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Critique de c.brijs


Dans Silhouette, l'auteur, Jean-Claude Mourlevat, nous propose neuf nouvelles à chute... La dixième constituant la chute des neuf autres !

Dans ce dixième texte intitulé "Un escroc", par une mise en abime habile et un sens aigu de l'autodérision, "l'auteur" nous les présente lui-même :

"Elles ont en commun d'être actuelles, réalistes et assez cruelles" car "elles se finissent ou mal ou très mal, au choix"...

Un registre qui va sans doute en surprendre plus d'un. L'auteur s'en explique sur son site :

"Cela m'a fait « des vacances » par rapport à cette littérature de « jeunesse » où il convient de ménager les lecteurs, avec ce que cela suppose de concessions."

Ici, c'est vrai, point d'édulcorant ! On plonge allègrement dans les faiblesses des hommes qui, tôt ou tard, ont le retour du bâton. Que ce soit cette femme qui est toute fière d'être "silhouette" dans le film de son acteur préféré à cet homme, grand lecteur, qui pense pouvoir devenir lui aussi écrivain en passant par cet autre homme qui ne supporte pas les fautes de syntaxe chez ses compatriotes (surtout ceux qui "se la pètent "!) et rêve de les punir...
"Aux dix commandements de Dieu, il en avait ajouté un, le onzième : "Tu accorderas correctement le participe employé avec être et avoir", qu'il situait, dans sa hiérarchie personnelle, tout juste après le "Tu ne tueras point"."
Nos dix "héros" subissent TOUS un revers du sort pour le moins inattendu, pour le moins cruel !

Impossible de vous parler de chacun d'eux. Autant les découvrir par vous-même. Toutefois, parmi tous ces portraits vitriolés, j'en épinglerais trois qui, pour une raison ou une autre, m'ont particulièrement secouée.

Le premier, "Case départ", est celui d'un ado à qui ses parents ont confié la fermeture de la maison avant les vacances et qui se rend compte dans le car qui l'emmène en colo qu'il a enfermé son chat. Si j'ai anticipé quelque peu les péripéties, la chute fatale m'a tiré un cri... d'horreur !

Le deuxième, "Les jolis nuages", est celui d'une prof de math à la retraite qui se retrouve veuve et doit combler ses journées de vide. Elle apprend alors des centaines de poèmes... Mais le temps assassin finit par effectuer son travail de sape. Un récit qui renvoie à nos propres angoisses concernant la vieillesse et sa déchéance intellectuelle. Une nouvelle qui m'a émue aux larmes !

Le troisième, enfin, est plus positif. Il s'agit de "Mon oncle Chris" où l'oncle en question est un peu le "canard boiteux" de la famille qui essaie de coller à l'image qu'on attend de lui, sans succès. L'amour que lui porte son filleul va lui permettre de se révéler tel qu'il est vraiment. Son destin est là aussi funeste mais subiste de lui un tout petit quelque chose qui illumine la fin...

Dans tous ces textes, l'auteur joue avec nos nerfs. A chaque fois, on se dit : "Allez, cette fois, je le sens bien, ça va bien finir !" Eh non ! La chute n'en est que plus dure ! Surtout que toutes ces histoires n'ont rien d'extraordinaire et pourraient arriver quasi à chacun d'entre nous.

En bref, un recueil qui ne vous laissera pas indifférent et qui parlera aux adultes et grands ados qui s'interrogent (parfois) sur la vacuité de nos existences.

Un dernier mort - euh! mot - sur la couverture, sublime. Ces petites silhouettes résument à merveille le propos de l'auteur illustrée par une phrase de Shakespeare : "Le monde est un théâtre"... En surimpression, des branchages dénudés... Tout cela m'évoque également les "Contes glacés" de Jacques Sternberg ou les "Contes à l'encre de la nuit " de Thomas Owen, le fantastique en moins !

Lien : http://lacoupeetleslevres.bl..
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