Une contrée rude dans laquelle, depuis des décennies, se côtoient bourreaux et victimes.
Konrad est un inspecteur à la retraite qui n'a pas réellement raccroché. Erna, sa femme, a succombé à un cancer ; il n'a plus que ses yeux pour la pleurer d'autant qu'il n'a pas été un mari tendre et exemplaire.
Il lui resterait bien Hugo, son fils, médecin hospitalier, mais leurs relations ne sont pas au beau fixe non plus. le père de Konrad a lui été assassiné devant les abattoirs de la rue Skulagata, sans que Konrad n'ai pu savoir pour quel motif. Cette quête de la réponse remplie, embrume son cerveau, sa vie.
A ceci se rajoute d'autres affaires : le cadavre d'un homme d'affaire retrouvé dans les glaciers, la noyade d'une jeune fille dans un étang, un mort dans une cave, sans compter cette dame âgée qui rapporte au commissariat un pistolet de son défunt mari et que l'on retrouve être impliqué dans un assassinat non élucidé en 1955. Bref, tout pour créer un bon polar aux multiples rebondissements.
Les intrigues sont denses, flippantes. Certains des échanges et des dialogues amènent une touche presque asphyxiante. le comportement bourru, pour ne pas dire glaçant de Konrad, n'arrange rien. Il ne sait pas être sympa. le passé de ce père violent semble une des explications quant au comportement délétère qu'il a, que ce soit avec ses ex collègues ou avec ses proches.
Quelques thèmes forts jalonnent le polar : la pédophilie face à de jeunes garçons placés en institution, divers trafics, une homosexualité particulièrement malmenée, la mort. J'allais oublier, il y a aussi ce médium qui n'arrange pas le flou de l'atmosphère souhaité par l'auteur, le presque surréalisme qui transparait par moments ainsi que ces paysages rudes et cette météo glaçante. L'atmosphère est sombre, très sombre presque douloureuse. On a mal pour les personnages comme pour Konrad. Ses obsessions, ses tortures internes sont telles qu'on en arrive à l'excuser d'être aussi rugueux.
Un pan historique dont je n'avais pas conscience est abordé par
Arnaldur Indridason : celui de l'envahissement des anglais, puis des américains lors de la Seconde Guerre mondiale. Les motivations étaient défendables, empêcher qu'Hitler et les nazis ne prennent le contrôle de l'Atlantique Nord. Leur départ effectif n'a eu lieu qu'en 2006. L'auteur profite de ce polar pour rappeler à quel point cette fichue guerre et la situation stratégique particulière de l'Islande ont induit des sentiments et des situations non négligeables.
Je me suis fourvoyée dans un certain nombre de fausses pistes, perdue dans les flash-back et les fantômes d'antan qui revenaient pendant l'enquête : bien joué Monsieur
Indridason ! Votre commissaire ne lâche rien, obstinément il s'acharne à avancer, piétinant un peu tout le monde sur son passage. Peut-être a-t-il peur de s'arrêter, de réfléchir à sa vie, de repenser à ses morts ? En tout cas ça y ressemble fortement. Ce qui est sûr, c'est que l'immobilité n'est pas son truc et, à la fin, il est gagnant.