« 𝘖𝘯 𝘤𝘩𝘰𝘪𝘴𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘴𝘦𝘴 𝘱𝘢𝘳𝘦𝘯𝘵𝘴, 𝘰𝘯 𝘤𝘩𝘰𝘪𝘴𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘴𝘢 𝘧𝘢𝘮𝘪𝘭𝘭𝘦.
𝘖𝘯 𝘤𝘩𝘰𝘪𝘴𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘯𝘰𝘯 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘭𝘦𝘴 𝘵𝘳𝘰𝘵𝘵𝘰𝘪𝘳𝘴 𝘥𝘦 𝘔𝘢𝘯𝘪𝘭𝘭𝘦,
𝘋𝘦 𝘗𝘢𝘳𝘪𝘴 𝘰𝘶 𝘥'𝘈𝘭𝘨𝘦𝘳 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘢𝘱𝘱𝘳𝘦𝘯𝘥𝘳𝘦 à 𝘮𝘢𝘳𝘤𝘩𝘦𝘳.
Ê𝘵𝘳𝘦 𝘯é 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵…
Ê𝘵𝘳𝘦 𝘯é 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵, 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘤𝘦𝘭𝘶𝘪 𝘲𝘶𝘪 𝘦𝘴𝘵 𝘯é,
𝘊'𝘦𝘴𝘵 𝘵𝘰𝘶𝘫𝘰𝘶𝘳𝘴 𝘶𝘯 𝘩𝘢𝘴𝘢𝘳𝘥. »
⠀
De son Sénégal natal, Arouna se souvient. du sable chaud sous sa voûte plantaire, tapis ocre et siliceux aux brûlantes morsures. Des cotres aux cales ventrues emplies d'arachides, remontant le cours tranquille du fleuve sous une lune gibbeuse. Des bergers griots guidant, vers de plus verts pâturages, la transhumance de leurs cheptels N'dama ou leurs troupeaux Peul-Peul sous les élytres échoïques des cigales stridulantes. Des chaudes caresses de l'Harmattan, accompagnant le soir venu un kaléidoscope de lumières où se confondent le ciel, le soleil et la terre sous des teintes aux nuances mandarine et saumon, soufre et orpiment, cinabre et vermeil, pétrole et cobalt…
⠀
« Ê𝘵𝘳𝘦 𝘯é 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵…
Ê𝘵𝘳𝘦 𝘯é 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵, 𝘤'𝘦𝘴𝘵 𝘱𝘢𝘳𝘵𝘪𝘳 𝘲𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘰𝘯 𝘷𝘦𝘶𝘵,
𝘙𝘦𝘷𝘦𝘯𝘪𝘳 𝘲𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘰𝘯 𝘱𝘢𝘳𝘵. »
⠀
Pour Arouna, entreprendre le grand voyage vers Paris pour y réaliser ses études, c'est rendre hommage et faire honneur aux siens, ceux restés au pays. Ne pas oublier d'où il vient, ne pas oublier ses valeurs…
⠀
Mais Paris est une amante aux mille visages, une Gorgone au coeur de pierre qu'Arouna refusera de regarder en face pour ne pas sombrer dans ce chaos inhumain d'une ville qui ne lui ressemble pas, à l'âme corrompue, où tout va trop vite, où tout lui semble suffisant, superficiel et fuyant.
⠀
Pourtant, Paris est aussi la ville de Nora, sa belle amarre dans cette ville qui le repousse, son pilier qui lui permet de ne pas s'écrouler et l'empêche de se sentir de nulle part…
⠀
Être d'ici et d'ailleurs à la fois, c'est vivre en fantôme où que l'on aille. Trop noir pour Paris. Trop blanc pour Dakar… Entre ces deux Ailleurs, et avec Nora comme seul phare dans son ciel d'encre, Arouna devra puiser au plus profond de son puits de solitude pour y entendre la voix des anciens et y trouver sa voie intérieure. Pour exister et ne pas tomber.
⠀
« 𝘑𝘦 𝘴𝘶𝘪𝘴 𝘯é 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵…
𝘑𝘦 𝘴𝘶𝘪𝘴 𝘯é 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵, 𝘭𝘢𝘪𝘴𝘴𝘦𝘻-𝘮𝘰𝘪 𝘤𝘦 𝘳𝘦𝘱è𝘳𝘦
𝘖𝘶 𝘫𝘦 𝘱𝘦𝘳𝘥𝘴 𝘭𝘢 𝘮é𝘮𝘰𝘪𝘳𝘦. »
🌅 🌄 🌇
⠀
J'avoue avoir eu quelques difficultés à rentrer dans ce roman, où le « je » alterne avec le « il », où je ne parvenais pas à trouver le fil conducteur des premières pages, trop de détails incompris, avec une sensation de brouillard « brouillon » comme voile imprégné sur mes pupilles… Au point de redéposer par deux fois ce roman dans ma bibliothèque.
⠀
Pourtant l'écriture est belle. Ce n'est pas le livre qui est en cause. Pas le bon moment, pas le bon angle d'attaque…
⠀
Alors j'attends quelques jours, je le reprends. Je prends un peu de recul, je le parcours à présent comme on contemple un tableau de loin, en apprécie davantage les contours, la rondeur et la musicalité des mots, les nuances des couleurs.
Et c'est alors que s'ouvrent mes yeux sur toute la poésie de l'écriture de
Michelle Mosiniak.
Je me rapproche un peu, je reviens sur ces détails, sur ces mots qui m'apparaissent maintenant bien plus précis, sur cette palette de couleurs vives dont j'apprécie enfin le nuancier dans ces moindres recoins.
⠀
Michelle Mosiniak a connu cette Afrique qu'elle dépeint. Cela se ressent dans cette évasion continentale à laquelle elle nous convie.
Avec beaucoup de justesse, elle parvient également à nous faire ressentir les tourments et les absences de repères de tous ces déracinés, errant dans les limbes en quête d'identité, dans un Ici et Ailleurs où ils n'existent pas vraiment.
Merci à Babelio et aux Editions La Trace, que j'apprécie particulièrement, pour cet envoi en Masse Critique. A nouveau un très bon moment passé avec
Michelle Mosiniak et cette belle maison d'éditions !