AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,71

sur 140 notes
Quelle semblait parfaite cette famille sur la photo !!! Mais si l'on va au delà des apparences ... et bien ce n'est pas très reluisant. Et oui elle est détruite, éclatée, explosée ... tellement de non dits, de préférences, de jalousie, de déceptions... Seule la mère espère réunir ses enfants coûte que coûte, malgré les agendas chargés, les tensions. Elle a organisé un déjeuner, tout est prêt, elle les attends ses petits, qui ne savent plus se parler, font comme si, ne veulent plus se voir, plus faire d'effort, ne pas venir ... la seule chose qui les réunira c'est son malaise. Pendant un moment, le temps sera suspendu, ils seront tous là réunis ... jusqu'à sa mort qui détruira totalement cette famille. Des mots juste pour une fine analyse de la famille. Il me semble que malheureusement cela parlera à chacun d'entre nous. À lire pour se dire que finalement ce n'est pas mieux chez les autres 😱
Lien : https://www.instagram.com/p/..
Commenter  J’apprécie          50
Reza a eu une enfance rude, pauvre, sans amour. Iranien, il a émigré en france et est devenu médecin mais il est plein de rancoeur, de colère, il ressasse, il devient dur. Esther sa femme est résignée, ne sait exprimer son désaccord et se tait face à ces accès de colère, à ces cris, à ces crises d'autorité. Au détriment de son couple, de sa famille. de cette colère et de ce silence sont nés 4 enfants, beaucoup de non dits, de ressentiments et malgré les efforts d Esther, la famille se délite. Les derniers chapitres sont d'une poésie, d'une délicatesse rare pour décrire ces relations, ces sentiments entre les uns et les autres. Ce livre me laissera un sentiment de profonde tristesse et de gâchis car il y a beaucoup violence dans ces silences et ces non dits. Ce livre m'a aussi questionné sur la transmission, l'éducation et l'image que nous parents allons laisser à nos enfants, sur le rôle que chaque parent a à jouer dans la construction de ses enfants.
Commenter  J’apprécie          50
« Une famille, c'est comme un jardin, si on n'y fout pas les pieds ça se met à pousser à tire-larigot, ça meurt d'abandon. » - Serge Joncour, Repose-toi sur moi

« Longtemps, Esther avait rêvé de revoir sa famille réunie. Devant elle, à présent sans qu'elle puisse le voir, prend forme le tableau rêvé ; la tapisserie secrète devant laquelle elle avait agenouillé sa vie, et dont, du matin au soir, année après année, elle avait tissé les fils de soie colorés. Sa famille était son oeuvre inachevable. »

Le 1er roman d'Alexandra Matine, Les Grandes Occasions, aurait dû voir le jour au printemps dernier au sein de la toute jeune maison d'édition Les Avrils du groupe Delcourt. Pour les raisons que l'on sait, il n'a pu trouver le chemin des librairies et des lecteurs qu'en ce début d'année.

Je n'emprunterai pas de détours. Pour ne rien vous cacher, ma lecture a commencé sous le signe de l'agacement. En cause la phrase inaugurale « Aujourd'hui, Esther va mourir. Ou demain. Ou dans quelques jours. On ne sait pas », resucée à 80 ans d'intervalle de celle de L'Étranger d'Albert Camus, « Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. » qui place d'emblée ce roman à l'ombre d'un autre, lui improvise une filiation lourde à porter et, partant, susceptible de jouer contre lui. Et ça ne s'arrête pas là car, comme dans le roman de Camus, le soleil est de plomb et la chaleur, accablante sur la terrasse de l'appartement parisien d'Esther et Reza qui attendent leurs enfants et petits-enfants pour un déjeuner dominical. Honnêtement, pendant les premières dizaines de pages, je me suis demandé dans quoi j'étais en train de mettre les yeux. Bref, je ne m'en cache pas, tout cela plaçait ma lecture sous de fâcheux auspices, mais je suis très curieuse et n'abandonne pas facilement un roman. Qui sait, peut-être allais-je dépasser ma première impression ?

