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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Ce fut un immense plaisir que de débuter la lecture de ce livre, « Les mensonges de la mer » de la japonaise Kaho Nashiki dont j'avais adoré le récent recueil « L'été de la sorcière ». J'avais hâte de retrouver son style épuré, sa délicatesse, son élégance. Pourtant, à mon grand étonnement, je n'ai pas été séduite. Enfin jusqu'au deux tiers du livre. Si le thème de la nature, de la flore et de la faune, de la jouissance des bonheurs simples, de l'observation poétique convoquant tous les sens sont de nouveau présents, j'y ai trouvé également certaines longueurs engendrant une distance ne me permettant pas de m'immerger totalement. Telle une image de ce que j'aime dans ce genre de lectures japonaises, mais une image plus édulcorée, plus floue, plus laborieuse, telle la musique assourdie d'une flûte qui tente de rappeler à l'âme ce qui me ravit…si assourdie au point de ne plus l'entendre par moment et de m'ennuyer un peu, je dois avouer. Sauf à la fin.

Et pourtant quel récit délicat dès le départ, je suis tellement déçue de n'avoir pas su mieux l'apprécier…La présence conjointe de la mer et de la montagne sur cette petite île au sud du Japon, Osojima, offre une faune et une flore riche et luxuriante que l'auteure se plait à inventorier et à observer avec émerveillement. Ces marches dans la nature, entrecoupées par l'arrivée impromptue de magnifiques papillons, de saro énigmatiques, de chèvres têtues, sont salvatrices pour le jeune Akino qui vient de perdre ses parents ainsi que sa fiancée. Étudiant du département de géographie humaine de l'Université K., le temps d'un été, au début des années 1930, il y vient donc et loge à "La Paupière du Dragon". Cette Île est en forme d'hippocampe, certains lieux sont nommés par rapport à sa position sur cet animal…et sa beauté est narrée de façon remarquable :

« Devant moi, à peu près à hauteur de genoux, une brume s'était formée. Légèrement laiteuse, elle bougeait à la façon d'une langue géante. Pendant que je l'observais, elle s'était répandue alentour et se mêlait aux vapeurs qui, montant de la mer, s'élevaient ici et là, ne formant qu'une seule et même matière, puis elle s'en séparait et, un court instant, se mettait à onduler comme un tapis vaporeux pour finir littéralement par s'évaporer au loin. C'était une véritable forêt de brume et de vapeur. Je venais d'entrer dans la forêt Noire. Au milieu des conifères enveloppés de cette brume, si on faisait abstraction de la moiteur, on pouvait se croire dans un pays nordique. Je ne savais plus du tout où je me trouvais. Je me demandais si j'étais sur le bon chemin. Devant moi, une chose de couleur brune qui n'était pas une plante bougea. Immédiatement mon esprit qui s'était un peu égaré se concentra sur cet unique point mouvant du paysage devant moi. C'était un saro ».

Il va faire de belles rencontres, dont le jeune Kajii qui sera son guide pour randonner en direction d'un ancien temple bouddhiste. Avec Akino, Kajii se rend compte qu'il est motivé par le désir de trouver ses racines, de savoir ce qui fait qu'il est sur cette île. Ces ancêtres ne sont-ils pas venus afin de trouver refuge sur cette île à une période où le bouddhisme a été aboli avec violence ?

On le comprend le lieu est chargé d'histoire, d'histoire religieuse notamment, et l'onirisme y vibre, subtilement, par petites touches tels des aplats de couleurs un peu plus vives sur ce tableau idyllique…Une voix rampante entendue dans une grotte, à ne pas savoir si elle vient de soi ou d'une source autre, des mirages étranges, les moines de la pluie, les génies de l'eau, les monomimi, ces esprits de l'île, le mystère sourde sur toute l'île.

Une belle histoire…Alors pourquoi cette déception, malgré le fait d'avoir vraiment apprécié la sérénité qu'offre cette marche et d'avoir ressenti avec émotion certaines scènes magnifiquement fugaces, d'avoir aimé la lenteur du récit sur cette île Osojima qui signifie « l'ïle lente »?

Est-ce le ton des protagonistes, souvent pétris de bonne manière les uns vis-à-vis des autres qui a fini, pour la première fois depuis que je lis des livres japonais, par me gêner (je ne mets pas le passage des boulettes de riz ici mais Onee l'a mis dans sa critique et je dois dire que j'ai eu exactement le même ressenti en lisant ce passage) ? S'agit-il des discussions dans cette maison au style colonial entre Akino et le propriétaire avec qui il a lié connaissance, M. Yamané, qui m'ont semblé si longues, les différentes interprétations des mots japonais et de la signification des lieux de l'île, qui en est leur thème principal, ayant fini par me lasser ? Est-ce moi qui change dans mes goûts ? Je ne sais pas.

