure et resta longtemps à m'observer. Il alluma sa pipe, en tira une bouffée ou deux, et la fumée pénétra dans la pièce.
Si j'avais pu me rassembler pour me changer en fumée à cet instant même, je l'aurais fait. Unissant ma fumée à la sienne, en suspension dans les airs, je serai sortie par la fenêtre pour me coller contre les planchers que Lucious Wilson arpentait, contre les murs sur lesquels il appuyait ses mains."

On peut lire aussi le récit de Prosper, revenant en 1930 au bout du monde dans ce coin de Kentucky, sur les traces de sa mère, enterrée dans ce qui fut un morceau d'enfer dans la petite maison au bout d'un pont de pierre.

"Les Bonnes Gens" est un grand livre, terrifiant et bouleversant, sur la contagion et l'impossibilité d'échapper au mal, et dont le thème du Mal, la densité noire des personnages et les blancs du récit évoquent Roberto Bolaño.

"J'ai vu ces flammes de bougie brûler dans ses yeux. C'est comme ca qu'il trouvait son chemin dans le noir. Tu crois que dans le Nord aussi, il y en a qui voient dans le noir ? Qui arrivent vers toi dans le noir avec leurs grosses bottes ?"
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C'est un petit coin, enfin, quatre coins de Paradis au-dessus desquels les vautours volent en cercles paresseux, dans lequel on peut voir des histoires défuntes s'enrouler autour d'un chêne jusqu'à en rougir l'écorce, des pâquerettes cousues de fil violet se noyer dans une ombre de plus en plus profonde, un reste de femme porter un chapeau en chutes de cochon.
Entre deux coups de fouet on y entend chuchoter quelques démons, gémir les fantômes prisonniers de toiles d'araignée, et dans un puits l'écho d'un ange tombé.

C'est un endroit comme dans un conte cruel, où la fiction dépasse la réalité. Où les vérités sortent des bouches apparues sur le corps d'Alcofibras revenu. Où une truie menace Ginny de la frire à la poêle, où l'on voudrait transformer les femmes en pierre pour les mettre à l'abri dans une poche, comme un morceau d'écorce noire.

Avant, Ginny avait un château au-dessus des nuages, dans lequel elle lisait et dansait tant qu'elle pouvait.
Arrivée au Paradis, elle croqua la brise à pleines dents, tressa des couronnes de pâquerettes avec Cleome et Zinnia, comme si elles n'étaient pas noires, comme si elle n'était pas blanche.
Mais l'illusion ne tint pas bien longtemps.
Quand Linus, son mari, se mit après elle, elles lui apprirent à voyager sans bouger. Vers un endroit où elle pouvait danser. Un endroit où elles-même échappaient à la puanteur, à la morsure des rats, du fouet. le ventre de son épouse ne donnant pas sa part au Seigneur, Linus la jeta hors du lit et partit de l'autre côté du couloir. Crâne vide éclairé par deux flammes diaboliques, il se mit en devoir d'illuminer chaque soir les deux ténèbres. Ginny, devenue leur mère à tous, vit rouge, blanchit de rage et se mit à broyer du noir. Au propre comme au défiguré.

Le ciel bleu et les nuages ont tout vu, ont vu ce qui n'aurait jamais dû être autorisé à se produire. Témoins qui n'ont fait que regarder, encore et encore.

Jusqu'à ce qu'une fleur de métal plantée dans la nuque du tyran éclose, et distille le parfum enivrant du « juste » retour des choses. du Mal doublement incarné. La blancheur qu'on croyait éternelle tomba dans le jardin des supplices cultivé par son défunt mari. Goûta à l'humidité, la puanteur et la morsure des rats comme autant de desserts bien mérités.

Ginny/Scary Sue, surtout, et Zinnia racontent, l'une écorchant encore et encore la cicatrice ceignant sa cheville, l'autre ramassant au fur et à mesure les cailloux tombés du passé, racontent des vies en Noir, en Blanc, évoquent le souvenir d'une vie en rose à jamais souillée, comme un porc condamné à rouler éternellement dans la boue.

Lien : http://www.listesratures.fr/..
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Roman puissant et épou....touflant!
L'auteur fait preuve d'un grand talent d'écriture: très concis, rien de superflu et pourtant toutes les émotions sont bien présentes.
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