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Critique de gill


gill
01 février 2022
Cet empire caché dont nous parle ici Francis Lacassin, le serait-il aujourd'hui dans une boîte verte entrouverte sur les quais de Paris, dans les piles poussiéreuses de livres de la boutique d'un vieux bouquiniste ou dans le grenier d'une ancienne demeure dont l'huis grince abominablement à force d'avoir été abandonné ?
Déjà, dans "passagers clandestins", Francis Lacassin avait évoqué les lointains et mystérieux rivages de la littérature populaire, de celle qu'il avait coutume d'appeler la "littérature illettrée".
Pourquoi ce terme d'illettrée qui pourrait sonner, à tort, comme bien péjoratif ?
"Illettrée" parce que comme le soulignait si justement Théophile Gautier :
"Tout le monde a dévoré "les mystères de Paris, même les gens qui ne savent pas lire : ceux-là se les font réciter par quelque portier érudit et de bonne volonté"...
Il en est ainsi de la littérature populaire.
Ses personnages mythiques, Fantomas, Tarzan, Rouletabille, Arsène Lupin, Chéri-bibi et bien d'autres ont depuis longtemps échappé aux mots de leurs auteurs pour s'emparer de leurs propres vies.
Ce livre de Francis Lacassin, pourtant précieux dans son ensemble, à mon sens, est articulé en deux parties dont la première, la plus longue et la plus intéressante, est une fine analyse de ce que fût en France le roman populaire.
Elle est est un essai croisé qui évoque "l'épopée des misères du peuple" d'Eugène Sue, les splendeurs et les misères de Paul Féval le feuilletoniste, les mille et une nuits de Gaston Leroux journaliste exclu du journal "le Matin", "Fantomas ou l'opéra de treize sous" et Gustave le Rouge parfois surnommé "le Jules Verne des midinettes" ...
Le roman populaire organisait une partie de cache-cache entre vertu et cruauté.
Ils ont été quelques auteurs à le transformer jusqu'à ce qu'il devienne ciné-roman, série-télé et finalement bande-dessinée.
Car tel est le propos de Francis Lacassin.
Éclairer le long cheminement de cette littérature illettrée dont il s'est fait le conteur au fil de préfaces, d'anthologies et d'essais brillants comme celui-ci.
Francis Lacassin se voulait être un lecteur particulier.
Il l'a été, pour notre plus grand bonheur.
Il a fouillé, cherché et redécouvert les portes de "l'empire caché", un monde plein d'une prétendue naïveté, d'humour et de cruauté.
Il éclaire ici la naissance et les origines du roman policier, évoque les pionniers du roman d'espionnage que l'on nommait alors roman patriotique, et souligne l'importance d'un certain roman social.
De l'épaisseur du feuilleton, il dégage l'essentiel, sans pour autant en occulter les défauts.
Son érudition sur le sujet paraît sans limite.
Et, il se moque bien de la critique que lui opposent les littérateurs de la tasse de thé.
Au contraire de Zola qui pensait que "tout Féval n'était bon qu'à vendre à la livre", Francis Lacassin était un amoureux du roman populaire, de cette "littérature illettrée", de cet empire caché dont on ne peut ouvrir les portes, goûter aux qualités, qu'en possédant, selon lui, assez d'innocence ...
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