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sur 201 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
LES INVISIBLES de Roy Jacobsen

Ce livre norvégien est un enchantement avec des personnages à la fois forts et bouleversants ainsi qu'une jolie écriture qui me rappelle celle de Jon Kalman Stefansson, un écrivain d'origine islandaise, dont j'adore les livres.

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Les "invisibles" sont sans doute les destins de chacun mais sont ici ceux des hommes et des femmes vivant sur des îles dans le nord de la Norvège, au début du 20ème siècle, si petites bandes de terre qu'elles portent le nom de la seule famille dont le hasard a en ce lieu décliné les générations.

"Sur une île, tout ce qui a de la valeur vient d'ailleurs, sauf la terre, mais ce n'est pas pour elle qu'ils sont là" et "nul ne peut quitter une île"...ce sentiment à la fois de fatalité insulaire et de liberté face au continent sont les clés de voûte d'une histoire familiale suivie dans les yeux d'Ingrid, de son enfance auprès de son père Hans à sa découverte étrange du sentiment maternel.

Les mains écorchées par le sel, le froid et le travail autour des duvets, de la pêche, du salage des poissons ne s'arrêtent pas, pour s'en nourrir et pour "l'argent, l'amarre la plus déprimante qui les relie à la terre ferme." Et on suit ainsi la ténacité dans la tempête, la succession des saisons qui n'ont d'autre finalité que de varier les tâches dont il faut s'acquitter.

Et devant cette vie uniquement rythmée par la nature et la mer, les enfants grandissent, les adultes rêvent, les vieux regrettent...

Ces pages imprégnées de cette nostalgie que l'on peut ressentir devant les vagues inéluctablement infinies nous bercent comme une marée et révèlent les reflets de l'âme en évoquant les teintes différentes de l'eau dont les pages et les mots mêmes finissent par prendre les couleurs.
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Bienvenue à Barroy, en Norvège, à la veille de la première guerre mondiale. Cette minuscule île de l'archipel des Lofoten abrite une famille qui vit son lot de bonheurs et de malheurs. Les années se suivent et se ressemblent, ou pas. Les habitants n'échappent pas aux progrès sociaux et techniques. Les conflits, les difficultés financières, la mort et la naissance ponctuent leurs vies. Rythmés par les saisons et les caprices de la nature, les invisibles se débrouillent comme ils peuvent, loin des vicissitudes de la grande histoire.
Si la trame du récit est empreinte de simplicité, il ne manque pas d'originalité pour autant. L'écriture de l'auteur, directe, impose une certaine distance avec les personnages. On ne s'embarrasse pas de grands sentiments, le fatalisme s'impose. Et malgré cela, on ressent beaucoup d'empathie pour ces femmes et ces hommes, ballotés par la nature. L'amour qui les lie, la solidarité et la fidélité à leur terre nous marquent. Je conseille ce roman pour ce mélange étonnant de sobriété et d'intensité et pour le dépaysement total qu'il nous offre.
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Ils sont une petite famille et ils vivent sur une île, Barrøy quelque part près des iles Lofoten. Ce sont des îliens et le nom de l'île est aussi leur nom de famille.

Il y a Martin, le grand-père, Hans son fils, Maria sa femme, Barbro, la soeur de Hans, et surtout Ingrid. Ingrid qui est petite au moment où démarrer l'histoire, mais qui va devenir l'une des personnes les plus importantes que ce territoire.

La vie y est âpre, belle et rude tout à la fois. On vit à moitié des travaux des champs (un peu d'élevage, et quelques pommes de terre en potager) et de la mer (de la pêche, soit en rejoignant les grandes campagnes de pèche dans les Iles Lofoten, soit en pêchant tout autour de l'île du lieu, du flétan, ou en confectionnant du guano).
Et à ma grande surprise le récit est tout à fait passionnant.

A la mort de Martin, c'est Hans qui devient pleinement le chef de famille. C'était déjà un peu le cas depuis qu'il vieillissait et qu'il n'était plus en mesure de réaliser tous les travaux nécessaires. C'est lui qui tente de placer sa soeur Barbro chez d'autres familles en tant que domestique – mais cela ne prend pas et Barbro restera sur Barrøy.

