AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Marina Heide (Traducteur)
EAN : 9782366247350
Cambourakis (04/01/2023)
3.75/5   12 notes
Résumé :
Lorsque Simon, physicien à présent retraité, commence à perdre prise avec la réalité et l'usage de la parole, son épouse Eva, avec laquelle il vivait depuis des décennies, s'efforce de composer avec ce silence nouveau qui investit son quotidien. Dès lors, le passé se rappelle immanquablement à elle. Et avec lui, ces lourds secrets qu'elle et son mari se sont efforcés de conserver l'un pour l'autre sans jamais les dévoiler à leurs filles. Tandis qu'elle s'en trouve d... >Voir plus
Que lire après Quelques jours dans l'histoire du silenceVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Quelques jours dans l'histoire du silence….. l'épopée tragique d'une relation de couple vieillissante qui s'enfonce dans le silence. Simon, physicien à la retraite ne parle plus, ne partage plus rien avec sa femme.
“ J'ai le sentiment que ce silence et l'absence de Marija sont liés . Si elle n'était pas partie tout serait resté comme avant”; la relation avec l'aide ménagère Marija et son renvoie, et le passé douloureux de Simon refond surface en bribes instaurant le suspens…..Alors que la narratrice, Eva, la femme de Simon nous commence à révéler aussi ses propres secrets, le contexte , l'atmosphère deviennent de plus en plus lourd et complexe. Pourtant Eva semble maîtriser la situation avec sang-froid ,analysant presque cliniquement son couple et son évolution dans le temps, ce temps qui semble soudain s'être arrêté ,”L'important, c'est de s'habiller, d'aller aux toilettes , de manger de boire, de parler. Peu importe que tout le reste soit douloureux… » . Elle arrive même à se justifier le silence de son mari, “J'ai eu le sentiment que ce silence avait toujours sommeillé en lui, derrière tout le reste, la maison, les enfants , ces années d'agitation. Que petit à petit, le silence a remonté à la surface, que des bouleversements extérieurs l'ont fait émerger.”

Merethe Lindstom grande écrivaine norvégienne nous plonge ici dans un drame familiale qui révèle les effets dévastateurs du silence maintenu au profit de la paix , du sentiment de la culpabilité éprouvé pour des circonstances inévitables, et de l'incontournable vieillissement physique et cérébral. Ce dernier chargé des séquelles d'un passé douloureux où les destinées individuelles ont inévitablement étaient touchées par la grande Histoire, va rendre difficile à Eva à cerner où s'arrête la normalité et le reste. le reste ici étant une sorte de désert où la personnalité s'efface. Ce récit profond et analytique, non linéaire, pose aussi la question de l'identité. L'épisode de l'amie de la mère de Simon qui essaie d' inculquer à Simon enfant «  quelque chose qui ne leur appartient pas », ne respectant pas leur identité, est éprouvante. Non respect de « Ce qu'ils étaient au fond d'eux », comme objecte le père de Simon, alors que pour Simon jeune à l'époque, la question est totalement différente « Qu'est-ce-qu'on est ? »
Bizarre , bizarre cette famille, aussi bien Simon, Eva que leurs filles….. Les silences et la culpabilité, sentiment cousin de l'angoisse sont les deux moteurs de ce récit où Lindstrom nous déboussole au fur et à mesure qu'on avance dans l'histoire, et dont le noeud qui ne se dénouera qu'à la fin, nous en laissera perplexe.

Une prose lumineuse et puissante, un roman profond récompensé par le grand prix de littérature du Conseil nordique et le prix norvégien de la critique littéraire à sa publication en 2011. C'est son deuxième livre que je lis, considérée comme l'un des meilleurs écrivains norvégiens contemporains, une auteure qui mérite d'être connue, donc dommage vu que très peu de lectrices et lecteurs sur Babelio ont apparemment eu accès à ses livres.

