Citations sur Les Filles de Hallows Farm (41)
Une rencontre peut ressembler à une noyade. Dans les instants qui la précèdent, on peut revoir toute une vie en un éclair.
Ratty avait observé quelques instants leurs jeunes et frais visages, pleins de l'espèce d'émerveillement qui ne s'émousse jamais devant les flammes, et un million de regrets non formulés s'étaient accumulés mystérieusement dans sa poitrine tandis que les martinets se rassemblaient dans le ciel. Que regrettait-il ? Ratty n'avait pas voulu s'interroger trop avant : cela avait quelque chose à voir avec les occasions manquées, les amours avortées, la jeunesse gaspillée.
Manifestement, elle se prenait pour une star de cinéma : il rirait bien en la voyant décrotter la croupe d'une vache! Cette idée le fit sourire. La seconde le frappa comme étant plus collé-monté, plus maîtresse d'école. De courtes boucles brunes, une peau pâle et rien sur les lèvres. Quel trio, pensa t-il. Avec elles dans la maison... cela dit, il leur donnait une chance.
Agatha vit Prue s'avancer sur la poutre de la grange, les bras raides et tendus, maladroite mais déterminée et courageuse.
Si elle ne recevait aucune réponse - eh bien, au moins, elle saurait où elle en était, et abandonnerait les tortures de l'espoir. Il devait être plus facile d'accepter le rien, songea-t-elle, que de jouer avec les infinis possibles du quelque chose.
Elle se souvint du conseil de sa mère : quand les choses vont mal : souviens-toi de Winston Churchill. Essaie de te rappeler ce qu'il dit
Je n'y crois toujours pas. Je vous assure, c'était un rêve. Je sais que c'est vrai seulement parce que j'ai taché mes gants avec du chocolat. Je ne les laverai jamais,. Jamais, jamais. Pour le reste de mes jours, le chocolat royal restera sur mes gants blancs, comme preuve que c'est bien arrivé, comme preuve que moi, Prue, je suis allée un jour au Palais...
... d'après sa brève expérience, la plupart de ses "amours" avaient été des inventions de son imagination optimiste. Ses sentiments, si avide de s'adresser à quelqu'un, s'étaient souvent - par manque de choix - adressés à la mauvaise personne. Elle attribuait à l'objet de son amour les qualités qu'exigeaient si clairement son esprit. Derrière l'image ainsi créée, la vérité, quand elle éclatait, causait bien des dépressions dans son cœur.
Je suis si désespérément romantique que la seule idée de l’amour me suffit presque, bien que je sache, au fond de mon cœur, que l’essentiel n’est que chimère et que je serai déçue. Je le suis presque toujours. Et cette fois avec Philippe, je crois que c’est différent.
-Je croiserai les doigts, dit Prue. Moi je ne marche pas dans tout ces romans fleur bleue. Surtout pas quand il y a une guerre, pas de temps à perdre,. Se déshabiller aussi vite que possible, voilà ma devise, avant que ces pauvres diables ne soient tués. Un peu de plaisir rapide, puis au suivant. À la fin de la guerre, quand nous serons tous un peu plus vieux et plus sage, il sera temps de chercher un mari. C’est là qu’un millionnaire sans méfiance sera le bienvenu. En attendant, je prends mon plaisir là où je le trouve.
Des années auparavant, sans s’extraire de sa somnolence, elle lui aurait réclamer un baiser. Il se serait exécuté et en aurait été remercié d’un sourire en sommeiller. À proprement parler, et tu dis tu n’avais pas souri depuis des années. Pas de bonheur. La seule chose qui faisait briller ses yeux, c’était le triomphe. Triompher de ses voisins, ses clients. Triompher de n’importe qui, et de Ratty lui-même. Il se demandait ce qui avait si vite transformer une jeune fille insouciante en une vieille femme revêche. Rien que Ratty pût clairement identifié, il faisait ce qu’il pouvait pour la satisfaire. Mais il avait appris que le mariage était une drôle d’affaire. À l’époque ‑jeune homme tout fou- il ne savait pas dans quoi il se lancer. Et il n’avait jamais envisagé d’abandonner sa stérile embarcation. Il avait fait des promesses au Seigneur et il ne Les romprait pas.