Hans va décider des travaux, même si l'argent manque toujours et qu'il faut s'échiner après chaque période de pêche dans des travaux de bête de somme. Barbro l'aide, parce que même si c'est une femme, elle est dure à la tâche elle aussi. Mais Hans et Barbro n'arriveront pas tous seuls à réaliser un ponton d'accotement : ils font venir quelques ouvriers suédois pendant quelques semaines pour les aider. Ils repartiront rapidement, laissant cependant une surprise dans le ventre de Barbro qui accouchera quelques temps plus tard d'un garçon qu'on baptisera Lars …

On n'est pas épargné par la vie sur une île pareille. Une naissance, plusieurs morts, et ce sont encore des enfants – Ingrid, Lars – qui vont devoir bientôt prendre des décisions comme des adultes.
Qu'est-ce qui fait qu'un récit est si passionnant ? Son écriture, sans aucun doute.

Sans jamais nous infliger aucun pathos (à l'image de cette grande dispute en Ingrid et Lars à coups de tisonnier, mais sur laquelle l'auteur ne s'appesantira pas du tout, Roy Jacobsen nous décrit leur quotidien, fait de peines (beaucoup) de quelques joies au milieu de beaucoup de rudesse, à l'image de ces images qu'il décrit si bien aux quatre saisons. Mais avec une affection partagée entre eux pour faire fasse à l'adversité. Il y est question du rire aussi, le rire d'Ingrid que son père aime tant, et qu'elle va perdre lorsqu'elle partira à l'école comme les autres îliens.

Le personnage d'Ingrid est flamboyant, magnifique. Elle est intelligente, délicate, et très courageuse. Et du courage, elle va en avoir besoin pour affronter ce que lui réserve le destin.

Personnellement je l'ai lu d'une traite, avec l'envie irrésistible de connaître la suite (Roy Jacobsen a écrit également « Mer blanche » et « Les yeux du Rigel » où l'on continue de suivre la destinée de la belle Ingrid.

Avec ces « Invisibles », on pense à son voisin islandais Jon Kalman Stefansson « Entre ciel et terre », « A la mesure de l'univers » ou bien « le coeur de l'homme » pour la force du récit, ou à son compatriote Per Peterson (« Pas facile de voler les chevaux) pour les paysages et la présence de ces personnages dans des territoires si différents des nôtres.

Une histoire passionnante que celle de ces « invisibles » qui au fil de la lecture nous deviennent de plus en plus « essentiels ». Beaucoup de pudeur et de profondeur pour décrire le quotidien de quelques personnages qu'on a l'impression d'avoir vraiment rencontrés.

Une grande réussite.
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De sa plume cristalline, l'auteur emprunte la voie de la limpidité pour faire de ces "invisibles" des êtres inoubliables. Les petites choses sont ici mises en exergue pour illuminer le quotidien. Simples en apparence, ces existences n 'ont rien de minuscule. Même sans distractions, elles se vivent de façon intense et belle et laissent du champ aux voix intérieures qui nous appellent et nous ensoleillent.
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Famille tolérante et aimante d'Îliens Norvégiens qui mènent une existence en partie autarcique. le propos et silencieux et la plume ciselée au rythme des sentiments et de la houle. Mais il ne s'agit en aucun cas d'un tableau de petit bourgeois tournant sur lui-même et naturalisant les marins-paysans, non pas du tout. La vie est âpre sur l'île, mais elle n'est pas violente au regard de cette famille qui s'élargit sans considération puritaine. Les membres de la famille s'aiment et prennent soin les uns des autres mais sans romantisme, ils aiment aussi leur île. Ce roman est très émouvant, il m'est difficile d'en parler sans avoir le sentiment de le dénaturer, sa lecture est une expérience intime que chacun doit vivre
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C'est à propos de « Mer Blanche » chez Jérôme que j'ai eu très envie de découvrir Roy Jacobsen. Merci à lui et à toutes celle et ceux qui ont dit tant de bien de ce roman qui m'a permis de découvrir la Norvège du début du XX° siècle. J'ai été un peu étonnée que ce roman plaise tant à Jérôme que j'imagine plus tenté par des lectures du monde urbain dur et violent. Mais je suppose que ce qui lui a plu, comme à tout ceux qui aiment et aimeront ce roman, c'est son écriture sans aucun pathos pour décrire un monde d'une dureté incroyable. La nature d'abord aussi grandiose que cruelle, elle ne laisse aucun répit aux habitants d'une petite île du nord de la Norvège au sud des îles Lofoten. Les tempêtes détruiront plusieurs fois le hangar que la famille essaie de dresser pour faire sécher le poisson. Les hivers si longs que bêtes et hommes risquent de mourir de faim puisque la principale ressource est constituée par le poisson qu'il faut aller pêcher loin plus au nord quand le climat le permet. Sur l'île voisine, plus grande et plus riche une usine achète le poisson pour le transformer. Et sur cette île aussi vit un pasteur au coeur sec, en tout cas trop sec pour prendre en charge deux petits qui viennent de perdre leur père, le directeur d'usine et dont leur mère sombre dans la folie. C'est donc l'héroïne de ce roman, Ingrid qui les prendra en charge et les ramènera sur sa petite île Barroy. Pourtant elle aussi doit faire face à la mort de son père et la grave dépression de sa mère. Tragédies successives mais racontées avec une telle pudeur que le lecteur souffre en silence et respect pour le courage de ses enfants que les difficultés forcent à devenir adultes si vite. On suit avec angoisse les efforts de son frère Lars pour améliorer le quotidien d'une petite famille qui est souvent plus proche de l'anéantissement que de la survie.