« A part moi, personne ne sait qui nous sommes. »
Commenter  J’apprécie          9313
Pauvre femme, que cette Eva ! Et que cette auteure décrit bien l'attitude de cette épouse âgée devant le mutisme de son mari survenu il y a peu ! Pas un mutisme vindicatif, non, juste un lent effacement dû à un cerveau qui se délite, à un coeur qui est trop lourd d'avoir eu trop mal. Ce médecin estimé dans son quartier, bon époux, bon père de famille de trois filles, a connu un passé douloureux car il est Juif, et la deuxième guerre mondiale était passée par là, du temps de son enfance.

Le problème très bien relaté dans ce roman, c'est l'incapacité à parler : de soi, de ses doutes, de ses peurs, de ses déceptions, de ses défaillances intimes, et même des simples phrases quotidiennes qui impliquent davantage que le quotidien.

Autant le mari que sa femme ne savent parler. Car Eva aussi a un gros secret… Comme elle est la narratrice, elle nous le livre, ce secret, en même temps que ses gestes quotidiens tout entiers dans l'inquiétude – où est son mari, est-ce qu'il pense à quelque chose ?, la voit-il encore ? Mais on voit clairement sa difficulté à se livrer, notamment par l'emploi très fréquent de « je ne sais pas », « peut-être », « j'aurais dû lui dire, mais je ne l'ai pas dit » (quelquefois, j'avais envie de la secouer ! )

Cette incapacité à se livrer mènera à l'incompréhension de la part des trois filles, non dénuée de tendresse. Et cette incompréhension sera décuplée après le fait particulier survenu à propos de la femme de ménage, qui était devenue une amie.

Ce roman est lent, et j'ai apprécié sa lenteur. Il est intime tout en laissant une part inexplorée. Il est émouvant sans donner à pleurer. Il est …
Je n'en dirai pas plus, pour une fois ce sera moi qui ne parlerai pas.
Tout bonnement, j'ai adoré.

" J'ai eu l'impression que ce silence avait toujours sommeillé en lui derrière tout le reste, Que petit à petit, le silence est remonté à la surface, que des bouleversements extérieurs l'ont fait émerger. Comme les mouvements du sol peuvent peu à peu faire apparaitre des cailloux, au printemps. Voilà ce qui m'effraie autant. Est-ce que c'est absurde ?"

Merci à ma chère Idil de m'avoir fait découvrir ce condensé d'intimité, de pudeur et de coeur.
Commenter  J’apprécie          241
J'aurais un peu tendance à écrire encore une histoire de vieux qui perdent la tête. Mais ce serait un peu méprisant pour un roman qui est assez original et qui a reçu moult récompenses dans son pays. Tout d'abord, il se passe en Norvège et les liens entre les différents personnages sont assez exotiques pour la Française que je suis. Je me sens tout à coup très latine et j'ai envie de parler fort, d'éclater de rire et de me moquer des gens, ce qui ne se fait pas du tout en Norvège . La retenue, le respect entre voisins (jusqu'à les ignorer complètement en dehors du « bonjour » obligatoire), le respect des choix des enfants et surtout ne pas les encombrer avec le passé des parents, tout cela m'a semblé si loin de moi. Et par voie de conséquence cette histoire tragique me semblait comme aseptisée.

Et pourtant, tout au long du récit, on découvrira le tragique passé de Simon ancien médecin : il a été avec sa famille caché pendant la guerre car ils étaient juifs. Cet enfermement pendant quatre ans dans un très petit espace et le silence imposé aux enfants pour ne pas alerter les voisins, Simon pensait que cela ne le concernait plus et il n'a jamais voulu en parler avec ses propres enfants qui apparemment ne savent rien de son passé. Sa femme, Eva, a aussi un lourd secret : elle a abandonné son premier enfant qu'elle avait eu trop jeune.

