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Critique de kielosa



Selon l'éditeur, Albin Michel, ce roman relate "l'odyssée tragique de la diaspora arménienne en Russie"
C'est effectivement tout à fait cela, car l'action se passe essentiellement à Erevan, la capitale de la république soviétique d'Arménie, et Iakoutsk en Sibérie, la ville la plus froide du monde, entre 1947 et 1960.

Point besoin de présenter ici Patrick Manoukian, alias Ian Manook, né à Meudon en 1949, comme Aznavour d'origine arménienne, et très apprécié sur Babelio avec 21 livres et 1045 critiques, parmi lesquels "Yeruldelgger" de 2013, en tête.

Ce roman fait suite à "L'oiseau bleu d'Erzeroum" sur le génocide arménienn, paru l'année dernière et qu'il vaut mieux lire d'abord, puisqu'il nous présente la survie miraculeuse des massacres de 1915 des soeurs Araxie et Haïganouch.

Sur le génocide arménien, toujours contesté par les autorités turques, j'ai fait le 3 avril 2018 un billet de l'ouvrage important de Taner Akçam "Ordres de tuer : Les télégrammes de Talaat Pacha". Talaat était le grand vizir ottoman et organisateur principal du génocide, tué à son tour à Berlin par un étudiant arménien, en 1921.
Ces ordres prouvent la responsabilité des Jeunes-Turcs dans l'opération atroce d'annihilation de tout un peuple durant la Première Guerre mondiale, quoique puisse en penser aujourd'hui monsieur le président Erdoğan.

Le récit proprement dit commence par le départ en bateau de Marseille du fils d'Araxie, Agop Tarpinian, vers l'Arménie, qui sous contrôle des bolcheviques sous la conduite du meurtrier de masse Staline (1878-1953) et son horrible acolyte, le chef du KGB Lavrenti Beria (1890-1953), ressemble plutôt à un grand camp de prisonniers, où règnent la famine et l'arbitraire.

Relativement vite, Agop envisage un retour rapide en France, vers sa douce moitié et leurs 2 enfants, Anaïd, 13 ans, et Josig 11.
Seulement, sortir du bloc soviétique est loin d'être simple. Les frontières sont "hermétiques et meurtrières"....

Simultanément avec le pénible séjour d'Agop à Erevan, nous suivons les événements tragiques auxquels se trouve confrontée sa tante, la poétesse aveugle Haïganouch, en Sibérie, où son époux Pliouchkine est assassiné par l'aide de Beria, l'affreux Anikine.
Dans cette taïga immense le long du fleuve Léna gelé, c'est la poésie de Viktor Dodourov, Marina Tsvetaïeva et Anna Akhmatova qui la font tenir debout.

À un officier russe de passage, la pauvre Haïganouch déclame un chant de son enfance :
Je demande à la lune
D'avaler cette triste nuit
Et au soleil lui aussi
De brûler cette infortune.
(page 120).

Rien que pour la beauté poétique de la langue d'Ian Manook, ce roman, paru le 28 septembre dernier, mérite tout le succès qu'on connut ses best-sellers précédents.
Il s'agit, en plus, d'une page d'histoire hautement dramatique et fort méconnue dans nos régions.
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