J'ai quitté le banc et tourné le dos à la mer qui s'en foutait, elle, du bonheur, de la solitude et de l'amour, qui continuait sa danse, son flux, son reflux, et qui le poursuivrait bien après que je serai mort, bien après que l'humanité se sera éteinte. Et il y en aurait des millions et des millions de rayons verts à l'horizon, avec ou sans témoins. La beauté n'a pas besoin qu'on la voie pour exister.
Brusquement, [mon père] a fondu en larmes. C'était comme si toutes ses forces l'abandonnaient d'un coup, sans prévenir, à la manière d'un ressort qui lâche.
J'étais désemparé. J'avais envie de le prendre dans mes bras mais est-ce qu'on est capable, à seize ans, de serrer son père pour le consoler ?
À quoi ça sert de devenir adulte s'il faut continuer à taire ce que l'on pense et à s'empêcher de faire ce qu'on a envie ?
Elle ne joue pas à la vie comme nous tous, et cela faisait d'elle un être reposant.
Je crois à l'inexistence du passé, à la mort du futur et aux possibilités du présent.
J.G. Ballard, Ce que je crois
Pour parvenir aux rayons des chambres, il fallait passer par les salons, les canapés, faire un arrêt aux bureaux puis traverser les cuisines. Pas le choix. Chez Ikea, on n’avance pas, on chemine, on piétine, on tourne, on a l’impression de faire des kilomètres alors qu’on fait du surplace entre les fausses cloisons qui abrite les faux intérieurs.
- Je te crois, tu sais ?
J'ai enfin reçu une réponse.
- Qu'est-ce que tu crois ? m'a demandé Alix.
- Que tu l'as vu, le rayon vert.
- C'est une vieille histoire. (...)
- On dit que ça porte bonheur mais c'est que des conneries.
La réponse s'est fait attendre, puis :
- Ça n'existe pas, les porte-bonheur. Parce que le bonheur, c'est en soi qu'on le porte.
Est-ce que tout passe avec le temps ?
Il faut bien comprendre que ce n'était pas envisageable que ma mère disparaisse pour de bon. C'était ma mère, c'était sa femme, c'était comme le jour qui se lève chaque matin, tellement normal qu'on n'y fait plus attention.
- ça te fait quoi de ne pas connaître ton père?
Il a pris le temps de trouver ses mots.
-Je le connais. C'est ton grand-père Edouard. Il a toujours été là. c'est lui qui a consolé mes cauchemars quand j'étais petit, qui m'a aidé à faire mes devoirs, qui m'a appris à faire mes lacets, à monter à vélo, qui m'a supporté quand j'étais adolescent, qui a bossé toute sa vie pour que je ne manque de rien. C'est lui mon père, pas celui qui s'est contenté de coucher avec ma mère.