Ils sont vieux maintenant et Simon s'est enfermé dans un silence que rien ne peut rompre. Eva sent que l'abandon de cet enfant lui revient de façon très forte en mémoire. Nous sommes avec elle tout le temps ; elle analyse avec rigueur tout ce qui se passe dans leur quotidien. Dès le départ on sait qu'ils ont été amenés à se séparer de Marija une femme de ménage lettonne. Enfermé dans ce silence tellement pesant, ils ne veulent ni ne peuvent en dévoiler la cause à leurs enfants, car cela a un rapport avec ce passé qu'ils ont tu. . Eux, ne comprennent pas pourquoi cette femme qui était devenue l'amie de leur parents – et dont la présence auprès d'eux les rassurait – a été licenciée du jour au lendemain. le quotidien d'Eva est fait de visite dans un cimetière, dans une église, de retour dans son passé et celui de son mari, mais surtout de sa volonté de comprendre et briser le silence dans lequel Simon s'est enfermé.

C'est une lecture triste et réaliste. On ne peut s'attacher à aucun personnage , mais cela n'empêche pas que ce roman se lise facilement, comme Eva on voudrait tant que Simon sorte de l'état dans lequel la vieillesse l'a enfermé peut être à cause du poids de tout ce que ni lui ni sa femme n'ont réussi à dire à leur entourage.


Lien : http://luocine.fr/?p=16440
Commenter  J’apprécie          20
Simon, Eva et leurs trois filles. Une famille unie et tranquille. Pourtant chaque page de ce roman de Merethe Lindstrøm va nous révéler des secrets et des non-dits. Nous arrivons dans leur histoire alors que Simon et Eva sont à la retraite et que Simon perd pied avec la réalité quotidienne. Chaque page nous délivre un peu de leur vécu et des évènements tragiques que chacun a traversé et qui a marqué le restant de leur vie avant même qu'ils se rencontrent. D'une part un jeune juif dont toute une partie de la parentèle a disparu sans laisser de traces durant la seconde guerre mondiale, et l'obsession de l'enfermement vécu pour échapper aux nazis. Il n'a jamais parlé à ses enfants de sa judéité ni de cette période de sa jeunesse. D'autre part, le secret d'Eva, qui à peine adolescente s'est retrouvée jeune mère et a abandonné l'enfant pour lequel elle ne ressentait aucun attachement. Puis nous découvrons sa solitude quotidienne maintenant que Simon ne communique plus avec personne et qu'elle est gardienne de leurs secrets. Voilà un ouvrage bien écrit, attachant, mais réellement très déprimant.
Commenter  J’apprécie          10
Voilà un livre qui fait réfléchir, sur les non dits dans un cercle familial qui m'a l'air bien sur tout rapport.
Simon médecin de profession , qui a un lourd passé se réfugie dans un certain mutisme, tel la maladie d'Alzheimer.
Eva sa femme qui a un lourd secret, se retrouve seule a essayé de trouver un être a qui se confier tel sa femme de ménage ou le pasteur de l'église du coin.
Ce secret qui gâche leur quotidien et qui peut mettre en danger la relation qu'ils ont avec leur trois filles.
Ce livre fait réfléchir , je ne connaissais pas l'auteure, mais j'apprécie sa plume , son écriture, son histoire. Merci Merethe Lindstrom pour ce merveilleux livre.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Chercher quelqu’un à qui demander de l’aide, ça donne le sentiment de se mettre à nu.
Commenter  J’apprécie          402
J’aurais voulu l’abandonner dès le premier jour, mais quelqu’un ma mère ou mon père je crois, avait estimé que maintenant que je m’étais mise dans cette situation, je devais prendre mes responsabilités. Aussi étais-je là, avec lui. Lui me réclamait, mais je ne voulais pas de lui.

