L'autour est initialement décrit comme une créature presque mythologique, « fatale, féérique, férale, féroce et cruelle », mais cette vision change avec l'arrivée de Mabel qui va faire mentir quelques idées préconçues. Mabel n'est pas une créature inaccessible, elle est réelle : elle joue, elle peut avoir peur comme elle peut être heureuse d'un rayon de soleil.
Le lien qui se crée entre Helen et Mabel est extrêmement fort et leur relation est viscérale (enfin, surtout pour Helen, je suppose…). L'auteure compare même cette attache à celui qui unit les humains et leur daemon dans la trilogie de Philipp Pulman, A la croisée des mondes. Elle nous fait également fortement ressentir la magie des premières fois : la découverte que Mabel aime jouer, le premier saut sur son poing, etc.
Je ne connaissais rien à la fauconnerie, j'ai découvert dans ce livre tout un univers avec une culture, un vocabulaire spécifique, hérité des siècles précédents. On apprend beaucoup de choses sur les rapaces et j'ai vraiment trouvé ça passionnant, jamais pesant ou barbant.
J'ai été touchée par la manière dont elle parle de la nature, de sa relation avec les bois et les oiseaux. C'est véritablement envoûtant. Les paysages, les bruits, les odeurs… tout semble incroyablement réel.
Pourtant, la chasse – même la fauconnerie – me dérange. Je ne parviens absolument pas à concilier un amour de la nature et des animaux avec la chasse.
Ce roman ayant écrit des années après les événements, l'auteure a alors acquis suffisamment de lucidité pour analyser ses choix, ses réactions, les étapes par lesquelles elle est passée à la suite de la mort de son père. Elle se penche sur la dépression qui a suivi, sur l'isolement qu'elle a recherché, sur la manière dont elle s'est identifiée à l'autour ainsi que sur ce qui lui a permis d'ouvrir les yeux et de remonter la pente. Si le roman est touchant à ce niveau-là, ce n'est pas cet aspect qui m'a le plus émue. Je dois même avouer avoir été parfois légèrement agacée par l'égocentrisme de l'auteure.
Enfin, j'ai également aimé la manière dont elle entremêle son histoire avec celle de
Terence Hanbury White (1906-1964), auteur de romans de fantasy, qui a lui aussi tenté de dresser un autour nommé Gos. Une expérience catastrophique dont il tira un livre, The Goshawk, et qui m'a révoltée à plusieurs reprises.
Récit de fauconnerie, roman sur le deuil et la résilience, souvenirs d'enfance, biographie de
T.H. White ?
M pour Mabel est un peu tout cela. On se laisse embarquer par cette écriture poétique sans forcément savoir dans quoi on s'engage. Et c'est très réussi. Dès le premier chapitre, j'ai ressenti un immense enthousiasme pour cette histoire, enthousiasme qui n'a pas faibli.
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