Les Grandes Occasions raconte la vie d'Esther et le délitement de sa famille, le temps d'un dimanche.

« le dimanche, tu ne trouves pas, certaines choses vous reviennent davantage. […] le dimanche, on pense à la vie. » - Dominique Barbéris, Un dimanche à Ville-d'Avray

Esther pense à la vie, à la sienne, à celle de ses enfants. Occupée à la préparation du repas qui, elle l'espère, va enfin réunir toute la famille autour de la table qu'elle a dressée avec soin, elle se souvient. de retours vers le passé en évocations de sa vie actuelle, nous pénétrons dans l'intimité de cette femme de 70 ans, dans ce qu'elle ressent et du regard qu'elle pose sur elle-même et les siens. C'est le récit introspectif d'une femme qui fait le point et prend conscience qu'elle s'est oubliée, toute dévouée qu'elle était à ses 4 enfants et à son mari. Où est donc passée la guillerette infirmière qui arpentait, légère, les rues parisiennes ? Oh ! il y a bien eu ce frémissement prénommé Lawrence, aux alentours de la soixantaine, dans la maison du Midi. Juste quelques jours pour s'assurer d'être encore en vie.

Tout au long de ces minutes qui s'additionnent et font les heures la séparant de l'arrivée des convives, j'ai senti le poids d'une existence où il ne s'est rien passé ou si peu, où le désir de vivre s'est desséché, comme se dessèchent les fleurs disposées sur la table offerte à un soleil sans pitié. Je me suis trouvée embarquée dans la tête migraineuse d'Esther, à passer, comme un lion en cage, de l'ombre noire et étouffante du salon à la lumière jaune et aveuglante de la terrasse, à explorer ses sensations, ses impressions du moment et celles du passé, refaire les rares rencontres qui ont jalonné son existence si peu tournée vers l'extérieur.
Autant dire que la trame de cette histoire ne tient qu'à un fil ténu, comme cette famille en fait.
Tout au long de ce roman, bien que plus fréquemment dans sa 1re partie, on retrouve l'évocation métaphorique d'Esther occupée à patiemment confectionner une tapisserie dont le tissage imparfait des fils de soie peine à retenir dans sa trame les membres de la famille.

« À cet endroit de la tapisserie, les noeuds d'Esther sont distendus. Un peu lâches. Ils tiennent sans qu'on sache comment. Ils sont là. Ils complètent le dessin. Ils font leur devoir, encore un peu. Pour que tous les autres résistent. »

La récurrence de cette métaphore un peu trop appuyée - ce qui m'a gênée - dit pourtant assez bien l'obsession d'Esther à maintenir coûte que coûte les liens familiaux. Et le lecteur de sentir la claustration

« Les uns forcés contre les autres. Comprimés dans la cage »

et de comprendre pourquoi, dès ils en ont eu l'occasion, les enfants ont ouvert la cage familiale et s'en sont enfuis, n'y revenant que rarement et à regret.

Quatre. Ils sont quatre enfants nés de l'union d'Esther et de Reza, jeune homme venu d'Iran pour finir ses études de médecine et exercer en France.
Deux garçons : Alexandre, enfant préféré parce que premier fils de ce père exigeant et odieux, cet « astre qui brûle, abîme, réduit. [Cette] lumière qui poursuit, implacable au milieu du désert », ce père qui ne cessait d'exhiber son garçon, tel un singe savant, devant les invités. Et Bruno, enfant chétif, qu'un jour Reza a jeté dehors d'un laconique « Va-t-en », sans que la mère ne s'interpose.
Deux filles : Caroline, l'aînée aujourd'hui médecin comme son père qui n'a vu en elle qu'un « brouillon » pour patienter jusqu'à la naissance du premier fils, et Vanessa, la petite dernière partie, à peine le bac en poche, faire sa vie aux antipodes, en Australie, au plus loin donc de sa famille.

