Vous n'avez pas idée du nombre de gens qu'il y a dans le monde jusqu'au jour où ils se mettent à vous ficher une trouille bleue.
Je persévère. Je me dis : " C' est comme gravir un pic montagneux : ton corps se rebiffe, mais il faut tenir bon. "
Je trouve le téléachat tout ce qu' il y a de plus relaxant. Les trois présentatrices réunies dans le même studio sont toutes d' accord pour vous dire que telle ou telle crème hydratante est fantastique. Personne n' est là pour les contredire. Personne n' élève la voix. Aucune d' elles ne découvre soudain qu' elle est enceinte. Personne ne se fait assassiner. Et il n' y a pas de boîte à rire, un truc qui, croyez-moi, résonne parfois dans ma tête comme un marteau-piqueur.
Tu penses trop. C' est ça ton problème. Arrête de réfléchir.
Au lieu de m' opposer à mon cerveau de lézard, j' ai appris à le tolérer. Je l'écoute, et puis je luis dis : " Ouais, cause toujours. "
C'est ça, le problème avec vous, les jeunes. Vous avez l'esprit obtus. Vous êtes bourrés de préjugés.
Maman scrute l'écran comme un savant de l'ancien temps aurait déchiffré des hiéroglyphes.
Les écrans sont des suppôts de Satan.
- J’en ai assez de cette satanée courbe toute tordue. Tu sais, deux pas en avant, un pas en arrière. Ça fait mal. C’est tellement lent. C’est comme une partie de jeu de l’échelle qui n’en finirait pas.
Maman me regarde comme si elle était sur le point d’exploser de rire. Ou de pleurer.
- Mais Audrey, c’est la vie. On a tous une courbe tordue. Moi aussi. Il y a des hauts et des bas. C’est comme ça.
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