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Citations sur Poésie complète (I) : Les Complaintes (suivies des) Premi.. (63)

Soleil couchant (Le soleil s'est couché).

Le soleil s’est couché, cocarde de l’azur!
C’est l’heure où le fellah, près de sa fellahine,
Accroupi sur sa natte, avec son doigt impur,
De son nombril squameux épluche la vermine.

Dans la barbe d’argent du crasseux pèlerin
Dont le chauve camail est orné de coquilles,
Ivre et fou de printemps, le pou chante un refrain,
Plus heureux que le roi de toutes les Castilles.

Sur les rives du Nil, le goitreux pélican
Songe à la vanité morne de toutes choses
Avec des airs bourrus, comme Monsieur Renan;
Sur une patte, auprès, rêvent les flamants roses.

Déjà sortent du fleuve, étincelant miroir,
Les crocodiles bruns, Sur les berges vaseuses
Ils viennent aspirer, dans la fraîcheur du soir,
Les souffles d’air chargés de senteurs capiteuses.

Cependant qu’à Paris, sur sa porte arrêté,
Le ventre en bonne humeur, mon gros propriétaire
Ricane du bohème au jabot non lesté,
Tourne béatement ses pouces – et digère.
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Soleil couchant (L'astre calme).

L’astre calme descend vers l’horizon en feu.
Aux vieux monts du Soudan qui, dans le crépuscule
Et le poudroiement d’or, s’estompent peu à peu,
- Amas de blocs géants où le fauve circule -
Là-haut, sur un talus voûtant un gouffre noir,
De ses pas veloutés foulant à peine l’herbe,
Secouant sa crinière à la fraîcheur du soir,
Lentement, un lion vient se camper, superbe!
De sa queue au poil roux il se fouette les flancs;
Sous les taons, par moments, son pelage frissonne;
Ses naseaux dans l’air frais soufflant deux jets brûlants.
Fier, solitaire, alors, songeant à sa lionne,
Dans sa cage à Paris exposée aux badauds
Et qu’un bourgeois taquine avec son parapluie,
Il bâille et jette aux monts roulant leurs longs échos
Son vaste miaulement de vieux roi qui s’ennuie!
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On les voit chaque jour.

On les voit chaque jour, filles-mères, souillons,
Béquillards mendiant aux porches des églises,
Gueux qui vont se vêtir à la halle aux haillons,
Crispant leurs pieds bleuis aux morsures des bises ;
Mômes pieds nus, morveux, bohèmes loqueteux,
Peintres crottés, ratés, rêveurs humanitaires
Aux coffres secoués de râles caverneux,
Dans leur immense amour oubliant leurs misères ;
Les rouleurs d’hôpitaux, de souffrance abrutis,
Les petits vieux cassés aux jambes grelottantes
Dont le soleil jamais n’égaye les taudis,
Clignant des yeux éteints aux paupières sanglantes
Et traînant un soulier qui renifle aux ruisseaux;
- Tous, vaincus d’ici-bas, – quand Paris s’illumine,
On les voit se chauffer devant les soupiraux,
Humer joyeusement les odeurs de cuisine,
Et le passant qui court à ses plaisirs du soir
Lit dans ces yeux noyés de lueurs extatiques
Brûlant de pleurs de sang un morceau de pain noir :
Oh! les parfums dorés montant des lèchefrites!
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Nuage.

Oh, laisse-moi tranquille, dans mon destin,
Avec tes comparaisons illégitimes!
Un examen plus serré ferait estime
Du moindre agent,… – toi, tu y perds ton latin.

Preuves s’entendant comme larrons en foire,
Clins d’yeux bleus pas plus sûrs que l’afflux de sang
Qui les envoya voir : me voilà passant
Pour un beau masque d’une inconstance noire.

Ah! que nous sommes donc deux pauvres bourreaux
Exploités! et sens-tu pas que ce manège
Mènera ses exploits tant que le,.. Que sais-je
N’aura pas rentré l’Infini au fourreau ?

Là; faisons la paix, ô Sourcils! Prends ta mante;
Sans regrets apprêtés, ni scénarios vieux,
Allons baiser la brise essuyant nos yeux;
La brise,… elle sent ce soir un peu la menthe.
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La maisonnette blanche.

Ce serait une maison blanche,
Tuiles roses et volets verts,
Dans l’azur calme et le grand air,
Là-bas, sur ce coteau qui penche.

A ma fenêtre, dans les branches,
Je cisèlerais de beaux vers.
Tuiles roses et volets verts :
Ce serait une maison blanche.

Là, seul, je passerais dimanches,
Jours de semaine, étés, hivers,
Et du haut de mon belveder
Je goûterais cette revanche,
O Sort, d’avoir ma maison blanche !
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La chanson du petit hypertrophique.

C’est d’un’ maladie d’ cœur
Qu’est mort’, m’a dit l’ docteur,
Tir-lan-laire
Ma pauv’ mère;
Et que j’irai là-bas,
Fair’ dodo z’avec elle.
J’entends mon cœur qui bat,
C’est maman qui m’appelle!

On rit d’ moi dans les rues,
De mes min’s incongrues
La-i-tou!
D’enfant saoul;
Ah! Dieu! C’est qu’à chaqu’ pas
J’étouff’, moi, je chancelle!
J’entends mon cœur qui bat,
C’est maman qui m’appelle!

Aussi j’ vais par les champs
Sangloter aux couchants,
La-ri-rette!
C’est bien bête.
Mais le soleil, j’ sais pas,
M’ semble un cœur qui ruisselle!
J’entends mon cœur qui bat,
C’est maman qui m’appelle!

