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Critique de HundredDreams


Découvert récemment grâce à Nicola (@NicolaK) et Doriane (@Yaena), j'avais pas mal d'apriori sur Stephen King, notamment sur son style littéraire et son écriture.
Après plusieurs lectures, je dois reconnaître le talent indéniable de cet auteur. Il m'apparaît aujourd'hui comme un auteur-caméléon : il est à l'aise dans de nombreux genres littéraires, la fiction historique, le roman policier et le thriller, le fantastique et la science-fiction, l'horreur. Et je dois bien avouer que j'aime les auteurs qui savent se renouveler et nous embarquer vers des destinations inconnues.

Pour écrire « Salem », Stephen King explique dans la postface qu'il s'est inspiré du roman de Bram Stoker, « Dracula », des films et des comics d'horreur avec des vampires.

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« Salem » se déroule à Jerusalem's Lot, une petite ville tranquille et agréable du Maine.
Mais si l'on s'approche au plus près de ses habitants, le lecteur s'aperçoit bien vite que beaucoup de mensonges et faux-semblants se cachent derrière l'apparente quiétude et douceur de vivre de cette petite bourgade rurale et pittoresque.
Ben Mears, un écrivain, revient 25 ans plus tard à Salem pour écrire un livre. Il a envie de renouer avec cette ville où il a vécu durant sa jeunesse et plus secrètement, faire le deuil de la femme qu'il aimait.
Dès son arrivée, son regard est attiré par la vieille maison dominant la ville, Marsten House. Cette vieille demeure mystérieuse et menaçante a une longue histoire. Il s'y est passé des choses étranges et terribles.

« La ville s'y connaît en ténèbres.
Les ombres nocturnes et les obscurités de l'âme n'ont pas de secrets pour elle. Les trois éléments qui la constituent, une fois réunis, forment un ensemble qui transcende ses composantes. La ville, ce sont les gens qui y vivent, ce sont les maisons qu'ils ont construites pour s'y réfugier ou y faire des affaires, et c'est la terre. »

Comme vous savez, j'aime les histoires où les maisons ont une mémoire et gardent en elles les douleurs, les violences de leurs occupants. Celle-ci exhale des relents fétides, elle semble hantée par une présence maléfique, malveillante.

« … il y a peut-être quelque chose de vrai dans l'idée que les maisons absorbent en quelque sorte les émotions qui y sont vécues et les retiennent comme... une charge, un potentiel qui ne s'activerait que sous l'intervention d'un catalyseur qui pourrait être, par exemple, un enfant imaginatif. Je ne veux pas parler de fantômes. Je veux parler d'une sorte de télévision psychique à trois dimensions. Ça pourrait même donner quelque chose de vivant. Générer une sorte de monstre, si vous voulez. »

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Stephen King a le sens du détail. Sous sa plume généreuse et immersive, les mots créent une ambiance de plus en plus sombre et horrifique : ils empreignent dans notre esprit des images fortes, ils infusent une sensation diffuse de mal-être, une impression de danger latent à la venue de la nuit.

Là où l'auteur est vraiment très fort, c'est pour nous propulser dans un monde tourné en huis-clos. Il parvient à nous dépeindre l'esprit et l'ambiance des petites villes américaines isolées où tout le monde se connait, jusque dans leurs décors.
Si Stephen King prend son temps pour peindre la ville de Salem, il déploie également sa sensibilité et sa force narrative pour dessiner les portraits de ses habitants et percer leurs émotions, leurs sentiments, leurs désirs, leurs faiblesses et leurs défaillances. Là encore, l'auteur a beaucoup de talent pour s'insinuer dans l'intimité de ses personnages, s'infiltrer dans leurs pensées. Il leur crée un passé et un présent. Ces digressions créent des petites histoires à l'intérieur de l'histoire principale.

Dans les romans que j'ai précédemment lus, j'avais aimé la manière dont il amenait les différents personnages et lieux, cette lenteur dans la narration, cette exigence de vérité et de transparence sur ses personnages.
Néanmoins, cette fois-ci, dans « Salem », je me suis ennuyée sur la première moitié du récit. Il y a dans cette histoire de nombreux personnages secondaires que l'auteur développe avec justesse à la façon d'un immense puzzle, instillant par la même occasion des zones de tension. Pourtant habilement construit avec des allers et retours dans le temps, cela n'a pas suffi à me plonger pleinement dans l'intrigue que j'ai trouvée longue à démarrer, manquant de suspense et de rythme.

Il faut donc de la patience et de la persévérance au départ, car la suite du récit où tout est à sa place est vraiment prenante et vaut la peine au bout du compte. En effet, tout dérape et s'emballe, le réel s'efface, remplacé par une dimension horrifique : le narrateur et quelques survivants se retrouvent à lutter contre une force surnaturelle qui les dépasse et ronge Salem de l'intérieur. C'est lugubre et addictif à souhait.

« … quand il fait noir, tout ça paraît beaucoup plus vraisemblable. »

Parmi les thèmes fréquemment exploités par l'auteur, il y a ceux de l'image de l'écrivain et de l'acte d'écrire. le roman explore aussi le thème de l'enfance, de l'amitié et du courage, du deuil et de la peur, de la solitude et du sentiment de culpabilité.

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Stephen King construit, avec facilité et efficacité, un monde sombre et effrayant. Il crée des personnages mémorables à l'image du Père Callahan. Passé la moitié du roman, le récit démarre véritablement, l'atmosphère s'alourdit d'une inquiétante étrangeté pour entraîner ses lecteurs dans les ténèbres.
Une lecture incontournable pour les amateurs de littérature d'horreur ou pour ceux qui veulent se faire un peu peur.

« Nuit, ne me surprends pas ici. »
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