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4,14

sur 399 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce recueil de textes, profondément noirs, est une découverte pour moi.
Poésie en prose, surréaliste, cruelle, évoquant le mal, la douleur.
Je l'ai lu par épisode, en prenant le temps de lire chaque texte, seul moyen pour moi de pénétrer cette prose très obscure, parfois à la limite du non-sens voir du n'importe quoi (ex 1er texte du cinquième chant).
Chaque chant commence souvent par des images cauchemardesques, puis un entrelacement de mots dont émerge une introspection qu'on pourrait prendre pour une réflexion philosophique, mais dont le nihilisme fait un peu peur : clairement l'auteur apparaît comme fou, schizophrène.
Les mots sont beaux, et quand on accroche à la première image, (un monstre, une falaise... ) ils évoquent immédiatement et puissamment des images fortes et rémanentes, qui me font penser au monde plus récent du mouvement hardcore/hardrock métal. Certains chants restent hermétiques, notamment quand on n'arrive pas à accrocher le sens général du premier tableau, d'autres sont de véritables chefs-d'oeuvre !
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Je ne sais pas vraiment par où commencer car ce livre est déroutant.

Cet ouvrage a été pour moi la transcription de la beauté de la langue française dans son aspect le plus substantifique. Cette prose inhale la poésie et la maîtrise du discours. Elle m'a éblouie comme peu d'ouvrages l'ont fait (voir les extraits du poème Ode au Vieil Océan dans les citations, étant mon passage préféré).

Ce qui est assez paradoxal et peut-être ce qui représente le génie de cette oeuvre, c'est que la beauté et l'horreur se recouvrent et s'entrecoupent tout du long. C'est aussi pourquoi j'ai été assez désemparée dans mes émotions. Si les descriptions sont d'une perfection dans les mots choisis et dans leur formulation poétique, elles sont souvent macabres, sadiques, polémiques. Ce livre regroupe tout ce que l'homme peut faire de vil: le viol, la souffrance, l'abus, le sadisme, les combats, le péché, tout cela à travers une description fine et précise qui, par moments, soulève le coeur.

Aussi les scènes macabres, sadiques, érotiques, malaisantes représentent la majorité de l'ouvrage, bien que les odes à la nature permettent une bouffée d'air saint dans ce tableau déroutant. Il y a une symbolique par moments que l'on ne comprend pas toujours, à chacun d'interpréter à sa façon les nombreuses allégories, notamment cette obsession autour du divin, et du mal.
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Si la lecture de ces contes s'avère parfois laborieuse, c'est qu'il ne faut pas, comme l'auteur l'indique, découvrir ces « pages sombres » sans maintenir une diligente « tension d'esprit ». Une fois cette consigne suivie, se plonger dans ces interminables phrases, formées de méandres piégeuses et de circonvolutions promptes à égarer, devient un véritable délice. le style est à l'image du recueil, les phrases à l'image des contes, affranchies des codes, dans la prose comme le contenu.
Le texte est cru et cruel, et certaines âmes trop réceptives pourraient s'imbiber du mal et du mal-être que dégagent ces pages. D'aucuns voient chez Ducasse un défaut de maturité ; mais il semble plutôt qu'il a cessé, lors de la création de ce recueil, de repousser ses pulsions les plus noires, qu'il y a adhéré, et les a magnifiées par une plume faisant violence à la langue française commune.
Accrochez-vous lors de votre lecture, vous serez transporté !
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Certaines nuits, des cauchemars vous réveillent frissonnant, transpirant, haletant. L'effroi irradie dans vos méninges et l'écho de l'horreur ne se dissipe que lentement.

Qu'est-ce qui est imaginaire? Où est le réel?

Je n'ai jamais eu de rêves aussi sombres que les chants de Maldoror, que les divinités, si elles existent, m'en préservent. L'âme de Maldoror se déverse dans un égout, réceptacle des actes les plus sombres, des pensées les plus sales, des comportements les plus vils.
Ô Maldoror, que ces chants sont horribles et majestueux, répulsifs et ténébreux. du caniveau des salissures humaines, germine une poésie surréaliste malaisante, la plante couverte d'épines à la fleur aux flagrances nauséabondes.

De la plume sort une pisse chaude et visqueuse faisant suinter une littérature magnifique. A la lecture, on chavire au bord des falaises si nombreuses, on compagnonne avec de multiples êtres marins dont les pinces acérées viennent parfois nous chatouiller, souvent nous pincer et fréquemment nous grapiller des états de l'âme.

