"On vit dans un monde de souvenirs jetables. Rien n'est fait pour durer, même pas la honte." (p.158)
On est tous perdus, malades, et on fait tous semblant de ne pas l'être, mais ça ne change rien : à la fin, on disparaît.
On pouvait bien se faire photographier chaque jour de son existence, songea-t-elle, sans jamais révéler la vérité sur soi-même – l'essence de son être – à ceux qui tentaient de la découvrir.
Aucun d'entre nous n'est spécial. Nous sommes tous éclairés de l'intérieur par une flamme unique, et lorsqu'elle s'éteint, lorsque la lumière déserte nos yeux, c'est comme si nous n'avions jamais existé. Nous ne sommes pas propriétaires de la vie, nous ne faisons que l'emprunter.
"Un homme n'est jamais que la somme des histoires qu'il raconte sur lui-même, dont la plupart sont des mensonges." (p.11)
Quand elle tira sur son mari, elle se trouvait sur un bateau dans le port de Boston. Son époux demeura encore debout un temps infinitésimal - sept secondes ? dix ? - avant de basculer par-dessus bord.
Mais durant ces ultimes secondes, ses traits reflétèrent toute une gamme d'émotions.
La stupeur d'abord. Ensuite, l'auto-apitoiement et la terreur. Une vulnérabilité si totale qu'elle effaça d'un coup trente années de sa vie et le transforma en gamin désemparé.
Et la colère, bien sûr. L'indignation.
Une détermination soudaine et farouche, comme si, alors que le sang jaillissait de son cœur et coulait sur sa main plaquée dessous, il parvenait encore à se convaincre que tout irait bien. Il allait s'en remettre, il s'en sortirait. Il était solide, après tout. Il avait su créer par la seule force de sa volonté tout ce qui avait la valeur dans sa vie, il n'aurait qu'à la mobiliser de nouveau pour sortir de ce mauvais pas.
Puis, peu à peu, la certitude: Non cette fois, il ne réussirait pas.
Pour gagner, il faut refuser de perdre.
On vit dans un monde de souvenirs jetables. Rien n'est fait pour durer, même pas la honte.
Cette quasi-obscurité inhabituelle semblait porteuse d'une vérité à laquelle les citadins évitent en général de penser: Nous ne sommes pas préparés à la plupart des formes de survie. Du moins, pas en l'absence de tout confort.
On vieillit devant le regard des autres mais bizarrement on est les derniers à le savoir.