Un grand moment de lecture et qui en dit long sur la dureté des temps anciens en Norvège.
Lien : http://luocine.fr/?p=10881
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Traduit par Alain Gnaedig

En attendant les nouveautés de janvier, je pioche dans ma bibliothèque. Il y trônait ce roman norvégien, Les invisibles, depuis plusieurs mois, d'un auteur que je ne connaissais pas.
Un petit voyage au large des Lofoten, dans des îles minuscules me tentait bougrement ! Me voilà donc partie sur l'île de Barrøy, du nom de la famille qui en est propriétaire. le chef de clan est Hans, qui vit là avec son père, le vieux Martin, sa femme Maria et ses filles Ingrid et Barbro. Un caillou aride d'un kilomètre à peine, où l'on cultive un carré de pommes de terre, on fait du foin quand c'est possible, on ramasse la tourbe, on trait quelques vaches mais on vit surtout de la pêche, celle que l'on ramène et que l'on vend ou bien celle de l'Usine, qui nous fait vivre.

La vie et le décor semblent immuables, entre blizzard, tempête, et ...canicule ! Pas de date, quelques allusions vagues. La nature dicte sa loi et les hommes font avec. Sur Barrøy, on disparaît et réapparaît - parfois. On devient père et mère sans avoir eu d'enfants, on devient adulte alors qu'on n'est qu'un enfant. On oublie d'aller à l'école. Et puis on y retourne. On construit des rafiots et des pontons. On s'engueule, on se bat et on se réconcilie. On est hors du grand tumulte du monde, on est invisible.

Cependant, le lecteur observe, subjugué la vie de ce microcosme à la beauté magnétique du froid. On est une famille indéfectiblement liée, avec ses secrets à peine esquissés sur la page d'encre. On a parfois voulu partir mais Barrøy en a décidé autrement.

Roy Jacobsen peint avec une minutie incroyable la vie de ses personnages confronté à Dame Nature, elle aussi un personnage à part entière. J'ai eu du mal à m'immerger dans le roman pendant une trentaine de pages (peut-être parce que les conditions n'étaient pas réunies). Il faut dire que l'écrivain est assez avare en virgules, et préfère la description et le discours rapporté au dialogue au style direct (ce qui au demeurant ne me pose aucun problème). Puis j'ai plongé et j'ai dévoré les pages pour suivre cette saga familiale au confin du monde. J'ai même retardé la fin parce que justement je ne voulais pas quitter ces gens ! 299 pages, c'est bien court !

Quelques petites remarques : j'aurais bien voulu en savoir plus sur le père de Lars, le fils "illégitime" de Barbro, lui même demi-frère de Felix, fils adoptif d'Ingrid. Pourquoi les femmes disparaissent avant de réapparaître ou deviennent folles ? C'est passé sous silence par Roy Jacobsen mais il s'amuse un peu avec elles. Quant aux hommes, ils meurent de leur belle mort ou carrément bêtement.

