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Critique de Rodin_Marcel


Thierry Jonquet (1954-2009) - «Les orpailleurs», publié en 1993 chez Gallimard dans la «Série noire».

L'un des meilleurs romans de Thierry Jonquet, qui fut et reste l'un des meilleurs auteurs de romans policiers. Lorsqu'il le publie, en 1993, l'auteur possède pleinement la maîtrise de son style, de son écriture, de ce qu'il veut rendre, et des moyens qui vont avec.
C'est donc du grand Jonquet. Cela fourmille de personnages, chacun doté d'une personnalité propre, et si les policiers ou les juge(tte)s connaissent une vie privée plutôt agitée, celle-ci ne prend jamais le pas sur l'intrigue – contrairement à ce qui est aujourd'hui si lamentablement répandu. Chez Jonquet, l'intrigue reste le moteur de la narration. A ce titre, il a déjà droit à la reconnaissance de tous les amateurs de véritables romans policiers.

Ceci étant, j'en suis à ma troisième relecture de ce roman depuis sa publication : plus je le lis, plus je pense qu'à travers ces énigmes rudement bien ficelées, Jonquet délivre une étude profonde de l'humain sans avoir l'air d'y toucher, sans emphase, sans "grandes déclarations" à la Wallander.

Dans ce roman, il aborde rien de moins que le thème de l'horreur démesurée atteinte avec la Shoah, et le moins que l'on puisse lui reconnaître, c'est qu'il se montre à la hauteur. Grâce à son autobiographie «Rouge, c'est la vie» (lecture indispensable pour tout ex-soixante-huitard), on sait que Jonquet partagea la vie d'une militante de confession juive. Toute son oeuvre témoigne à de multiples reprises (cf par ex Moloch ou le secret du rabbin) de la profonde connaissance qu'il put ainsi acquérir de cette culture et de cette religion.

Sans rien en dire, sans le laisser paraître le moins du monde, rien qu'en laissant cheminer ses personnages et son intrigue, ce roman atteint des sommets dans le questionnement moral de tout humain face à l'horreur. La question clé posée ici est celle de la vengeance (ou du pardon ?) : que penser d'un homme qui entreprend de venger ses proches plus de quarante ans plus tard ? qui n'hésite pas pour ce faire à assassiner ses victimes dans des conditions atroces ? mais que penser de ces «orpailleurs» exploitant cyniquement le «filon» de la Shoah ?

Jonquet pose les questions, il se garde bien d'y répondre… Il sait faire remonter à la surface ce qui semble enfoui depuis longtemps.

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