Ah! si la p’tit’ Gen’viève
Voulait d’ mon cœur qui s’ crève.
Pi-lou-i!
Ah, oui!
J’ suis jaune et triste, hélas!
Elle est ros’, gaie et belle!
J’entends mon cœur qui bat,
C’est maman qui m’appelle!

Non, tout l’ monde est méchant,
Hors le cœur des couchants,
Tir-lan-laire!
Et ma mère,
Et j’ veux aller là-bas
Fair’ dodo z’avec elle…
Mon cœur bat, bat, bat, bat…
Dis, Maman, tu m’appelles?
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J'écoute dans la nuit.

J’écoute dans la nuit rager le vent d’automne,
Sous les toits gémissants combien de galetas
Où des mourants songeurs que n’assiste personne
Se retournant sans fin sur de vieux matelas
Écoutent au dehors rager le vent d’automne.

Sonne, sonne pour eux, vent éternel, ton glas !
Au plus chaud de mon lit moi je me pelotonne
Oui! je ferme les yeux, je veux rêver, si las,
Que je suis dans l’azur, au haut d’une colonne
Seul, dans un blanc déluge éternel de lilas.

Mais zut! j’entends encor rager ce vent d’automne.
Messaline géante, oh! ne viendras-tu pas
M’endormir sur tes seins d’un ron-ron monotone
Pour m’emporter, bien loin, sur des grèves, là-bas
Où l’on n’entend jamais jamais le vent d’automne.
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Intérieur (Il fait nuit).

Il fait nuit. Au dehors, à flots tombe la pluie.
L’âtre aux vieux murs couverts d’une lèpre de suie,
D’une résine en feu s’éclaire pauvrement.
Tapi dans son coin noir, mélancoliquement,
Un grillon solitaire, en son cri-cri sonore,
Regrette son cher trou, dans les prés, à l’aurore,
Alors que la rosée, au soleil s’allumant,
À chaque pointe d’herbe allume un diamant!
Autour des feux mourants, qui dans l’âtre blêmissent,
Des paysans penchés par degrés s’assoupissent,
Plongés dans l’hébétude, et le regard pareil
À ceux des bœufs repus ruminant au soleil.
L’aïeule aux grêles mains, branlant le chef, tricote;
À ses pieds, un matou joue avec la pelote.
Ses maigres doigts noueux vont et viennent sans fin,
Poussant l’aiguille en bois dans les mailles de lin;
Elle écoute le vent, rêve parfois, s’arrête,
Tire la longue aiguille et s’en gratte la tête;
Puis reprend aussitôt, avec son air songeur.
Et moi j’intitulai ma pièce : Intérieur.
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Idylle.

Il est minuit. – Ils sont sous les grands marronniers.
Lasticot, caporal dans les carabiniers,
Le coupe-choux au flanc, le shako sur l’oreille,
Fier comme un Dumanet! – À ses côtés, vermeille
Comme une pomme à cidre, exhalant une odeur
D’ail et de vieux fricot, son gros œil gris rêveur,
Est assise Justine, actuellement bonne
Chez Monsieur Coquardeau, trois, place Tiquetonne.
Comme ils sont beaux tous deux ! Comme elle a les pieds grands!
Lui les a plus petits, mais odoriférants,
Dam! les grandes chaleurs… Vous savez.., on transpire…
Mais si vous voulez bien revenons à mon dire,
Justine et Lasticot, l’un prés de l’autre assis,
Roucoulent tendrement, tous leurs sens assoupis,
Dans la tiédeur fondante où baigne la nature.
Vrai ! Coppée en ferait une bonne peinture!
L’arbre sent fermenter la sève en ses rameaux
À voir se becqueter sous lui ces tourtereaux
Qu’endort en soupirant la capiteuse haleine
Du clair de lune pâle et de la nuit sereine.
Entre les deux amants reluit le coupe-choux
Ainsi que la prunelle ardente d’un jaloux
Qui perpètre dans l’ombre une vengeance épique.
L’âme, tulipe d’or au calice mystique,
Aspire.., et dans leurs cœurs qu’on entend palpiter
L’amour ouvre son aile et se met à chanter.
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Excuse macabre.

Margaretha, ma bien-aimée, or donc voici
Ton crâne. Quel poli! l’on dirait de l’ivoire.
(Je le savonne assez, chaque jour, Dieu merci,
Et me permets d’ailleurs fort rarement d’y boire.)
Te voilà!… Dans ces deux trous, deux beaux yeux jadis,
Miroirs de ton âme enrhumée,
Rêvaient… Las! où sont tes belles tresses d’or, dis,
Margaretha, ma bien-aimée ?

Margaretha, ma bien-aimée, ainsi pour moi,
Qui crois qu’ici-bas tout finit au cimetière,
Un vieux crâne est le peu qui reste encor de toi!
Et, n’est-ce pas le sort de la nature entière?
Les Hugo, les Césars, – un peu de cendre au vent;
Soleils dont la voûte est semée,
Mondes, tout doit un jour s’abîmer au néant,
Margaretha, ma bien-aimée !

Margaretha, ma bien-aimée, et puis enfin,
Contemple le cosmos! – l’humanité, qu’est-elle,
Dans cet océan plein de vertige? Un essaim
D’atomes emportés dans la course éternelle!
Et puisque, en fin de compte, il n’est rien ici-bas
Qui ne soit vanité, fumée,
Ton crâne…, je puis bien le vendre, n’est-ce pas,
Margaretha, ma bien-aimée ?
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