Et puis le derniers tiers du livre arrive et là je tombe sous le charme et je comprends…sans trop dévoiler cette fin, il y a un bond temporel qui permet d'éclairer d'une lumière surannée, un peu ampoulée, toute la première partie du livre. L'impermanence, la fugacité, est alors magnifiquement honorée, d'abord de façon poignante puis accueillie quand la compréhension se fait : la forme est vide, la vacuité est forme. Tout ce qui faisait forme sur l'île est devenue vacuité alors que ce qui était vacuité, ces mirages, aussi appelés « les mensonges de le mer » sont formes et immuables. L'acceptation de cette vérité est une clé du livre et me fait écho.

Je suis ainsi partagée pour donner mon sentiment sur ce livre. C'est étrange cette sensation d'avoir les ingrédients aimés mais mélangés ou présentés de façon à ne pas savoir apprécier le plat proposé dans un premier temps…pour finir par le trouver vraiment à son goût à mesure qu'il décante…Je suis désolée de n'avoir pas su l'apprécier dans toute sa richesse dès le départ…Une dernière pensée pour la mer qui ne ment jamais quand il s'agit de retrouver les idées claires :

« Plus loin je commençai à apercevoir la mer. Sa surface était lisse et au loin il était difficile de la distinguer du ciel, ce qui donnait une impression d'étendue infinie. Devant ce spectacle, mon esprit sur le point de flancher à cause de la chaleur alla se fondre un instant dans ce lointain ».
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Dans les années 1930, Akino, chercheur de l'université K.. arrive sur l'île d'Osojima - l'île lente - en forme d'hippocampe, pour y recueillir et étudier les coutumes et formes d'habitat de l'île. Il prend ses quartiers chez Mme Uné et son mari Kasuke, un couple de pêcheurs qui vit en harmonie avec la nature. Au fur et à mesure de ses expéditions et avec le jeune Kaiiji comme guide, Akiro découvre les habitants, ainsi que l'histoire tourmentée de l'île, notamment les conséquences traumatisantes de la loi de séparation du Shinto et du bouddhisme. Cinquante ans plus tard, Akino a de nouveau l'occasion de revenir sur l'île qui a perdu son insularité avec la construction d'un pont reliant l'île à Kyushu.

Les mensonges de la mer est un roman tourné vers la découverte de la nature et de la géographie variée de cette petite île avec, à chaque découverte, des descriptions poétiques presque surannées, de la flore, la végétation et la vue sur la mer d'où surgissent les mirages, les mensonges de la mer qui ajoutent à l'étrangeté et au mystère des lieux. Toujours lors de ses explorations Akiro découvre les luttes et surtout la volonté à l'ère Meiji, d'éliminer l'influence du bouddhisme dans la religion japonaise et y substituer le shinto. Lors d'un retour après cinquante ans, Akiro ne reconnaît plus l'île, victime de la modernisation et de sa transformation en île touristique.

Nashiki Kaho offre un roman qui a du charme, très poétique, lent comme une déambulation en forêt, un roman qui séduira surtout les aficionados de la littérature zen.
De la douceur dans un monde de brutes.
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Ecriture naturaliste contemporaine. C'est au contact direct avec la nature d'une île encore relativement sauvage que la conscience environnementale du personnage principal s'éveille.

Sur une île imaginaire au large de l'île de Kyushu, les relations entre l'homme et la Nature sont primordiales.

Au XIXe siècle, des religions y vénèrent la Nature sous forme de divinités qui séjournent tout autour, sur une montagne, dans une forêt, une grotte, ou encore sous une cascade ou un rocher. Et pourtant une religion se débarrassera de l'autre après une longue coexistence et s'attachera à effacer toutes traces de sa présence.
Puis à son tour une autre génération d'homme viendra et saccagera les lieux sacrés des précédents pour mettre en valeur cette même nature, à sa façon.

Ainsi, des générations d'hommes s'y succèdent, chacune avec ses croyances, ses nostalgies, ses rapports à la Nature et aux autres mais aussi ses secrets et ses oublies. Les vieux ne transmettent pas leur savoir aux jeunes, la vie traditionnelle japonaise s'efface au profit d'une vie plus occidentale. Parfois la Nature reprend ses droits, et parfois elle est saccagée à jamais comme cette montagne sacrée rabotée par une carrière.

