— Je sais que votre barbe est splendide, mais tout de même, après vous être comparé à un chien, seriez-vous maintenant en train de vous comparer à Jésus de Nazareth ?
— Je dis simplement qu’il n’était pas plus parjure que nous ne sommes sodomites…
— Oh ! vous savez, moi, je ne vois pas la sodomie comme un acte diabolique. Il m’arrive même de la recommander aux dames qui veulent se prémunir contre l’enfantement, et, pour ma part, je préfère grandement deux hommes qui s’enculent à deux qui s’entretuent. Si j’avais dû faire, moi, le procès de votre Ordre, c’est bien tout le sang qu’il a sur les mains que je lui aurais reproché, et non pas ses mœurs supposées. Nous vivons une drôle d’époque où l’on sanctifie celui qui égorge allègrement les infidèles et où l’on brûle celui qui pédique.
Livre I, chapitre 35.
Si Orléans n’était pas aussi vaste et aussi splendide que la capitale, elle était toutefois une cité riche et vivante, pleine de clameurs, de parfums et de couleurs. […]
L’approche du printemps redonnait aux habits des teintes plus joyeuses et un esprit festif accompagnait la fin de l’hiver, comme en témoignait le retour des jongleurs et des ménestrels sur la chaussée. En chemin, Andreas et Robin croisèrent de part et d’autre des rues étroites, où pullulaient hommes et animaux, une foule de commerçants et d’artisans qui s’activaient derrière leurs auvents, un tonnelier qui mettait un fût en perce, un tailleur qui ajustait et découpait des habits bariolés sur son étal, un boucher couvert de sang tranchant une belle cuisse de bœuf sous le regard de grosses bonnes femmes affamées, un mercier, un barbier rondouillard, un potier, un forgeron aux muscles trempés de sueur, un menuisier barbu, des marchands ambulants qui poussaient leurs charrettes en criant leurs prix, des enfants qui jouaient à la toupie au pied des maisons à colombages, des groupes d’étudiants hilares, livres sous le bras, des pèlerins épuisés et maussades, une procession religieuse priant pour repousser les démons hors de la ville, des porcs fouillant de leur groin dans les immondices, deux chariots qui s’étaient renversés en se croisant, des porteurs d’eau grands et maigres, quelques fillettes peu vêtues, et des mendiants, toute une faune, en somme, qui n’était pas sans rappeler la Merveille parisienne, une forêt humaine bruyante, puante et agitée.
Livre II, chapitre 75
Peut-être devrai-tu arrêter de subir une vie qui n'est pas la tienne, et commencer celle qui te donner satisfaction. Tu as deux routes possibles, mon enfant. Celle qu'on ouvre pour toi, ou celle que tu te dessineras toi-même." (p.163)
"Il y a ce que l'on sait, il y a ce que l'on ignore et il y a ce que l'on s'efforce d'ignorer. Un être est la somme de tout cela." (p.503)
Partout où l’Église avance, la science recule !
[Livre III, Chapitre 120]
...tout livre qui disparait, c'est un peu d'humanité qui s'en va.
Le visible ouvre nos regards sur l’invisible.
(Anaxagore)
Livre II, Chapitre 83.
[…] qui a déjà voyagé longuement avec des amis sait combien l’épreuve nous rapproche et combien elle nous pousse aux plus grandes confidences, car sur la route et dans l’effort se nouent des liens uniques, peut-être parce que l’on n’a jamais autant besoin de liens que dans ces moments où l’on n’a plus d’attaches.
Livre III, Chapitre 119.
Ses yeux noirs, soulignés de cernes épais, brillaient d'un reflet d'argent, comme si deux petites lunes d'hiver, la nuit de sa naissance, étaient venues se graver à jamais au bord de ses pupilles.
Bernard de Chartres disait que les savants d'aujourd'hui, s'appuyant sur les grands penseurs du passé, sont nanos gigantium humeris insidentes. Des nains sur des épaules de géants.