J'ai eu des soucis avec la traduction, parfois : ça m'a fait sourire de trouver des pies huîtrières. Je ne connais que l'huitrier pie, c'est-à-dire l'huitrier avec un plumage de deux couleurs dont du blanc. Seuls les connaisseurs de l'échassier (qui ne mange pas d'huître !) trouveront étrange de le voir rebaptisé.  Quant à "ce bref moment où l'île est le plus grande, où l'on peut marcher sur du sable blanc" = ???? coquille !....  ; ou "la mer (...) noire et lisse comme de la colle sous un ciel sans étoiles"... j'ai beau eu lire et relire, je n'arrive pas à imaginer ce que c'est de la colle sous un ciel sans étoiles ! Il manque une virgule, non ? - même si j'ai bien compris que c'est la mer dont il est question, mais balancé comme ça, ce n'est pas clair !  Peu de virgules chez Roy Jacobsen, c'est vrai... Bref, j'ai fini par trouver qu'il manquait un travail de correcteur dans ce texte (ce qui relève de l'éditeur). Cela dit, ça n'a pas gâché mon plaisir, mais un peu agacée à la longue. J'ai lu le livre en version poche chez Folio, composition du 4 février 2019 n°d'imprimeur  234335. Edité chez Gallimard pour le grand format.

Malgré ces remarques qui ne feront pas plaisir à tout le monde, Les invisibles est un  magnifique roman pour ceux qui aiment l'air froid et iodé, les tempêtes, les coins sauvages, et les sagas familiales. La bonne nouvelle est  qu'il y a une suite, Mer blanche !

Les Invisibles, mon coup de coeur nordique de fin d'année.
Lien : http://milleetunelecturesdem..
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Un style simple avec des phrases courtes et percutantes. Roy Jacobsen a le don de nous mettre dans l'ambiance ... On a vraiment l'impression d'être aussi sur cette île et de partager la vie de la famille qui y habite. C'est plein de poésie, de sentiments humains, de solidarité familiale et ce malgré la dureté de la vie quotidienne.
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Une île .... les tempêtes sur une île lui donnent ses couleurs .... en septembre, l'île est un arc en ciel avec les feuilles qui virent du jaune, au marron et au rouge ... puis elle devient un animal loqueteux à fourrure marron ... puis un cadavre aux cheveux blancs, la pluie, les rafales, la grêle, la neige ... cette île n'est pas autre chose qu'un simple grain de sable ... cette île est la longue école de la solitude.
En Norvège, Il m'apparaît toutefois qu'une petite île ne se différencie pas tant que ça d'une ferme coincée entre la mer et la montagne sans autre moyen de communication avec le monde que le bateau quand il peut prendre la mer !

Apprendre à bien construire une tour de tourbe est une chose indispensable pour survivre l'hiver quand sortir, récupérer de quoi se chauffer est une épreuve.
Les coutumes des uns ne sont pas forcément celles des autres .... un grand père meurt .... l'ensemble de ses affaires ... ses draps, ses couvertures, sa chaise, ses habits sont brûlés devant toute la famille.
Vivre dans l'isolement, la solitude, la promiscuité quand on est une petite fille comme une autre, une petite fille qui n'a jamais connu autre chose que cette solitude face à la mer, face aux éléments.
Apprendre à se contenter de peu, de ce qu'on a, de ce qu'on a pêché, de ce qu'on fait pousser.
Apprendre vite, très vite à tout faire car le temps est assassin dans ces coins là et si on veut survivre, il faut savoir faire, il faut savoir s'adapter et si on sait pas il faut inventer sans se tromper.

Une écriture à la gloire des Invisibles, qui nous donne l'impression de les voir là, sous nos yeux. Nous sommes prêts à les aider, à leur porter secours et prendre notre part de leur douloureux destin pour les soulager et leur monter comme on les aime.
Mer blanche, la suite ... nous permettra prochainement de retrouver les personnages des Invisibles ... dans ce livre, l'histoire, notre histoire fait irruption à Barrøy, dans ce lieu que l'on croyait en dehors du temps.
Merci Roy de nous permettre ses retrouvailles ... cela aide à refermer ce très beau livre, les Invisibles, pour qu'ils restent dans nos coeurs.
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