En dépit de tout, des secrets sont partagés un demi siècle plus tard et des énigmes sont résolues grâce à des objets historiques qui réapparaissent comme cette plaque en bois de l'époque féodale.
Et par dessus tout, la Nature perdure et provoque les mêmes émotions, les mêmes joies chez ceux qui l'observent, comme ces mirages en mer, et puis ces fleurs, ces hémérocalles, qui se mettent à repousser après bien des années, ou encore ces sources d'eau chaudes où d'autres couples iront se baigner. 'La forme est vide, la vacuité est forme'. Le spectacle du monde changeant.
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Contemplatif, nostalgique et mélancolique sont trois adjectifs qui cernent bien ce curieux roman qui oscille entre le traité d'ethnogéographie, la ballade botanique et l'enquête métaphysique !

La première partie (presque les trois quart du livre) se déroule dans les années 1930. le narrateur traverse l'île d'Osojima. C'est l'occasion de belles rencontres qui le marquent. C'est aussi l'occasion d'une réflexion sur la disparition et l'histoire qui résonne avec les propres événements douloureux de sa propre vie (il vient de perdre sa fiancée et ses parents).
On est séduit avec lui par la beauté mystérieuse de cette île qu'il est venu étudier. Ici, le passé affleure mais ne se livre jamais tout entier, nous faisant sentir l'impermanence de l'existence.

La deuxième partie nous projette cinquante plus tard. Dans des circonstances assez ironisant, le narrateur revient sur cette île qui a continué de le hanter.A travers son regard sur l'évolution de la société, les dernières pages, d'une grande puissance, nous interrogent sur la fin des traditions, les conditions de la modernité, l'evanescence et la fragilité de toutes choses.
Cette deuxième partie donne finalement tout son sens à ce voyage dans la mémoire et fait de ce roman une élégie élégante à la tonalité douce amère qui reste en tête. "La vie n'est qu'un illusion" pourrait servir de conclusion !
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Au début des années 1930, un jeune chercheur en géographie humaine vient en mission sur un île isolée au sud de Kyûshû.

Il arpente l'île du nord au sud, seul ou en compagnie d'un guide, à la recherche des ruines d'un temple boudhiste, l'île ayant été le théâtre de l'affrontement entre boudhisme et Shugendô, l'un ayant remplacé l'autre. La vie sur l'île est immuable et n'a guère changé depuis plusieurs générations. Les visiteurs sont rares et bien accueillis.

Notre jeune chercheur marche beaucoup, étudie minutieusement la flore, la faune, il voit le fameux "saro" presque en voie de disparition. L'habitat l'intéresse tout autant et les moeurs des habitants. Il fait des rencontres importantes, un ancien marin, M. Yamané, lui offre l'hospitalité et lui donne de précieux renseignements sur le passé. La spiritualité imprègne toute l'île, on la sent encore vivace.

Amis de la lenteur, soyez les bienvenus, nous découvrons l'île et ses trésors au même rythme que le narrateur. Les descriptions de la nature sont pleines de poésie, les rencontres courtoises et enrichissantes, le temps semble s'être arrêté sur l'île. le jeune chercheur est tourmenté par les derniers évènements de sa vie, assez sombres, il va éprouver des sensations inattendues au cours de son périple, qui le changeront durablement.

C'est une histoire typiquement japonaise. J'ai manqué de connaissances historiques et culturelles pour apprécier vraiment un certain nombre de réflexions, mais ce n'est pas gênant pour la compréhension générale du roman. L'évocation de coutumes et croyances anciennes peut se retrouver dans tous les pays et donnent une tonalité particulière à cette exploration.

L'histoire se clôt cinquante ans plus tard, avec l'un des fils du narrateur. le saut dans le temps est gigantesque, l'île est profondément transformée, mais derrière cette atteinte des hommes, son intemporalité subsiste, rassérénant le vieil homme.

C'est un roman tranquille et apaisant où j'ai aimé me perdre pendant quelques jours, loin du tapage de nos vies modernes.

Lien : http://legoutdeslivres.canal..
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J'ai eu envie de découvrir ce roman après avoir vécu un réel enchantement à la lecture de «  l'été de la sorcière » de la même autrice.

Si ce dernier roman a été une révélation, les mensonges de la mer ne m'a pas permis de ressentir d'émotions particulières, ni de m'entraîner dans la contemplation de la nature tel que je l'aurai espéré.

Pour ne rien cacher, je me suis ennuyée tout du long même si la plume est assez agréable, je n'ai pas ressenti d'attachement particulier et j'ai lu cette histoire de manière distante. Pourtant, moi qui aime tellement l'élément « eau » , j'avais espéré me perdre dans la contemplation de la mer et de cette île.

Si cela fut une lecture agréable, il est très probable que je l'oublie rapidement.
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