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EAN : 9782363582065
512 pages
Editions Vendémiaire (16/06/2016)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Le 26 mai 1755, après un procès expéditif, Louis Mandrin est roué de coups puis pendu sur la place des Clercs de Valence. Il est âgé de trente ans. Très vite, le contrebandier entre dans la légende : on ne compte plus les récits et les chansons qui perpétuent la mémoire de ses exploits, sur tout le territoire du royaume. Son nom est resté, jusqu’à aujourd’hui, synonyme d’aventures dignes d’un roman de cape et d’épée, et de rébellion armée contre l’ordre établi.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
L'image que l'on a aujourd'hui de Louis Mandrin est celle d'un personnage au grand coeur, une sorte de Robin des Bois français, qui n'hésitait pas à se lever contre l'injustice et l'arbitraire. On sait aussi qu'il était contrebandier et contournait les lois du marché en vigueur pour la plus grande satisfaction de la population française.

Aussi, le livre de Michael Kwass, gros ouvrage de 635 pages, me semblait intéressant pour en savoir davantage sur la vie de Louis Mandrin après l'étude ancienne de Frantz Funck-Brentano, qui reste néanmoins la référence, ou celle plus récente d'Yves Jacob. Mais l'ouvrage de Michael Kwass, qui est professeur d'histoire à l'université Johns-Hopkins de Baltimore, n'est pas à proprement parler une biographie de Louis Mandrin. Même si l'essentiel du livre retrace l'itinéraire du célèbre contrebandier, le héros n'apparaît qu'à la 123e page et le sujet principal en est bien la mondialisation de la contrebande au siècle des Lumières.

En effet, l'auteur s'intéresse au commerce illicite et à l'économie souterraine qui au XVIIIe siècle, dans le royaume de France, et plus particulièrement dans la France de Louis XV, vont permettre aux Français de consommer davantage à un moindre coût. L'auteur suit avant tout la consommation du tabac et du calicot, ces tissus chatoyants et résistants qui venaient des Indes.

C'est l'ingérence de l'État dans la commercialisation de ces produits, le tabac devient un monopole royal aux mains de la Ferme générale, et le calicot est prohibé sur le marché français car il concurrence les tissus de coton produits dans la métropole, qui va favoriser la contrebande.

Si le commerce illicite existait déjà, notamment autour du sel, il va se développer considérablement, ce qui aura des implications dans les domaines judiciaire, économique et politique.

Le cas de Louis Mandrin est révélateur à plus d'un titre de cette économie souterraine. Si, jusqu'alors, le commerce de contrebande s'exerçait dans l'ombre, Mandrin adopte une toute autre tactique. Ayant constitué une bande réunissant une centaine d'individus, il propose directement ses produits de contrebande sur les places de marché des villes et villages au vu et au su de tous. Les habitants peuvent ainsi acheter en toute sécurité des biens qu'ils paient moins cher qu'ailleurs. Mais ce qui distingue Mandrin des autres contrebandiers, c'est qu'il effectue aussi des ventes forcées de tabac auprès des agents de la Ferme générale ; il leur délivre même des reçus justifiant ces ventes. Il s'en prend ainsi directement à l'institution de la Ferme générale et aux financiers responsables de l'appauvrissement des Français.

La Ferme va réagir vigoureusement. Ses troupes traquent sans relâche les contrevenants. de véritables batailles s'engagent faisant de nombreux morts. Pour punir sévèrement les contrebandiers, des juridictions spéciales comme la commission de Valence sont créés. Elles prononcent des condamnations à mort, des peines de galère ou de bagne et infligent de lourdes amendes que les condamnés ne peuvent payer. Les peines, disproportionnées aux actes commis, ne mettent pas pour autant un terme à la contrebande. En 1755, Mandrin est pris et roué vif. Aussitôt, la légende s'empare du personnage et déforme son histoire.

En France, le commerce illicite perdure et les révoltes populaires se multiplient. Aussi, des philosophes, des écrivains ou encore des économistes s'insurgent-ils contre l'institution de la Ferme et proposent-ils des améliorations à apporter aux systèmes judiciaire et fiscale de la France des Lumières. Dans un dernier chapitre, l'auteur nous conduit dans les premières années de la Révolution française qui voient la disparition de la Ferme générale et le changement du système fiscal qui repose désormais sur une contribution directe consentie et non plus sur une imposition indirecte subie, c'est-à-dire sur une imposition des biens de consommation.

L'auteur de cet imposant et important ouvrage a su expliquer, de par le détail, tous les rouages de cette économie souterraine qui, au XVIIIe siècle, participa à la consommation de masse d'une population française et européenne et pas seulement des classes aisées de cette époque. On doit remercier les éditions Vendémiaire d'avoir publié ce livre d'un brillant professeur américain qui connaît parfaitement son sujet.
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Tout ou presque a déjà été dit sur Louis Mandrin, brigand de légende combinant une bonne partie des caractéristiques du bandit d'honneur tel que caractérisé par Eric Hobsbawm. Issu d'une faille déclassée, combattant une institution de l'État, la Ferme générale, que la population voit moins comme une administration au service du royaume que comme un racket organisé au détriment du peuple, Mandrin a tout pour séduire.
Surtout, pour l'historien américain Michael Kwass, spécialiste d'histoire économique, l'histoire de Louis Mandrin est un bon moyen de mettre en perspective le mouvement de mondialisation du commerce et de l'économie au siècle des Lumières et, ce faisant, d'éclairer le lecteur sur tout le contexte qui entoure Mandrin, en quelque sorte un des derniers maillons d'une chaîne complexe qui trace son chemin des Indes orientales ou occidentales jusqu'aux confins du Dauphiné en passant par Versailles.
S'il doit parfois rattacher un peu artificiellement certains concepts ou mouvements économiques au personnage de Mandrin, Michael Kwass a cependant la grande qualité (assez courante chez les historiens anglo-saxons) de rendre son récit vif et parfaitement compréhensible sur les traces des toiles indiennes et du tabac. On suit ainsi la mise en place de mesures protectionnistes dans un contexte de conflits entre France et Angleterre et donc, de recherches par les États à la fois de liquidités et d'affaiblissement de l'économie de l'adversaire, et, concomitamment, celle d'une contrebande qui joue elle aussi un rôle économique important.
Autant dire qu'il y a de quoi dans ce « Louis Mandrin », qui n'oublie jamais que derrière les grands mouvements économiques et il y a des hommes, allier le plaisir de la lecture à celui de l'érudition.
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J'ai eu envie de lire ce livre après un WE à Saint-Malo, lieu d'arrivée de marchandises de contrebande.
Excellent livre d'histoire du 18ème siècle, écrit avec Passion comme un roman, mais avec des faits et des informations solidement étayées.
On prend fait et cause pour le héros, et on tremble pour lui. Belle explication de certaines causes de la révolution française.

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Critique du Canard Enchaîné
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