Le temps avait passé si vite. Le jour où elle était devenue mère, celui où elle s'était mariée : c'était hier. Pourtant, si on faisait le décompte des années, cela remontait à une éternité. Le temps est comme un accordéon : un instant comprimé, le suivant s'étirant interminablement.
La loi n'est pas l'unique arbitre du Bien et du Mal. Parfois, il faut considérer les choses dans leur globalité.
Sa carrière d'inspectrice n'était plus qu'un tas de ruines fumantes. Rien d'étonnant, dès lors, à ce qu'elle ne soit plus en état de travailler. Et malgré tout, elle s'obstinait, trop bornée pour renoncer dans cette course contre la montre.
Ce n’était pas la première fois qu’elle subissait ce genre de remarques. Question de territoire. Ça allait de pair avec les blagues sordides et le harcèlement pur et simple. Elle pouvait être difficile dans ses relations avec les autres, elle en était bien consciente, mais elle avait dû se forger une carapace pour survivre. Par contrecoup, les types de la criminelle s’étaient crus autorisés à la prendre pour cible.
Elle le constatait de plus en plus souvent et ça ne manquait jamais de l'agacer : la jeune génération prenait le pouvoir et la considérait comme obsolète, comme si l'expérience ne comptait plus de nos jours.
- Quand elle mourir...Quelque chose bizarre arriver. Je dire au policier.
- Au policier ? Un homme ? Alexander ?
- Un homme, oui. Lui, se foutre.
Son anglais avait beau être primitif, elle savait parfaitement faire passer le message.
‘How did you find me?’ the woman asked. There was a tremor in her voice; her face was frightened.
Detective Inspector Hulda Hermannsdóttir felt her interest quicken, thought as an old hand at this game she had learned to expect a nervous reaction from those she interviewed, even when they had nothing to hide. Being questioned by the police was an intimidating business at any time, whether it was a formal interview down at the station or an informal chat like this one. /they sat facing one another in a poky coffee room next to the staff canteen at the Reykjavík nursing home where the woman worked. She was around forty, with short-cropped hair, tired-looking, apparently flustered by Hulda’s unexpected visit. Of course, there could be a perfectly innocent explanation for this, but Hulda was almost sure the woman had something to hide. Over the years she had spoken to so many suspects she had developed a knack of spotting when people were trying to pull the wool over her eyes. Some might have called it intuition, but Hulda despised the word, regarding it as a sign of lazy policing.
‘How did I find you…?’ she repeated calmly. ‘Didn’t you want to be found?’
Elle s’était habituée à la solitude, autant qu’il était possible,mais rien ne pouvait vraiment remplacer la compagnie d’un autre être humain.
Elle ressortit tout d’abord le dossier pour se rafraîchir la mémoire et se replonger dans les détails de l’affaire. Le corps de la jeune femme avait été trouvé par un sombre matin d’hiver, échoué dans une crique rocheuse à Vatnsleysuströnd, une parcelle côtière faiblement peuplée de la péninsule de Reykjanes, à trente kilomètres au sud de Reykjavik. Hulda n’y avait jamais mis les pieds, n’avait jamais eu de raison de le faire même si elle était souvent passée dans les environs pour se rendre à l’aéroport. C’était un coin désolé du pays, balayé par les vents. Les champs de lave sans aucune végétation offraient peu de refuges contre les tempêtes qui soufflaient fréquemment depuis l’Atlantique vers le sud-ouest de l’Islande.
- Il avait quel âge, environ ?
- Difficile à dire. Un gars normal. La quarantaine, peut-être. Plus vieux qu’elle.
- Vous avez vu sa voiture ?
- Ah ouais ! Un gros tout-terrain. Les mecs dans son genre conduisent tous des 4x4 comme ça. Noirs, en général.