Charmante soirée, dit Marc en se déshabillant. Une agression...dont j'ai manqué faire les frais, un type dans le jus, l'interrogatoire au troisième degré d'une appétissante blondinette, la mise knock out et le garrottage d'un de vos alliés, l'entrée par effraction dans le logement d'un assassin décédé et fouille dudit. Avec vous, on ne s'embête pas.
J'ouvrais le télégramme de Faroux.
Il n'existe pas de 120 rue de la gare, disait-il.
Le train s'était ébranlé. Aux portières, les libérés agitaient leurs coiffures. La gare retentissait de mille bruits qui furent tous couverts par une tonitruante Marseillaise. Colomer avait sauté sur le marchepied, cramponné des deux mains à la fenêtre. Soudain, son visage se crispa, comme sous l'effet d'une intolérable douleur.
- Patron, hurla-t-il. Patron... 120, rue de la Gare...
Il lâcha prise et roula sur le quai.
Alors, je vis déboucher sur le quai un personnage que j’aurais reconnu entre
mille. Il avait une casquette claire de sportif, un pardessus en poils de chameau et
il marchait vite, comme s’il eût foncé sur un obstacle, une épaule en avant.
Indéniablement, c’était là Robert Colomer, mon Bob de l’Agence Fiat Lux, selon
le diminutif qu’il avait récolté dans les bars des Champs-Élysées.
J’abaissai vivement la vitre et me mis à hurler, en gesticulant :
— Colo… Hé ! Colo…
Il tourna vers moi son visage légèrement patibulaire1
.
Il ne parut pas me voir ou me reconnaître. Avais-je donc tant changé ?
— Bob, repris-je. Colomer… Tu ne remets plus les copains ?… Burma… Nestor
Burma… qui revient de villégiature2
…
Il était auprès d’une dame de la Croix-Rouge. Il lâcha un retentissant juron et la
bouscula.