Je me tournai vers elle.
- Je suis un morphir, tu comprends ! Un grand destin m'attend dehors ! Est-ce Godinn qui va ouvrir ce plafond de ses propres mains pour me tirer d'ici ? Enverra-t-il un dragon me chercher à sa place ? Je l'ignore. Mais je suis sûr d'une chose : on ne me laissera pas moisir ici !
Sigrid me planta là, l'air mécontent. Mais elle revint bientôt sur ses pas.
- "Je, moi, mon destin à moi..." Tu ne penses qu'à toi, on dirait ! Et moi, ta fiancée, et nous tous ? Est-ce qu'il nous emmènera aussi, ton dragon ?
- Bien sûr, dis-je, un peu gêné.
- C'est heureux !
Un morphir, je le dis pour le lecteur étranger, est un individu timide, craintif, voire débile ! Il demeure longtemps la honte de sa famille. Et puis tout à coup, à la faveur d'un événement exceptionnel, il se "lève" et accomplit une action d'éclat, souvent une vengeance. À partir de ce jour, il ne cesse plus de faire parler de lui ; il devient le plus grand héros de sa génération.
Ah ! pensai-je, si seulement j'étais aussi fort dans la vie que dans mes rêves, face au garçon sans visage.
Pourquoi ne pas attendre la mort ici ? proposa mon père très sérieusement.
- Un jour poursuivit le roi sur un ton mystérieux, je t'appellerai pour une mission. Et tu viendras immédiatement... N'est-ce pas ?
- J'accourrai à ton appel, sire.
- Tu me plais, Bjorn le Morphir.