« Il lui avait fallu trois enfants, trois départs, et la menace d'un quatrième pour comprendre ce que c'était qu'être mère. le destin d'une mère, c'est de laisser partir ses enfants. de son ventre, de sa maison, de ses bras. Les douleurs de l'enfantement ne sont rien comparées à la douleur éternelle de la séparation. Mettre au monde ce n'est pas accoucher, c'est se laisser abandonner. »

C'est aussi, pour Esther, malgré les années passées, l'impossibilité d'avoir su recentrer sa vie sur le couple étrange qu'elle forme avec Reza dont le passé en Iran auprès de son père éclaire un peu sa détestable personnalité actuelle. Alors, accablée par la touffeur estivale et son passé qui revient par bouffées, Esther les attend tous aujourd'hui pour ce repas dont elle se fait une fête et cette attente est prétexte à revenir sur les colères qui couvent et les silences qui rongent la famille, où chacun est tout à la fois le chasseur et la proie :

« C'est ça qui ronge la famille. Cet évitement. Cet évitement pour garder les non-dits non dits. Il vaut mieux ne pas rester trop longtemps ensemble, sinon ça va sortir. C'est inévitable. Alors on s'évite. Ils vivent les yeux baissés. Jamais de vrais regards échangés entre les frères et les soeurs. Non plus avec la mère et le père. Regards en coin. Regards d'animaux. D'animaux qui se tournent autour. La trêve autour du point d'eau le soir. La trêve autour de la maison l'été. Ça peut se passer en un regard. Ils ont peur. C'est une peur de leur sang. Une peur des événements formidables qui suivent les confidences et les espoirs. »

C'est terrible et l'on soupçonne bien vite que ce repas puisse être l'occasion d'un ultime évitement.
De qui viendra-t-il ?
La première désertion à s'annoncer est celle de Vanessa, opportunément tombée sur une ancienne copine de lycée. Viendront celle d'Alexandre, puis celle de Bruno. Les prétextes, mensonges aussi éhontés qu'inconsistants, ne trompent personne. Seule Caroline franchira le seuil de l'appartement parental avant qu'une dernière désertion, elle bien involontaire, ne fasse de ce repas avorté un définitif fiasco.

Rancoeurs sourdes, non-dits latents, actes manqués, conflits larvés et, finalement, ennui insondable parsèment ce récit sombre et désespéré où résonne le néant.

« Dans la famille, il n'y a pas d'affection. On ne sait pas se toucher. le corps est absent. Aussi absent que les espoirs. La même peur de décevoir. La même peur du rejet, de l'énervement formidable si on s'approche trop. Chacun doit rester en soi. Se maîtriser. Ne pas donner aux autres la responsabilité de s'aimer. »

L'écriture d'Alexandra Matine, qui nous étouffe sous les répétitions, traduit à merveille l'atmosphère délétère et pesante de ce roman sans issue.

« Ils arrivent à la mairie les premiers. Ils arrivent toujours les premiers. Carole n'aime pas être en retard. C'est une marque de respect d'être en avance. D'être là, prêts pour quand ça démarrera. Ils attendent. Elle a beau vouloir être juste à l'heure, elle est toujours en avance. Rien à faire. Ce qui fait qu'elle attend. Elle sait qu'elle est en avance et pourtant elle en veut aux autres de la faire attendre. C'est comme si les autres étaient en retard. »

Ou encore

« Il y a sur la terrasse Reza et le parasol. le parasol pesant, sous le soleil pesant, et les gestes alourdis de Reza. le soleil lourd sur son crâne et le parasol comme une lance trop lourde sur son épaule gauche, qui l'entraîne un peu vers l'arrière. […] le pied encore plus lourd que le parasol. […] »

