Citations sur Biographie de Alfred de Musset (13)
Pour ces jours de misère, le poète aimait à se composer un costume de situation. Du fond d’une armoire, il tirait un vieux carrick [manteau] […]. Ainsi affublé, il se couchait sur le tapis de sa chambre et fredonnait d’un ton lamentable quelque vieil air […]. Au premier mot que je voulais lui dire : “Qu’on me laisse, s’écriait-il en se voilant la face, qu’on me laisse dans mes haillons et mon désespoir !” Mais le soir arrivé, il jetait en l’air les haillons et mettait ses plus beaux habits.
Tour à tour laborieux et dissipé, il travaillait avec une ardeur incroyable, pourvu que rien ne vînt le distraire ; car une fois le travail achevé ou interrompu, le poète redevenait dandy.
(Paul de Musset, Notice sur Alfred de Musset, 1888)
Paul Foucher, beau-frère de M. Victor Hugo, introduisit son camarade [Alfred de Musset] dans le cénacle où se réunissait tout l’état-major de l’école romantique.
(Paul de Musset, Notice sur Alfred de Musset, 1888)
[…] lorsqu’il se présenta comme externe au collège Henri IV, Alfred de Musset se trouva à la fois le plus jeune et l’un des plus forts de la classe de sixième. Jusqu’à la fin de ses études, il obtint les meilleures places et des prix à toutes les distributions.
On nous laissait la bride sur le cou et nous usions amplement de notre liberté. Le grand plaisir était de se proposer une expédition difficile ; par exemple, de faire le tour complet du jardin sur les murs, de monter dans un arbre jusqu’à une branche désignée d’avance.
On lui faisait apprendre des fables, comme à tous les enfants ; il les récitait sans la moindre timidité, après quoi il courait embrasser tous les assistants et retournait à ses jeux.
Notre mère, au contraire, usait de son autorité et se faisait obéir d’un mot ou d’un simple geste. Quand nous avions commis quelque faute, ses reproches étaient d’une éloquence qui nous inspirait plus de terreur que les punitions.
Cet excellent père préférait la persuasion aux réprimandes. À l’appui de ses leçons de morale, il nous racontait des historiettes amusantes. Il se plaisait à raisonner avec nous, et nous invitait même à lui faire des objections, puis il se moquait de nous quand nos raisonnements ne valaient rien, ce qui arrivait souvent […].
Victor de Musset faisait des vers pour son amusement. Il excellait surtout dans le genre burlesque. Il avait le tour d’esprit gai, la repartie prompte, et il savait quantité d’anecdotes qu’il racontait à merveille. Mais la plus précieuse de ses qualités était une chaleur de cœur qui l’a fait aimer de tous ceux qui l’ont connu […].
"Le public est en retard avec moi. Il se fait autour de mes publications un silence qui m’étonne. Je n’ai pas la moindre envie de jouer le rôle de grand homme méconnu ; mais après dix ans de travail, j’ai le droit de me retirer dans ma tente. […] On me rendra justice, parce qu’il en est temps ; sinon, je me tairai."