Maldoror est-il la part odieuse de l'être humain ou la face cachée de nos divinités. le Ying et le Yang, le généreux et le cupide, l'ange et le démon sont-ils si dissemblables ou ne forment-ils pas les deux faces d'une même pièce? Rien de nouveau ici. Cependant les chants de Maldoror parviennent à agréer les abysses de l'horreur et le ravissement d'une écriture céleste.


J'ai aimé détester lire Maldoror tout autant que j'ai détesté aimer lire Maldoror.

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« Je me propose, sans être ému, de déclamer à grande voix la strophe sérieuse et froide que vous allez entendre. Vous, faites attention à ce qu'elle contient, et gardez-vous de l'impression pénible qu'elle ne manquera pas de laisser, comme une flétrissure dans vos imaginations troublées. »
Étonnement ou choc, tels sont les mots qui viennent à l'esprit à la lecture des chants de Maldoror.
L'étonnement d'abord qu'un si jeune homme dont on ne sait presque rien sinon qu'il est mort à 24 ans, puisse avoir un tel souffle épique, souffle qu'il met au service de sa révolte par le biais de son héros, Maldoror –Nom paraît-il composé par le « mal » et « horreur » - contre ce qu'il appelle le Créateur et ses créatures.
« Ma poésie ne consistera qu'à attaquer, par tous les moyens, l'homme, cette bête fauve, et le Créateur, qui n'aurait pas dû engendrer une pareille vermine. »

Choc d'une poésie en prose et en plusieurs chants, c'est-à-dire que c'est sous une forme antique que Maldoror s'attaque au Créateur et à ses créatures passant par des mots où l'esthétisme se dispute à l'horreur : les meurtres sont nombreux et rappellent les détails sanglants de la guerre de Troie dans « l'Iliade», où l'horreur même devient esthétique, la morale n'a pas cours et la seule morale qui prime est celle qu'impose Maldoror, excroissance maladive et imaginative de son auteur –créateur en second- dans ses choix de tuer, d'admirer, de dénoncer,. Comme Chateaubriand, on sent partout qu'on «lui a infligé la vie» et qu'il va le faire payer à Celui par qui tout est arrivé. Il apparaît d'ailleurs à un moment puisque Maldoror le provoque quasiment en combat singulier :
« Mais je ne me plaindrai pas. J'ai reçu la vie comme une blessure et j'ai défendu au suicide de guérir la cicatrice. Je veux que le Créateur en contemple, à chaque heure de son éternité, la crevasse béante. C'est le châtiment que je lui inflige. »
Maldoror participe du surhomme nietzschéen, le lion de Zarathoustra, celui qui s'impose, se révolte, et c'est par un cri en six chants qu'il le fait. La poésie en est extrêmement fouillée, imaginative, Lautréamont a absorbé les leçons de Baudelaire et du Rimbaud d'une Saison en Enfer et l'adapte en poésie lyrique, un peu hugolienne, où l'on sent que le souffle est infini tant la phrase est longue, il crée un monde nouveau à mi-chemin entre enfer et Eden fait de créatures qui ont une psychologie toute instinctive et poétique et constamment, il s'adresse au lecteur de 1874 (date de parution de l'ouvrage) soit pour s'excuser de son style parfois, soit pour le prévenir de ce qui va se passer. En ce sens, le début des Chants, renvoie un peu au début de la Divine Comédie où l'on dit en gros : « attention où vous mettez les pieds ! » car un guide va vous mener vers un gouffre, des régions encore inexplorées, dans un monde à part, un monde enfin à l'image de l'homme car la première création fut vraisemblablement une erreur.
Ne cherchons pas, dans les chants de Maldoror, une ligne narratrice ou même continue, chaque chant suffit sa peine et son lot de visions et de vitupérations, lisons le pour la beauté des mots choisis, le souffle absolu qui le parcourt pour nourrir notre propre révolte de notre condamnation à vivre.
«On ne me verra pas, à mon heure dernière (j'écris ceci sur mon lit de mort), entouré de prêtres. Je veux mourir, bercé par la vague de la mer tempétueuse ou debout sur la montagne… »

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Bible des surréalistes, dont il sera l'ouvrage de référence quelques 50 ans après sa parution, ces poèmes en prose regroupés en six chants forment un texte inclassable, cruel, hybride, ambigu, sulfureux, qui ne pouvait que séduire notre anglais aux yeux vairons.

Avis :
Depuis, Les Chants de Maldoror ne cessent de séduire ou de rebuter les lecteurs les plus intrépides. Une chose est certaine : ils ne vous laisseront pas indifférent !
Lien : https://delicesdelivres.go.y..
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Si ce livre a longtemps sombré dans l'oubli, il est aujourd'hui considéré comme un essai de psychologie avant l'heure et par d'autres comme l'idole des surréalistes.