Cette prose juste, qui martèle et oppresse (toutes les phrases de la page 189, par exemple, commencent par « Elle ») et sous laquelle j'ai suffoqué, a fait que je n'avais qu'une hâte : m'échapper de ce roman à la violence contenue. Même si j'ai été sensible au vertige du vide que ressent Esther, femme effacée et soumise qui n'a pas su apprivoiser la liberté que le départ des enfants lui avait offerte, j'ai peiné à m'attacher aux personnages, peut-être parce qu'« On ne parle que de choses. On ne parle jamais d'[eux] ». Si les raisons qui ont éloigné les enfants du foyer sont évidentes, j'ai eu plus de mal à saisir ce qui tenait ces quatre-là éloignés les uns des autres. de même, j'ai peiné à comprendre cette mère dont la subordination à son mari tyrannique flirte avec l'insensibilité pour ses enfants. D'une certaine manière, ne pouvant m'attacher à aucun des personnages, je suis restée à distance de ce récit qui se résigne dans l'indifférence générale et qui s'achemine, sans surprise, vers la fin de cette journée particulière.

Il me reste à souligner le très beau travail éditorial de cette nouvelle maison édition à la charte graphique pimpante et au confort de lecture rare. Même si aujourd'hui le rendez-vous est - en partie - manqué, j'espère que d'autres romans à venir me permettront de partager leurs enthousiasmes littéraires, une bien appétissante devise.

Premier roman, lu pour la session 2021 des #68premieresfois

Lien : https://www.calliope-petrich..
Commenter  J’apprécie          52
Un dimanche en famille: le rêve d'Esther.
D'ailleurs, la table est prête pour recevoir les enfants : les réunir malgré la canicule, les distances, les petites brouilles, les agendas chargés... Et le fait que nous sommes samedi.

Le temps passe et Esther s'affaire: les mains occupées, elle se réjouit d'avance, évoque le passé, anticipe. Peu à peu, devant le lecteur captif, la tapisserie qu'elle a mis des années à construire se dessine.

