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Critique de BazaR


BazaR
12 février 2022
Mais qu'est-ce que je fus bête de snober la collection du Livre d'Or de la science-fiction en son temps !

Après Heinlein, j'ai essayé un auteur que je ne connais pas du tout : Richard Matheson. Cela se confirme, la collection est vraiment un bon moyen de le découvrir.
L'éditeur du Livre d'or – Daniel Riche – focalise sa description du personnage sur un point précis : Matheson n'aimait pas la science-fiction. Il était publié sous cette étiquette mais c'était pour mieux la tourner en dérision. Il n'acceptait pas l'emprise de la science dans la société. Il l'imaginait comme ayant une emprise dictatoriale qui ignorait superbement des aspects de la réalité. « Si elle n'envisage pas tous les phénomènes, la méthode scientifique est irrecevable. L'astrologie est une réalité. Les OVNI existent. Les phénomènes parapsychologiques existent. On ne peut mettre ce genre de choses à l'écart et les ignorer. » écrit-il dans sa profession de foi « Ce que je crois » en 1980.
Daniel Riche ajoute « Tout peut arriver. L'homme n'y peut rien. Les mathématiques non plus. C'est ce qui différencie Matheson des autres écrivains de science-fiction, en particulier de ceux des années 50, car ces derniers penchaient, pour la plupart, soit pour l'homme (Bradbury), soit pour les mathématiques (Asimov). En d'autres termes, ils avaient besoin d'un étalon, d'un Ordre, d'une Loi. Matheson, lui, s'en passe fort bien ».
Richard Matheson écrivait donc de la science-fiction mais pour la transformer en fantastique ou épouvante.

Bon. Soit. A peu près tout ce qu'il faut pour me faire fuir un auteur aux antipodes de ma propre pensée.
Et pourtant, quel fabuleux écrivain !
Un maitre de la chute qui désarçonne, du retournement de situation qui oblige à réinterpréter ce que l'on croyait avoir compris. Un champion du suspense, du thriller, manipulant les sensations fortes sans gants de protection.
Voilà ce que j'ai ressenti à la lecture des récits de ce recueil.

Le « voile » de science-fiction est bien là. Dans cette espèce de mutant monstrueux enfermé à vie dans la cave et écrit son « journal » dans un style très primaire (« Journal d'un monstre » - 1951). Dans cette invasion d'esprits extraterrestres qui prennent la place de ceux ces humains en les annihilant via les contes et légendes (« Les déséritiers » - 1953). Dans la folie qui cohabite avec la sérénité fataliste lors du dernier jour avant la fin du monde (« le dernier jour » - 1953). Dans cette mère qui refuse la mort de son fils au point de demander à son mari de transférer son esprit dans un corps de métal (« Lazare n°II » - 1953). Dans cet extraterrestre à mi-chemin entre Alien et Cthulhu qui trouve sa pitance de manière épouvantable (« le zoo » - 1954). Vous le sentez, la science n'a pas droit à la parole dans ces récits, ou si peu.

Mais Matheson prend parfois le contrepied de sa propre conception, en rationalisant une histoire dont tous les éléments nous démontraient l'aspect fantastique (« Rien de tel qu'un vampire » - 1959) ou en racontant comment un individu peut transformer un quartier tranquille de banlieue aisée en enfer où tous les voisins se haïssent sans aucune once d'imaginaire (« le distributeur » - 1958).
Daniel Riche lève aussi le voile sur d'autres activités de Matheson. Il nous offre une nouvelle style western du genre « qui de nous deux tire le plus vite » (« le conquérant » - 1954) et un scénario de film d'épouvante plutôt angoissant (« Bobby » - 1977).

Vraiment un choix de récits courts, percutants et succulents. Je n'ai plus qu'à m'attaquer à ses romans maintenant. Je commencerai avec L'homme qui rétrécit.
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