Les étrangers s'étonnaient de notre insouciance. Les malheureux n'avaient pas au compris qu'au Congo si on danse pour courtiser, pour célébrer la lune, la moisson, le nouveau-né, le mariage, on danse aussi pour exprimer sa tristesse. On danse pour prier. On danse pour pleurer ses morts. On danse pour se recréer, on danse pour dire sa mélancolie. Selon la manière dont on remue sa ceinture, la rumba exprime la joie ou le chagrin.
Page 103, éditions Gallimard
Chez nous, on ne rompt pas à la suite d'une colère. Quand la tornade de la palabre éclate, que soufflent les vents, que la pluie lave à grande eau, la lumiere revient , on quitte guéri l'arbre à palabres et la famille se ressoude.
...les constitutions reflétaient plus les vœux de leurs auteurs que la réalité d'un pays
Je la mettais en garde contre une grossesse, qui compromettrait ses études et notre projet d'aller un jour là-bas, sur le Boul'Mich', comme Césaire et Senghor. J'ajoutais qu'accoucher un métis, dans un pays indépendant, où il faudrait de plus en plus donner la preuve de son patriotisme et de ses origines, c'était s'attacher un boulet à la cheville.
Mon fameux cousin m'assurait que les miliciens n'en démordaient pas. Ils avaient été l'objet d'une attaque par des êtres étranges à la double apparence : humaine et animale. Malgré leur peau noire, les Cubains ne parvenaient pas à comprendre ; ils n'avaient pas, les malheureux, l'esprit bantou. Pour comprendre ce phénomène il fallait avoir été circonscris, connaître le sens des masques et des statues, avoir été éduqué dans nos contes, mythes et légendes.
Les écrivains ressemblent dans les séances de dédicace aux putains exposées dans les vitrines des bordels d'Anvers. Le client les détaille, les apprécie, les évalue, les compare, s'en va, s'en revient et, profitant d'un moment où la rue est déserte, pénètre sournoisement dans la maison.