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Critique de BazaR


J'étais sorti du premier tome un brin mitigé, mais là j'adhère à fond !

Le décor, et l'ambiance qui y règne, n'ont rien à voir. Derrière ce « mur autour du Lieu » j'ai éprouvé la même sensation que dans un huis clos étouffant. Un désert, des tombeaux ancestraux et inquiétants, quelques eunuques et quelques prêtresses, c'est tout. A travers le point de vue de Arha, la jeune prêtresse « dévorée » par les Innommables, j'ai senti peser le silence, l'obscurité profonde de l'En-dessous des tombeaux, l'ennui qu'elle éprouve aussi. Les émotions des personnages sont assourdies, filtrées de leurs hautes fréquences, si bien que lorsqu'éclate l'éclat d'un rire j'ai eu l'impression de trop m'approcher d'une enceinte lâchant ses décibels.
Il est supposé à un moment que les Puissances Anciennes éteignent l'esprit et rendent fou. Je crois qu'un tel lieu n'a pas besoin de faire appel à une quelconque magie pour briser les esprits. Cela se comprendrait psychanalytiquement. Mais on est dans un récit de fantasy et la cause se doit être du domaine du fantastique.

J'ai été ravi de revoir Épervier. Mais cette fois ce n'est plus qu'à travers les yeux de Arha, puis de Ténar, qu'il apparaît. Il m'a donné l'impression d'un homme grand par sa sagesse et sa sérénité, puissant et pourtant vulnérable, loin des tourments qui le caractérisaient dans le tome 1. Il est plus âgé ici, certes, mais peut-être les éprouvait-il encore, qui peut le savoir ? Pas notre jeune héroïne chez qui il provoque un choc disruptif. J'ai supposé qu'elle découvrait en lui le père qu'elle n'avait pas vraiment eu, qu'il brisait en elle les barrages qui retenaient la petite fille apeurée qui a besoin d'un protecteur et d'un guide. Elle supporte mal l'idée qu'il sera obligé de la quitter, c'est une sensation proche de la trahison. La transition de la prêtresse dévorée à la jeune fille libre est lente, l'inertie des années d'éducation, de Destin inéluctable, est énorme.

Terremer se dévoile un peu plus : les terres Kargues avec leurs habitants à la peau étonnamment blanche et leur Dieu-Roi, mais aussi le passé avec l'histoire de Erreth-Akbe et de son anneau magique. Après le tour d'horizon du premier tome, on zoome sur quelques lieux et quelques temps. Je suis ravi de cette évolution. J'espère que, par la suite, les Contes de Terremer apporteront quelques autre petites touches pour affiner le dessin, comme Les chroniques de Majipoor avaient pu le faire après le château de lord Valentin de Robert Silverberg.

La collaboration est mise en avant et cela fait plaisir de laisser tomber l'esprit de compétition. Aussi fort que l'on soit, on a besoin d'autrui pour atteindre son but. Une sorte de paraphrase de Jean de la Fontaine dans le lion et le rat.

Ursula K. le Guin signe donc une suite bonifiant son premier jet, même si dans sa postface elle dit n'avoir pas prévu au départ de continuer son récit. Son élégante écriture est faite pour pénétrer les âmes des personnages. J'espère qu'elle continuera à me surprendre par la suite.
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