° ° ° Un grand merci à Babelio et aux éditions Casterman pour m'avoir permis de découvrir ce livre en avant-première. Il s'agit ici d'une critique des épreuves non-corrigées, pas de l'ouvrage final.
Pour la chronique détaillée du roman qui analyse les références à la culture chinoise, rendez-vous sur mon blog (attention spoiler !). ° ° °
Dilah est un petit renard polaire qui vit seul avec ses parents, entouré de leur amour exclusif, loin de toute autre présence. Chaque soir, le jeune renardeau s'endort, bercé par la voix de sa mère qui lui conte les légendes millénaires des animaux. Mais Dilah a un secret : il rêve de vivre parmi les humains, ces créatures fascinantes, et de partager leur vie si passionnante, car « les hommes sont les maîtres de l'univers. Ils n'ont peur de rien. » Or une nuit fatidique, il retrouve sa mère mourante, blessée par le fusil d'un chasseur. Son père lui non plus ne reviendra pas. Dans un soupir, elle lui confit un précieux souvenir : un objet mystérieux pouvant le conduire au trésor d'Ulla. Une Pierre de Lune capable de le changer en humain. Armé de son courage et de sa détermination, Dilah entame une longue quête semée d'embûches, poursuivit par les féroces renards bleus.
La saga de Dilah, fut inspirée par une « expérience merveilleuse » vécue par son auteur, à l'âge de cinq ans : « Je me rappelle m'être réveillé, une nuit de pleine lune, et avoir aperçu une forme blanche devant la fenêtre de ma chambre. La silhouette était humaine, avec des oreilles pointues de renard, et elle émettait un rayonnement argenté. » Cette vision spectrale qui évoque les femmes-renardes de la mythologie chinoise a marqué l'enfance de
Chen Jiatong. Après s'être beaucoup interrogé sur l'origine d'une telle apparition – visite d'un esprit ? émanation d'une vie antérieure ? – cette rencontre onirique lui a donné l'impulsion de créer une histoire fantastique sur un petit renard rêvant de devenir humain.
Les éditions Casterman ont fait le choix de retranscrire la version anglaise, elle-même traduite du texte original chinois par Jennifer Feeley. On lui doit des expressions originales comme l'animalien classique (classical animalese). Certains noms ont aussi dû être transposés dans une phonétique occidentale comme la ville fictive de Labuer 拉布尔 devenue Lapula ; ou des prénoms comme Jens (金斯 Jinsi) ou Ulla (乌拉 Wula). La traductrice française Nathalie Serval s'est elle aussi confrontée aux difficultés des jeux de mots et s'est appuyée sur la version anglaise pour nommer le phoque Colbert dit joyeux Coco, qui en version originale se nomme Daniel (丹尼尔 Danni'er) et dont l'une des syllabes est l'homonyme de ‘oeuf' (蛋 Dan), rebaptisé Egbert (Egg ‘oeuf') par Jennifer Feeley. Ce roman pour enfants à la particularité d'être une traduction dérivée du chinois, une langue complexe et d'une grande ambiguïté. Les maisons d'éditions semblent avoir fait le choix de simplifier l'écriture originale afin de la rendre plus accessible pour le jeune public occidental. Il semble donc que des modifications du livre ait été réalisées en accord avec l'auteur.
La Quête du Renard Blanc est un conte de fée à l'intrigue originale. L'auteur a su créer un univers fantastique à même de faire rêver les lecteurs. L'existence d'une civilisation animale, de magie ancienne et d'un trésor secret mystérieux, pique la curiosité. On souhaite en apprendre plus sur ce monde au passé légendaire et sur cette
Pierre de Lune si étrange. On partage les joies et les peines du héros Dilah auquel on s'identifie.
Il est plaisant de découvrir le monde à travers les yeux d'un petit renard et
Chen Jiatong s'amuse à faire intervenir de nombreux animaux que nous rencontrons au fil des pages. Bien que destiné aux enfants entre 8 et 12 ans, le récit n'hésite pas à aborder certains thèmes sérieux comme le deuil, la cruauté ou la maltraitance animale. le merveilleux se confronte à des événements terribles qui surprennent par leur gravité. Il s'agit d'un roman d'apprentissage, au cours duquel le lecteur, à l'image du protagoniste à fourrure, apprend à grandir.
L'écriture au présent de narration rend la lecture facile et fluide mais les événements s'enchaînent vite, ce qui donne parfois l'impression de survoler l'histoire. le récit manque de développement notamment dans la psychologie des personnages dont les actions et motivations semblent souvent un peu simples, voir superficielles. Certaines scènes interpellent par leur légèreté notamment lorsque les animaux adultes appliquent sans ambages leur justice arbitraire avant de changer d'avis sans raison.
Il est difficile de savoir si cette impression provient de la traduction qui ne peut exprimer toute la complexité de la langue chinoise ou des choix de simplification faits par les éditeurs dans un récit dédié avant tout à des enfants. Mais pour un roman qui s'inscrit dans la lignée de Harry Potter, on aurait apprécié une écriture plus étoffée.
L'intérêt du récit se trouve dans les références aux mythes et aux légendes chinoises disséminées ici et là. Renard métamorphe, élixir secret, divinités célestes, forêt magique ... L'influence asiatique se devine dans des détails discrets qui insuffle au récit une intrigante originalité.
L'épopée de Dilah aborde surtout la question de la poursuite de ses rêves, du courage et de l'amitié. Sous les traits d'un petit renard, l'enfant s'ouvre au monde animal, à la beauté de la nature et prend conscience de sa fragilité. Il découvre un univers magique vaste et complexe aux multiples trésors cachés qui nourrissent l'imaginaire. Ainsi, bien que le style d'écriture et l'intrigue paraissent parfois un peu simples, La Quête du Renard Blanc détient une symbolique profonde qui se lit entre les lignes. Dilah poursuit ses aventures en « semant des empreintes en formes de trèfles. »
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