Tom Strong - Intégrale, tome 1

Tom Strong est, en quelque sorte, une oeuvre mineure d'Alan Moore (si cela existe).

C'est un hommage aux pulps qu'il a entrepris vers la fin des années 90, après la sortie de Promethea.

À ce moment, son oeuvre commençait à être étudiée et enseignée à l'université et il cherchait à répondre à ce vertige causé par le fait d'être pris au sérieux.

Il y abandonne donc son style baroque, ses structures alambiquées, ses déconstructions postmodernes pour écrire... de bons vieux pulps.

On y suit donc Tom Strong. Héros élevé dans une chambre à haute gravité qui lui donne sa force. Éduqué, sur une île isolée, par une tribu indigène dont il épouse la fille du chef avec qui il a une fille. Toute la famille s'installe ensuite aux États-Unis où ils deviennent de grands scientifiques.

Une plante qu'ils ramènent de l'île ralentit aussi leur vieillissement, ce qui fait que la famille est près d'être centenaire dans le "présent" de l'histoire. (C'est quand même Alan Moore. L'histoire n'est pas linéaire, et cela lui permet de revisiter différentes époques de l'histoire des comics. "Nos vilains étaient tellement plus simples avant!")

Comme il se doit, l'équipe est complétée par un robot et un singe doué de parole.

Les intrigues sont simples, les personnages aussi (quoique).

L'originalité tient aux esthétiques et aux idées complètement déjantées d'Alan Moore. (C'est la seule oeuvre qu'il a écrite sans plan.)

On y croise des nazies tueuses. Une IA autoreproductrice. Des Aztèques cyberpunk qui envahissent depuis un univers parallèle. Une entité extraterrestre Maya qui souhaite quitter la terre. Mais chacun de ces antagonistes apporte sa propre esthétique, chaque fois magnifique.

Aussi, les US dans lesquels l'histoire se déroule sont une espèce d'utopie de gratte-ciels connectés par téléphériques.

Bref, Moore se sert de l'invraissemblance propre aux pulps pour vraiment se laisser aller!

Tom Strong #1-7
Je relis très très peu mais je me suis dit que je pouvais faire une exception pour ce titre. J'avais pris la collection complète en 2009 (en VO), lue dans la foulée, et j'avais trouvé ça --oui, je sais c'est incroyable-- très bon. Ça m'a moins touché que Promethea mais c'est à des années lumières de ce qui se faisait ou se fait actuellement.
A part le numéro avec les Aztèques (il y avait mieux à faire) et Ordway (moins pire que souvent mais j'aime toujours pas), c'est du très très bon. Ce qui est raconté et la façon dont c'est raconté place cette série parmi les meilleures. Sprouse est exceptionnel et tient la dragée haute à Art Adams et à Gary Frank. Alors oui, co-créer les personnages aide grandement, mais il les tient comme aucun autre.

Tom Strong #8-14: mouais, bof.
Je ne suis pas fan des histoires en 8 pages et c'est ce qu'on a pour plus de la moité des numéros. Moore s'amuse à changer de registre à travers les époques visitées mais, moi, je m'y ennuie plutôt. Il y a quand même de bonnes histoires mais elles sont minoritaires. C'est aussi un prétexte pour inclure d'autres dessinateurs que Sprouse et, s'il sont bien utilisés, ils me parlent moins.
On a tout de même une histoire en deux numéros un peu longue pour ce qu'elle propose et une excellente en un seul qui traverse les époques et donc les styles pour tout réunir au final.
Pas de fil rouge ici. Les histoires, si elles se répondent parfois et sont chronologiquement présentées, sont indépendantes et lisibles dans n'importe quel ordre. Des trucs étranges comme l'âge relatif/effectif des personnages font tiquer: Tesla est une adolescente de 60 ans qui peut être privée de sortie par ses parents. Les seconds rôles que sont Pneuman et Solomon apparaissent mais ne sont absolument pas développés alors qu'il y avait de la place pour cela. Car ceux de Tom Strong, sa femme et sa fille ne le sont pas beaucoup non plus. Il n'y a aucune évolution des personnages, on se contente de relever un élément du passé pour les faire agir.
Donc assez déçu au final. Moore, avec les 12 premiers numéros de Promethea, fait beaucoup mieux dans le registre "Changer de style et de genre pour raconter le passé du personnage" et Tom Strong's Terrific Tales sera bien plus efficace pour les histoires de 8 pages.

Tom Strong #15-19: retour des personnages des aventures en 8 pages pour une histoire en 3 numéros.
On a le retour de l'homme lave qui kidnappe Tesla histoire de lui déclarer sa flamme. Papa et Maman partent la récupérer. L'histoire ne va guère plus loin et si ce n'étaient les dessins de Sprouse et une résolution amusante, ça aurait été trop court.
Puis les cow-boys à 3 yeux reviennent pour une menace venue du cosmos. Pour la combattre, Tom Strong fera appel à Modular Man ainsi qu'à Svetlana X (un nouveau personnage pour le coup) dont l'anglais est imaginatif*. Cette histoire en 3 parties est peut-être un peu longue pour le scénario en lui-même mais là encore les dessins et l'écriture des personnages font passer cette impression. le thème du sexe se fait explicite et c'est toujours étrange dans un titre comme celui-ci.
Enfin, le #19 revient avec ses histoires courtes. Si la première dessinée par Chaykin laisse sur sa faim avec un concept intéressant mais survolé, la deuxième écrite par Leah Moore (népotisme, vraiment ?) et dessinée par McManus est efficace, la dernière par Moore et Sprouse aurait mérité un numéro entier.

*"Tom, I hope Dhalua is not urinated with me" à la place de "pissed" ou encore "Oh great. Now we are really copulated".

Quand Indiana Jones rencontre Doctor Who, Superman et Iron Man. Résultat : un cocktail qui va à fond les ballons pour une série d'aventures joyeusement nostalgiques !