Ragnhild Pekkari n'attend plus grand chose de la vie, alors autant en finir, même si c'est lestée d'un sac à dos et au fond de la rivière... enfin, ça c'était son intention avant le coup de fil qui la ramène à de plus sordides réalités. Son frère Henry, qui vit sur une île déserte, n'a plus fait d'apparition dans la ville minière Lapone de Kiruna depuis plusieurs jours. Elle doit aller voir s'il ne lui est pas arrivé quelque chose de grave.
Elle va faire une macabre découverte, le corps sans vie de son frère, mais aussi un cadavre dans un congélateur, qui s'avère être celui d'un ancien champion de boxe disparu depuis 50 ans.
C'est Rebecka Martinsson, la procureure adjointe de Kiruna qui est priée de mener discrètement l'enquête. Kiruna, cette ville à l'atmosphère polluée par la mine. Si cette dernière permet de sauver l'économie en procurant des emplois au plus grand nombre, elle menace aussi la sécurité physique des habitants. Kiruna qui peu à peu se transforme en gruyère et qu'il faudra déplacer.
De fil en aiguille, le lecteur comprend que Rebecca et Ragnhild ont un passé en commun, mais une sombre animosité semble les avoir éloignées l'une de l'autre depuis longtemps.
S'il y a bien une enquête et quelques cadavres, car les premiers découverts ne seront pas les derniers, celle-ci est quasi anecdotique. L'autrice est moins intéressée par le rythme généralement inhérent au thriller que par le passé des personnages. Elle décortique leur caractère et leur psychologie avec minutie. J'aime la façon qu'elle a de les faire se rencontrer et évoluer, mais aussi le fait qu'elle nous parle de la vie et des habitudes des suédois en général.
De fait, il y a peu d'action et beaucoup de personnages. Börje, le fils d'un boxeur disparu depuis l'été 1962, un médecin légiste qui se bat avec le cancer mais veut comprendre ce qu'il s'est passé,
Sven Erik un ancien policier à la retraite, l'inspectrice Anna-Maria, beaucoup de chiens, et quelques mafieux font tour à tour des apparitions.
Les personnages évoluent entre présent et passé. Les nombreux flash-back (qui auraient sans doute étés plus faciles à suivre en version papier même si l'ensemble est aisément compréhensible) sont là pour éclairer l'enchaînement des événements. Les multiples descriptions des paysages, la nature omniprésente, le fait que l'action se passe dans le grand nord de la Suède aux étendues blanches et au froid mortel, tout cela donne une dimension très visuelle à l'ensemble.
De nombreux thèmes sont abordés par Asa Larsson. Par exemple, la différence de niveau de vie entre Stockholm et la province, Kiruna en particulier, car même si la mine rapporte à l'état, les habitants de la région profitent trop peu des bénéfices, la vieillesse et la solitude, la maladie, la corruption et les malversations financières et immobilières, la boxe et ses irrégularités, la prostitution, etc.
La voix d'
Odile Cohen s'adapte parfaitement au rythme de ce polar scandinave. Elle dégage tout au long de sa lecture une certaine lenteur, mélange de douceur et de fermeté, et une force de caractère indispensable pour résister au climat et aux catastrophes.
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