Je me sens vivre, respirer de nouveau. Je pense à ma mère, à ce qu’elle dirait de moi en me voyant. Elle a toujours souhaité que je sois heureuse, alors même si cela n’entre pas dans le politiquement correct, je crois qu’elle approuverait quand même. Le bonheur ne se contente pas d’une seule case, on le prend là où il pose ses valises.
C’est Watts ! Putain ! Que fait-il ici ? N’a-t-il pas eu mon message ?
— Mademoiselle Marchal, se lève-t-il en me tendant la main. Nous n’avons pas été présentés, je suis Léo Watts. Je fais de même et lui donne la mienne après m’être libérée de mon verre.
— N’avez-vous pas eu mon message hier soir ?
— Si, les deux en fait, mais je souhaitais vous parler en personne. À défaut d’un dîner, prenons le petit déjeuner ensemble ?
— J’ai l’impression que vous ne me donnez pas trop le choix.
— Je suis ici, vous aussi, cela serait idiot de ne pas faire connaissance.
Ce genre de types n’aime pas qu’on leur dise non, et moi, je déteste qu’on m’impose des choses. Je m’installe en face de lui en espérant qu’une fois qu’il aura eu sa discussion, il me lâchera la grappe.
"La vidéo se coupe et mon coeur se décroche de ma poitrine pour de bon. J'essuie mes larmes du revers de ma main, mon vide prend la proportion de l'univers tout entier."
Non. Je pense sincèrement que l’amour se cultive jour après jour. Les gens qui disent qu’ils s’aiment tout de suite, ce sont des menteurs. Pour aimer quelqu’un, il faut apprendre à le connaître complètement avec ses qualités et ses défauts. On aime dans le temps, pas dans l’instant.
J’ai moins bien dormi que la veille. Après m’être préparée, je vais me promener, j’ai besoin de m’aérer. Sans m’en apercevoir, mes pas m’emmènent jusqu’à l’embarcadère, là où hier encore le yacht de Watts était amarré, mais ce matin, l’emplacement est vide. Je me sens à la fois soulagée et… je ne sais pas quoi d’autre à vrai dire. J’ai l’impression d’être une alcoolique qui avait un verre sous le nez tout le temps et que maintenant que ce verre n’est plus là, la tentation ne me dévore plus.
Il gère et assure comme un dieu, au point qu’il fait passer le mot « plaisir » pour un mot désuet. Il faudrait inventer un autre terme pour Léo et ce qu’il me provoque.
— Vous avez déjà joué, Lilly ?
— Vous avez peur pour votre fric ?
— Si j’avais peur, souligne-t-il, je ne vous aurais jamais donné ces jetons pour vous divertir.
— Cent mille euros, c’est de l’amusement pour vous ?
— Une broutille plus exactement. Je n’attends pas un retour sur investissement. Quoique, en y réfléchissant… se tourne-t-il vers moi. Vous aimez parier, Lilly ?
— Non.
— Moi, énormément, j’adore prendre des risques, je pensais que vous aussi.
— Les risques sont dangereux et je les évite autant que possible.