Un coin d'Espagne, quelque part en Estrémadure
Ecartant un rideau de perles en bois oblongues, couleur rouge sang et bleu indigo, nous entrâmes de plain-pied dans une pièce d'au moins soixante-dix mètres carrés. Il y flottait une appétissante et entêtante odeur comme si tous les petits-chefs d’œuvre culinaires qui y étaient amoureusement concoctés, je le devinai, imprégnaient les murs de leur souvenir. Pendus aux poutres énormes, pêle-mêle, toute la variété des embutidos qu'offrait cette terre espagnole. Des plantes aromatiques séchées, menthe, orties, origan, romarin, thym et bien d’autres… non identifiées ! Des tresses de piments rouges et des manouilles d’ail pourpre.
Fermina qui ne me quittait pas des yeux, me commenta :
— Celui-là ne vient pas d'ici, mais de Las Pedroñeras, une région de Castilla La Mancha. C'est un ail de printemps et je raffole de son goût épicé.
Une cuisinière en fonte émaillée bleu foncé, d'au moins un siècle au jugé, des jarres vernissées et ventrues - « les unes remplies d’une saumure d’olives à l’ail ou romarin, les autres de fromages de chèvre marinant depuis des mois dans l’huile d’olive vierge. », me précisa Fermina. Une cheminée, où flambait un feu vif et clair, et assez vaste pour y rôtir un cochon entier, flanquée d'une pile de bûches, la hache usée plantée dans l'une d'elles et un canapé au cuir éraflé recouvert de coussins multicolores. Près du foyer, un chien sommeillait.