Par moment peut-être quand il dormait ou me regardait sans rien exiger, je pouvais éprouver un certain apaisement, oublier un instant la honte et la colère, le découragement. Une nuit qu’il était malade, je l’avais contre moi, le médecin avait dit que je devais le prendre, le garder dans mes bras. Il s’endormait, sursautait, se rendormait. Quand il s’est réveillé, nous nous sommes regardés. Une seconde, j’ai cru qu’il allait sourire, un frémissement au coin de la bouche.
Aussitôt, je l’ai remis dans son lit. Par peur, sans doute, peur que ça change quelque chose, qu’il se faufile à l’intérieur, trouve une place dans mon cœur et s’y installe pour de bon. Que je ne puisse plus ignorer son existence, ses exigences, ses cris. Je l’ai laissé hurler.
Commenter  J’apprécie          20
Marija me disait qu’elle aimait faire le ménage. Elle se glissait dans les maisons et les appartements avec la clé qu’on lui avait remise ou qu’il attendait caché quelque part, et elle faisait le tour des pièces avec un aspirateur et une serpillière. En général, il n’y avait personne, aucune instruction. Peu de ces endroits étaient crasseux en réalité mais elle s’appliquait toujours autant. Les gens qui habitaient là, elle les entrevoyait à peine, ils ne laissaient derrière eux qu’un cheveux quasiment invisible dans le lavabo, un torchon en boule dans la cuisine, une paire de baskets dans l’entrée. Et bien entendu, son salaire laissé dans une enveloppe sur la cheminée ou sur la table, ou dans de rares cas comme chez nous directement sur son compte en banque. Il lui arrivait de trouver une pièce de monnaie laissée volontairement quelque part ou une peau de banane tombée du sac poubelle une sorte de test m’expliquait-elle.
Commenter  J’apprécie          20
Ils ont le même profil, c’est forcément son père, à ceci près que le fils a une grosse tête et un double menton. Son père lui indique où s’asseoir, ils se mettent toujours côte à côte dans les premiers rangs, près la sortie. Juste avant le générique, quand la musique indique la fin de l’histoire, le père attrape le blouson de son fils et le fait de pencher pour lui enfiler son vêtement, comme à un enfant, le garçon a toujours les yeux rivés sur l’écran, et des qu’apparaissent les premiers noms, il prend son fils par la main et l’emmène vers la sortie. À chaque fois, c’est le même rituel. Le jeune homme se laisse faire, tourné vers l’écran jusqu’à la dernière seconde. Dans la manière qu’a ce père d’entraîner son fils dehors avant que la lumière ne revienne, il y a une forme de prévenance cruelle.
Commenter  J’apprécie          00
Il y a quelque chose qui ne cesse de m’étonner chez la fille que je vois sur ce portrait de moi-même : le temps ne semble pas avoir laissé son empreinte sur elle. Comme si, au moment du cliché, il n’y avait pas de passé. Pas de passé derrière cette jeunesse, on dirait. À croire qu’il existe une démarcation entre tout ce qui arrive et tout ce qui est arrivé, une démarcation claire et nette, comme un mur derrière lequel se retranche le passé, oublié.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : absence de communicationVoir plus

Autres livres de Merethe Lindstrøm (2) Voir plus

Lecteurs (23) Voir plus



Quiz Voir plus

Correspondances artistiques (1)

D'une Joconde à l'autre, séparément et chacun à sa manière à des dates différentes, deux artistes français ont célébré Mona Lisa en chanson (indice : Aigle et tête de choux) :

Serge Gainsbourg et Léo Ferré
Léo Ferré et Anne Sylvestre
Barbara et Serge Gainsbourg

10 questions
274 lecteurs ont répondu
Thèmes : peinture , musique , histoire de l'art , Instruments de musique , musiciens , art , artiste , symphonie , mer , Japonisme , impressionnisme , sécession viennoise , Abstraction , Côte d'Azur (France) , romantisme , pointillisme , symbolisme , Pique-niques , joconde , leonard de vinci , renaissance , culture généraleCréer un quiz sur ce livre

{* *}