Une lecture qui s'annonce calme mais finalement, il n'en est rien: cette découverte est finalement loin du calme d'un "dimanche en famille". Un sujet universel qui se décline parfois tendre, parfois cruel: un spectacle passionnant autour d'un rendez-vous somme toute banal.
Lien : https://nahe-lit.blogspot.co..
Commenter  J’apprécie          50
Un livre touchant sur la famille, riche en émotions, qui ne vous laissera pas indifférent. Les mots sonnent justes. Tout un chacun pourra y reconnaitre un membre de sa famille. Mais attention ce premier roman est terrible, si vous êtes plutôt dépressif en ce moment, vous n'y trouverez pas de réconfort ou de luminosité.
Je vous livre l'incipit pour vous donner le ton :
« Aujourd'hui, Esther va mourir. Ou demain. Ou dans quelques jours. On ne sait pas. »
Le roman s'ouvre sur une famille réunit autour d'un lit d'hôpital. C'est le moment de prendre une décision. Esther est dans un état de mort cérébrale. Elle est âgée. Ses quatre enfants versent des larmes.
« Longtemps, Esther avait rêvé de revoir sa famille réunie. Devant elle, à présent sans qu'elle puisse le voir, prend forme le tableau rêvé ; la tapisserie secrète devant laquelle elle avait agenouillé sa vie, et dont, du matin au soir, année après année, elle avait tissé les fils de soie colorés. Sa famille était son oeuvre inachevable. »
Le motif de la tapisserie, des liens tissés, reviendra souvent dans le roman. Elle nous emmène alors dans son passé et égrène ses souvenirs. Elle nous parle de son mari Reza, d'origine iranienne. Il est venu faire ses études de médecine en France. Il a vécu une enfance difficile. Elle décrit ses enfants : Carole, Alexandre, Bruno et Vanessa. Mais surtout la dure réalité de se retrouver seule, une fois les enfants partis. Elle pensait pouvoir garder la petite dernière auprès d'elle, Vanessa.
« Il lui avait fallu trois enfants, trois départs, et la menace d'un quatrième pour comprendre ce que c'était qu'être mère. le destin d'une mère, c'est de laisser partir ses enfants. de son ventre, de sa maison, de ses bras. Les douleurs de l'enfantement ne sont rien comparées à la douleur éternelle de la séparation. Mettre au monde ce n'est pas accoucher, c'est se laisser abandonner. »
Ce qui est intéressant dans ce roman, c'est qu'ensuite nous avons aussi le point de vue de chaque enfant sur son enfance, ses parents, les relations entre frères et soeurs. On ressent toute la pression et le poids de l'héritage familial. Je ne vous en dis pas plus pour vous laisser découvrir cette famille, ses secrets, ses fêlures. En tout cas, il ne restera plus que les grandes occasions à Esther pour essayer de réunir toute sa famille.
La nouvelle maison d'édition Les Avrils commence fort. La rencontre #vleel d'hier soir, nous a montré l'enthousiasme de Sandrine Thévenet, Lola Nicolle et de toute l'équipe pour défendre leurs auteurs et leurs textes. Tous les romans et récits à paraître ont l'air bien tentant. J'aimerais beaucoup lire le deuxième roman de Martin Dumont, « Tant qu'il reste des îles ». Et la charte graphique, simple et colorée, donne effectivement envie de commencer une collection !
Merci aux 68 premières fois pour cette lecture.
Lien : https://joellebooks.fr/2021/..
Commenter  J’apprécie          50
Lu dans le cadre de la sélection 2021 des 68premièresfois.
Ce premier roman parle des liens familiaux, du point de vue de la mère, qui se retrouve à l'hôpital. L'auteure va alors nous raconter la vie d'Esther, de son époux, Reza et ses quatre enfants.
Reza, le père, est venu faire des études de médecine en France et a quitté l'Iran, et la misère qu'il subissait. Il a tourné la page face à ses origines et a réussi sa vie professionnelle, même s'il est devenu un "médecin des pauvres" . Il a donné à sa famille une vie aisée, confortable.
L'un des principaux soucis de cette mère est de maintenir les liens entre les membres de la famille, des liens comme ceux des fils des tapis, tapis persans qui sont dans l'appartement familial, bien vide après le départ des enfants, qui vivent leur vie de famille plus loin.
Avec une belle écriture, l'auteure fait un beau et terrible portrait de cette femme, qui se questionne sur son rôle d'épouse, de mère, de grand mère mais aussi de certains de ses enfants. Elle parle très bien des relations entre frères, soeurs, le rôle du père.
Pourquoi ce titre, "les grandes occasions", car ce sont les seules occasions où justement Esther tente de réunir sa famille et que ceux ci arrivent à tisser des liens mais cela n'est pas facile. Ce texte parle très bien des rapports entre les membres de famille, des non dits, des silences, des préférences entre membres..
Un premier roman qui est un beau portrait de femme, avec ses questionnements, ses désirs, ses regrets...






Commenter  J’apprécie          50

Il y a de ces romans qui vous scotchent dès le départ ! Immersion intimiste dans cette incroyable vie parcheminée par ces moments de douceurs délectables et ces moments douloureux violents pareils à ces multiples déchirements. Esther est une maman qui a dû faire face à de nombreuses épreuves. Elle a tout d'abord perdu sa liberté qui lui était chère. Mariée à un médecin iranien (ce qui a tout son importance ici), et mère de quatre enfants, Esther a voué sa vie à sa famille. Elle fut la créatrice anonyme de ce qu'elle appelle sa toile. Elle y a tissé tous les fils qui la composent. Il y a mis une partie d'elle, son âme, son coeur et tout ce qui constitue cette famille.
Une oeuvre dont elle n'est pas fière malgré le dévouement et l'absolution dont elle fait preuve. Elle ne rêve que de cette famille figée dans le silence, le leur, celui du passé, géniteur d'un mal bien plus profond dont il marque les âmes au fer rouge. Un silence de non-dits, un silence vorace, persécuteur, annonceur de la séparation, de la jalousie, de l'incompréhension, de l'abandon.


Esther veut le vaincre, y mettre des mots, des cris, des larmes dessus, l'anéantir. Et par ses petites mains minutieuses, par sa force cachée, par son espoir, elle continue à tisser ses liens qui inlassablement cassent au coeur de son silence étouffant, malsain, mortel.


