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La femme révélée » de Gaëlle Nohant présente le portrait d'Elisa Donneley, jeune américaine, mariée à Adam, homme de quarante ans, revenu de sa mobilisation en Europe d'une durée de deux ans en développant des affaires un peu louches. Leur fils Timothy est né peu de temps avant son départ. L'histoire commence avec l'arrivée d'Elisa en catastrophe à Paris sans son fils et sous l'identité de Violet accompagné par son appareil photo offert par son père avant sa mort.
En expliquant cet exil vécu comme une impérieuse désertion, la première partie du roman présente l'installation de la jeune femme dans un Paris qui découvre le quartier de Saint-Germain-des-près au moment où celui-ci est inondé par les clubs de jazz et où la jeunesse essaye d'oublier la guerre en redécouvrant l'insouciance. C'est une véritable immersion historique que Gaëlle Nohant présente dans ce quatrième roman. le romanesque n'est pas oublié, puisque la jeunesse de Violet lui fera découvrir sa liberté.
La seconde partie raconte le retour à Chicago en 1968 au moment où la ville est blessée par l'assassinat de
Martin Luther King avec ses émeutes des ghettos noirs. Elle prépare la convention démocrate quelque mois plus tard. Lors d'émeutes violentes, les Yippies et le MOBE (Comité formé contre la guerre du Vietnam) vont affronter la police municipale. On suit la montée de Robert Kennedy et son assassinat. Là encore, le romanesque soutient le travail de précision des éléments historiques et permet au lecteur de vivre les événements de l'intérieur.
En plaçant son roman sur la problématique de l'exil et du retour, loin des actualités européennes, Gaëlle Nohan choisit de nous en donner les caractéristiques habituelles : la souffrance, la culpabilité, le doute mais la renaissance nécessaire pour sa survie.
La photographie est un personnage à part entière puisqu'elle est le fil conducteur du roman. Son statut d'artiste, Violet/Elisa va l'acquerir et le porter en étendard de son identité. de nombreuses références rendent réaliste l'artiste dans la personnalité de Violet/Elisa
En plus de ces aspects qui signent déjà un roman très réussi, le personnage de Violet/ Elisa est particulièrement attachant. A travers cette fiction, Gaëlle Nohan affirme l'indépendance et la liberté de son personnage qui saura dépasser les difficultés énormes qu'elle rencontre. Avec tendresse et réalisme, Gaëlle Nohan lui donne une consistance réaliste et sensible.
En démontrant qu'on ne peut abandonner ses valeurs, sans s'oublier soi-même, Gaëlle Nohan apporte beaucoup d'humanité à son portrait de Femme révélée. Mais aussi, elle démontre que malgré des erreurs, il est toujours possible de rattraper la trajectoire de sa vie, même si le prix à payer est énorme, comme de ne pas voir son enfant grandir. Mais fuir l'humiliation et la violence n'a pas à être discuté… Grâce à l'éducation transmise par son père, sociologue, Elisa a choisi le camp du respect des différences et de l'égalité.
A travers les deux continents, de Paris à Chicago, Gaëlle Nohan livre un portrait de «
La femme révélée » attachant, sensible et libre reliant deux événements historiques qui ont aidé à « décorseter » une société arc-boutée sur son passé. Mais, au delà de l'importance de la présentation de ces faits historiques, Violet / Elisa occupe notre mémoire par sa détermination à retrouver la partie de sa vie qui l'a an fait souffrir.
Il est à noter que la photographie de la couverture est réalisée par
Saul Leiter, photographe américain, considéré comme le photographe des rues de New-York .
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