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Critique de JacobBenayoune


Si le héros de la Mort à Venise est parti en vacances, ce n'est pas le cas pour le lecteur. Ce dernier doit affronter un texte exigent, très dense, très profond et compliqué par son style et ses idées.

Thomas Mann (lui le grand écrivain célèbre et admiré) nous présente un exemple du combat entre Dionysos et Apollon où un auteur qui s'est acharné d'un travail "spartiate" pour se faire un chemin dans la gloire littéraire avec des oeuvres majeures, sent un besoin cuisant d'interrompre cette vie et de voyager. "Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage" comme l'a bien dit Du Bellay. le héros va faire ce voyage à Venise, pour y découvrir la beauté et non comme Rimbaud, il la trouvera délicieuse. Un séjour à arrière-plan mythologique et artistique. Cet écrivain est subjugué par un chérubin qu'il poursuit partout au risque de succombé à cette épidémie qui ravage Venise:
"Tel l'enfant, par un fleuve attiré pas à pas,
S'y mire, s'y lave et s'y noie." (V. Hugo)

C'est un très beau texte (bien écrit, avec un style mythologiquement ficelé et ciselé) sur l'écriture et son exigence parfois étouffante, la peur de vieillir, l'amour interdit, le sacrifice pour l'amour (qui m'a fait penser à cette idée singulière qu'aimer est plus important, plus beau qu'être aimé) et la mort.

Voici pour finir, ce que dit Mann lui-même sur son livre :
"L'histoire est essentiellement une histoire de mort, mort considérée comme une force de séduction et d'immortalité, une histoire sur le désir de la mort. Cependant le problème qui m'intéressait surtout était celui de l'ambiguïté de l'artiste, la tragédie de la maîtrise de son Art. La passion comme désordre et dégradation était le vrai sujet de ma fiction.

Ce que je voulais raconter à l'origine n'avait rien d'homosexuel ; c'était l'histoire du dernier amour de Goethe à soixante dix ans, pour Ulrike von Levetzow, une jeune fille de Marienbad : une histoire méchante, belle, grotesque, dérangeante qui est devenue La Mort à Venise. À cela s'est ajoutée l'expérience de ce voyage lyrique et personnel qui m'a décidé à pousser les choses à l'extrême en introduisant le thème de l'amour interdit. le fait érotique est ici une aventure anti-bourgeoise, à la fois sensuelle et spirituelle."
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