Alexandra Matine signe un premier roman d'une rare beauté. Une beauté toxique, douloureuse qui cache en son sein l'amour inconditionnelle d'une maman, d'une femme qui doit faire face à la cruauté de sa vie. le silence est omniprésent, pourtant les mots d'Alexandra Matine résonnent, éclatent tel le roulement du tonnerre. Une plume parfois minimaliste souvent généreuse, elle nous porte aux confins de la vie d'Esther. Une histoire de famille exigeante et profonde. Une histoire noire qui dissèque les liens de la famille. Un tableau parfaitement imparfait dont ses couleurs vacillent, s'estompent ou se vivifient. Une histoire qui fait écho à certains, on s'y reconnait ou on s'y perd tout en découvrant cette réalité funeste.


Mon coeur fait encore BOUM tout en écrivant mes mots, signe évident qu'il y restera gravé pendant longtemps !
Lien : https://lesmisschocolatinebo..
Commenter  J’apprécie          50
Aujourd'hui Esther va mourir. Ils sont tous là, autour de son lit, du lit de leur mère, de leur femme.
Il y a quelques jours Esther avait tout préparé, tout planifié pour la "grande Occasion", ce déjeuner où toute la famille allait participer, ce moment qu'elle attendait et espérait depuis si longtemps où Reza et Esther seraient réunis autour de la table avec leurs quatre enfants et leur famille. Elle avait tout prévu, les victuailles pour remplir les corps, la belle table fleurie et bien dressée sur la terrasse ensoleillée, elle entendait même déjà les rires des enfants. Ce moment qu'elle rêvait de vivre mais qu'elle ne vivait jamais, parce que ça n'arrivait plus et que le silence régnait encore et toujours dans leur grand appartement. Mais comme souvent, comme toujours pour Esther, les choses ne se déroulent pas comme elle le souhaite. Certains décommandent, d'autres repoussent le moment de se retrouver en famille, cette famille où le silence a pris toute la place, cette famille où on s'évite, où on ne sait pas se parler. Esther repense à tous ces petits noeuds invisibles qu'elle a pourtant tenter de nouer entre tous les membres de cette famille, entre chaque enfants et leurs frères et soeurs, entre les enfants et leur père. Ce père, Reza, médecin qui a connu la misère durant son enfance et qui ne supporte pas la médiocrité ni la faiblesse, qui ne veut que l'excellence et qui se nourrit des éloges de ses patients, ce père qui brise et qui casse les rêves, et c'est le silence qui remplace l'amour, parce qu'on préfère taire ses envies plutôt que de les voir anéanties. Alors on fait semblant, on se tait, on garde pour soi, jusqu'à la cassure, franche, lors du mariage de l'un d'eux, encore une "grande occasion" gâchée.
Jusqu'au bout, jusqu'au dernier souffle, Esther veut croire que tout n'est pas perdu, et que les petits fils tissés entre eux, qu'elle a rapproché avec autant de petits noeuds invisibles, vont leur permettre de se retrouver. de les revoir enfin, tous ensemble, assis autour d'une même table. Et même si c'est autour du lit de la mère et bien soit, mais qu'ils se retrouvent.