Le livre peut sembler de prime abord quelque peu psychédélique, décousu. Néanmoins, après une étude plus approfondie du texte, une sorte de logique peut être trouvée. Cette logique peut être tordue par moments (par exemple les extraits sur les oiseaux reprennent presque au mot près des éléments de livres d'ornithologie car Lautréamont voulait faire un jeu de mots avec le double-sens de "vol"). Ce livre est finalement trop complexe pour être vraiment décrit en quelques mots, à moins de faire une dissertation. Je peux juste dire que les amateurs de psychologie ou les lecteurs d'ouvrages surréalistes devraient adorer cette lecture.
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A l'automne 1958 (j'avais 15 ans et demi), je devins interne dans une petite ville perdue en pleine province (les "territoires" ça n'existait pas). A l'époque, la pudibonderie était telle que la municipalité avait interdit la projection du film "Le blé en herbe" (d'après Colette) pour immoralité.
On me confia la bibliothèque du bahut. A ma disposition, un grand nombre de "Poètes d'aujourd'hui, " chez Séghers.
Lautréamont fut un des premiers que je parcourus.
Quand j'arrivais au passage où le chien de Maldoror viole la petite fille, il me sembla que la pièce dans laquelle j'étais se mettait à tourner-et pourtant je n'avais fumé aucun joint (je ne l'ai jamais fait -sans mérite particulier- :la pratique intensive du sport m'a toujours éloigné de ces Paradis pleins d'artifices..) Je posais le livre...
J'eus en ma possession l'édition de J.J. Pauvert, celle du livre de poche. Aujourd'hui je dispose du" Bouquins ", qui réunit Rimbaud, Cros, Corbière, Lautréamont. Je suis toujours surpris quand je compare préfaces et présentations, tant les angles d'attaques sont divers, voire opposés. Peut-être est-ce là ce qui fait la richesse de ces chants.
J'ai découvert, hier, un texte de René Crevel paru dans "Le disque vert" de 1925. C'est, pour moi, le plus bel hommage à ce jour, un véritable poème en prose offert au poète:

Lautréamont, ta bague d'aurore nous protège

"Je voudrais pouvoir adresser à Lautréamont un hymne de reconnaissance digne de lui. Au contraire, il me serait odieux, il me paraîtrait sacrilège d'essayer une mosaïque de cailloux critiques autour de Maldoror.
Le rythme qui me saoula, m'a-t-il mené jusqu'à la crête des vagues? Règne des tempêtes, l'écume s'achevait par les bouquets des plus beaux visages qui naissaient, s'épanouissaient et jusqu'au ciel se prolongeaient par la forêt de leurs désespoirs.
Une porte s'ouvrait sur la mer. Maldoror. Aurore du mal. Vésuve du matin, et cette fraîcheur criminelle des algues dans la chaleur même du volcan. Alors, nous avons connu le règne des choses disproportionnées. Une porte spontanément s'ouvrait sur la mer.
Lautréamont fut au seuil de la bouleversante amitié que je n'ai pu m'empêcher de vouer à des hommes, des esprits tels que Breton, Aragon, Eluard. de ce mystère je ne saurais rendre compte, ni, surtout, ne le veut. Mais comment oublier ce trouble et mes yeux qui pleuraient?
Beaux couteaux, les phrases glissaient entre les os de mon crâne. de mes tempes le sang coulait dans un flot de cloche.
Puisque je suis lâche à faire encore du bonheur un critérium, j'avouerai donc,
Lautréamont, de toi j'ai été heureux.
Lautréamont, ta bague d'aurore nous protège."

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Il m'est dans l'impossibilité technique de vous dire si j'ai apprécié ce livre ou non, tellement il est hors du commun, inclassable, insaisissable. Dès le début du bouquin, Ducasse nous met en garde ; on va en prendre plein la tronche. Et c'est réussi, cependant sur certains passages, la lecture peut s'avérer compliquée, quand des phrases prennent parfois une demi page, ce qui nous oblige à les relire depuis le début pour en comprendre le sens. Je vous avoue que j'ai commencé à saturer vers le 5ème chant ou la conceptualisation alambiquée de certains passages a eu raison de moi. Excepté cela, c'est un texte d'une intensité peu commune et d'une beauté froide qui rappelle un peu le style de Baudelaire, à savoir "accéder au beau par l'expérience de la laideur", faire du beau avec du laid. J'ai eu cette même impression, tout au long des chants. le personnage récurent des six chants, "Maldoror" est un être maléfique qui apparaît quasi tout du long, afin de semer mort et destruction, souvent en confrontation avec Dieu lui même, ce qui n'est pas sans rappeler un certain Lucifer du paradis perdu.
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