Cette quête du féminin,
cette enquête infinie sur l'énigme du féminin,
sur sa quintessence, au-delà des apparences apprises,
l'a menée en un lieu très voisin,
un lieu commun à elle et à lui Degas...
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Qu'est-ce qui compte le plus, la toile ou le modèle, l'art ou la nature , l'oeuvre nous console-t-elle de la vie ? (p. 13)
Le petit rat ne cesse de répéter jusqu'à épuisement les mêmes gestes,
le sculpteur fait, défait et refait
sans cesse des modelages toujours imparfaits.
P 113
Degas désire abattre le stéréotype, asséner une vérité que la société ignore - veut ignorer. La danse n'est pas un conte de fées, c'est un métier pénible. Cendrillons sans marraine, les petits rats ne deviennent pas des princesses, et leurs cochers sans carrosse restent des souris grises comme le coutil de leurs chaussons. Ce sont des enfants qui travaillent, à l'instar des cousettes, des petites bonnes, des vendeuses, mais plus durement encore. A sa manière, l'artiste prolonge ou devance les dénonciations faites par les écrivains de son temps, en ce siècle industriel où les enfants pauvres sont traités comme des bêtes.
On peut raisonnablement penser qu’il a fait pour elle ce qu’il a fait pour eux, forçant les traits naturels de son jeune modèle afin de lui donner les caractéristiques d’une criminelle. Certes, elle n’a tué personne, mais son délit n’en est pas moins grave si l’on se souvient de l’affirmation du Dr Lombroso : « La prostitution est la forme du crime chez la femme. » Par son pouvoir de dépravation, la « fille » suscite le même mépris et la même répression que les assassins. Et c’est bien ainsi que sera perçue Marie par tous les commentateurs, comme une prostituée en acte ou en germe, une sauteuse. Le critique Paul Mantz traduira le sentiment général en évoquant « un visage où tous les vices impriment leurs détestables promesses ». Et les visiteurs, en la comparant à un « singe » ou à une « Aztèque », la renvoient, ainsi que le note Douglas Druick, « aux premiers stades de l’évolution humaine.
La vérité n'est jamais laide quand on y trouve ce dont on a besoin. ----Edgar Degas (p. 23)
Ainsi Degas franchit-il, avec cette sculpture, une double frontière symbolique: celle de la bienséance et celle des règles académiques de l'art. IL accomplit une révolution à la fois morale et esthétique, il brise les tabous. (p. 70)
C'est toujours une chose étrange, dans une fratrie, de voir le destin broder différemment sur le canevas des mêmes souffrances. (p. 24)
" La cire d'abeille, dont l'aspect translucide accroche bien la lumière, est mêlée à de l'argile et à de la plastiline, substance argileuse grasse qui a l'intérêt de rester molle plus longtemps, ce qui permet au sculpteur d'ajuster et de réajuster sans cesse la matère afin de se rapprocher du contour idéal. C'est pourquoi il refuse des matériaux plus solide. " Que je fasse fondre ? Le bronze, c'est pour l'éternité. mon plaisir à moi, c'est d'avoir toujours à recommencer.""
Du reste, la majorité sexuelle a été fixée à treize ans par la loi de 1863 - elle l'était auparavant à onze.