Jean Dufaux est tellement prolifique et éclectique qu'on ne peut guère s'étonner de son envie d'adapter le roman de Jean de la Varende, un auteur pourtant peu en cour. Il faut dire que l'aura de de
La Varende pâtit sérieusement de ses accointances traditionalistes, voire plus, l'homme ayant eu maille à partir avec l'épuration après la guerre.
Inspirée en partie d'une histoire vraie, on découvre la survie d'un homme, le comte Roger de Tainchebraye, défiguré en 1814 au cours d'une charge contre les cosaques.
Devenu monstrueux d'apparence, il cache son état derrière un masque de cuir.
Ce masque le rend paradoxalement irrésistible auprès des femmes (l'envie de voir le loup ?) auprès desquelles il s'étourdit, passant sans s'attacher de l'une à l'autre, jusqu'à ce qu'il rencontre Judith de Rieusses, jeune fille pure, dont il tombe éperdument amoureux.
Derrière le masque se cache aussi une belle âme maudite. "Nez-de-cuir" cherche à fuir en permanence, redoute le silence qui lui donnerait trop à entendre son coeur, qui ne s'est pas arrêté sur le champ de bataille. Il est devenu un corps que rien ne gouverne en dehors de son désir, redoutant de lire dans le regard des autres, l'horreur ou la pitié.
Côté dessin, Jaques
Terpant montre autant d'habileté que jadis Griffo (quand il ne bâclait pas ses travaux comme aujourd'hui). Cela signifie donc quelques maladresses, mais aussi beaucoup de charme et une mise en couleurs très agréable, ce qui ne gâche rien.
Un bel ouvrage, d'un romanesque un peu hors du temps.