Je remercie les éditions "Delcourt Les Avrils" ainsi que Babelio, qui m'ont permis de lire ce roman via la masse critique.
Des phrases courtes, un récit sans fioritures ni superflus qui donnent intensité et profondeur à ce roman qui m'accompagnera longtemps. Une vision amer de la famille, un portrait de mère très émouvant. J'ai beaucoup aimé cette lecture, et c'est avec plaisir que j'ai découvert cette jeune auteur.
Commenter  J’apprécie          50
Esther est dans le coma. Reza, son mari et ses quatre enfants, Carole, Alexandre, Bruno, Vanessa, sont réunis autour d'elle pour prendre une décision, LA décision.La journée commençait plutôt bien pour Esther, impatiente et heureuse de réunir les siens autour d'un repas. C'est important la famille, important ce lien entre parents et enfants, frères et soeurs, alors Esther s'applique pour que tout soit parfait.Mais rien ne se passera comme prévu...Chapitre après chapitre, nous entrons dans l'intimité et l'histoire de cette famille : la rencontre entre Esher et Reza, jeune étudiant en médecine iranien, ayant fui un pays en guerre et une jeunesse malheureuse, puis les enfants, leur place dans cette fratrie, les silences, les blessures, la peur de ne pas être reconnu, les pardons jamais donnés, l'aigreur que chacun a au fond de lui... Et l'aveuglement d'une mère à vouloir toujours penser que tous, ils sont une famille...C'est une violence silencieuse qui nous est donnée à lire, un huis-clos oppressant où personne ne s'autorise un élan de tendresse, un peu de laisser-aller.
J'ai beaucoup aimé cette lecture, qui ne peut que marquer le lecteur. Tant de temps perdu, tant de parole retenue... Quel gâchis! C'est troublant, touchant, sensible et bouleversant : un gros coup de coeur pour moi!!
Commenter  J’apprécie          40
On a tous vécus un dimanche ensoleillé avec une grande table dressée ou toute la famille va se réunir et partager un repas convivial !
Dans le cas d'Esther, ce moment est exceptionnel car les liens familiaux qu'elle tente de tisser depuis de nombreuses années se sont distendus , voire déchires .Il lui est difficile de réunir ses quatre enfants issus de son mariage avec Reza , un iranien venu étudier et exercer la médecine en France pour fuir la misère de son pays. Elle a installé un table sur la terrasse au soleil et elle est heureuse de les attendre malgré une douleur lancinante à la tête mais il fait tellement chaud, ce dimanche ! Quelle joie de retrouver ses enfants !
Il y a Vanessa , sa plus jeune fille ,partie s'installer en Australie, un déchirement pour Esther de voir partir sa petite derniere. Alexandre , l'aîné préfère du père que celui-ci a voulu modeler à son image et qui a suscité beaucoup de jalousies de la part des autres enfants. Ainsi Bruno a grandi dans son ombre , ne s'entend pas avec son frère et la brouille s'est accentuée depuis son mariage . Seule Carole , dédaignée par son père, est devenue médecin et rend visite régulièrement à ses parents. C'est vraiment une famille déchirée mais Esther espère encore, malgré les annulations de certains.

Ce roman explore la famille dans toutes ses difficultés à travers le personnage de la mère , Esther. En attendant ses enfants, ses souvenirs remontent et nous expliquent les relations difficiles et douloureuses de cette famille . On comprend mieux l'histoire d'amour de son couple, les difficultés d'adaptation de Reza en France, l'arrivée des enfants et surtout les non-dits de cette famille. On ne montre jamais ses sentiments, on pratique l'évitement en toute circonstance.
Ah, famille je vous hais !
L'auteur nous décrit adroitement les failles, les blessures et les liens distendus d'une famille ou percé une incommunicabilité totale. Chaque personnage s'enferme dans ses certitudes, n'avoue pas ses erreurs, esquive toute tentative d'explications.
L'atmosphère du roman est pesante et la froideur des personnages contrastent avec ce dimanche si chaud ou tous les espoirs sont permis.
J'ai apprécié la construction fluide du récit , malgré le peu d'empathie pour les personnages, en particulier le père Reza, si dur et intraitable envers sa famille entière.

Merci aux editions Delcourt et aux 68premieresfois.

Commenter  J’apprécie          40



Autres livres de Alexandra Matine (1) Voir plus

Lecteurs (356) Voir plus



Quiz Voir plus

Famille je vous [h]aime

Complétez le titre du roman de Roy Lewis : Pourquoi j'ai mangé mon _ _ _

chien
père
papy
bébé

10 questions
1435 lecteurs ont répondu
Thèmes : enfants , familles , familleCréer un quiz sur ce livre

{* *}