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sur 146 notes
Elle est prostituée, il est écrivain et client de passage. Elle promet de lui laisser faire "tout ce qu'il voudra", s'il met en mots son histoire - ou plutôt celle de "la petite", en hommage, et pour la rendre immortelle. Cette petite, elle l'a tout de suite prise sous son aile quand elle a frappé à sa porte et a commencé à se vendre à douze ans, douze années plus tôt. La jeune femme se réfugiait dans les livres, la poésie ; elle est morte après douze jours d'agonie sous les décombres, suite au tremblement de terre qui a détruit Port-au-Prince en janvier 2010.

Une histoire sur la prostitution, les relations mère-fille, l'amitié, le deuil, les catastrophes naturelles où tout bascule en quelques minutes dans une ville... Des phrases courtes, des chapitres très brefs (souvent 1/2 page), un récit intense, à lire d'une traite si possible, pour s'imprégner de cette narration à trois voix : celle de l'amie, celle de la mère imaginée par l'amie, celle de la jeune défunte via son journal intime.

Un leitmotiv : le nombre "douze". Pourquoi ? Je l'ignore... C'est aussi la "note" que je lui attribue, et je ne saurais pas dire là non plus pourquoi je n'ai pas davantage apprécié ce roman.
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Dans sa chambre, une pute se raconte. Contre ce qu'elle a à lui offrir, elle propose à son client d'un soir, alors écrivain, de raconter l'histoire de la petite. Se prénommant Shakira, cette jeune prostituée de 12 ans a disparu lors d'un séisme que le pays a subi en 2010. Passionnée par l'auteur haïtien Jacques Stephen Alexis, elle était éprise de liberté et était la prostituée la plus convoitée de la Grand-Rue, sous la protection bienfaitrice de la narratrice...

Makenzy Orcel nous offre un texte brut, fort, dans un contexte dramatique. Roman à multiples voix, la pute, l'écrivain, Shakira et la mère de celle-ci, on oscille entre les bons sentiments, l'amour, la haine et la mort. Sans jamais nommer ce qui est arrivé et qui a tout dévasté, « La chose » a emporté avec elle bon nombre de souvenirs et de regrets que la prostituée veut justement rendre immortels grâce à cet écrivain de passage. A la fois fulgurant et cru, à l'écriture enlevée et hachée, ce roman est un très fort témoignage sur le souvenir et dépeint avec justesse et sensibilité ces destins à tout jamais détruits.

Les immortelles... la voix du souvenir...
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Récit fragmenté comme les décombres épars du tremblement de terre qui a frappé Haïti et sa capitale Port-au-Prince le 12 janvier 2010.
Un énième tremblement de terre qui a endeuillé ce pays pauvre, en proie à des régimes politiques gangrenés, instables, dictatoriaux souvent, corrompus toujours, violents, criminels, sanguinaires, sur une île où se multiplient les catastrophes naturelles contre lesquelles, pour toutes les raisons évoquées précédemment, la population est démunie.
Aucun système de gestion des risques comme il y en a dans des pays comme le Japon ( c'est l'exemple le plus parlant ).
Au sortir du séisme du 12 janvier 2010, le bilan fait état de plus de 220 000 morts, 300 000 blessés et 1,5 million de sans-abri.
Makenzy Orcel à travers ce qui est une ode aux anonymes, aux petits, aux oubliés, rend hommage aux putains pour les immortaliser, elles et leurs "semblables"...
Au bordel, une putain propose à un écrivain des passes "gratuites" :
- "Elle s'est dirigée vers la fenêtre pour regarder, non sans amertume, l'immense vallée de béton et de poussière blanche dehors. L'irréparable. L'inénarrable. le désespoir qui coule dans les yeux des gens. La ville-décombres, déchiquetée, saturée de morts connus, inconnus, synthétisés, dessinant toutes sortes de figures géométriques..."
Son marché est le suivant :
- "Je parle, tu écris. Tu transcris."
Il accepte.
- "Je devais juste d'abord écrire et ensuite la sauter. Ça me plaisait bien cette idée...Éditer à compte de sexe."
La prostituée va lui conter l'histoire de sa rencontre avec Shakira, une belle gamine fugueuse de douze ans, qu'elle va prendre sous son aile, héberger, à qui elle va apprendre le métier et dont elle va s'éprendre à la manière de la mère qu'elle fut.
Shakira qui a fui un père et mari violent, une mère bigote, lâche, vendeuse de bibles, qu'elle déteste, va devenir la coqueluche de la Grand-Rue.
Il faut dire que outre sa beauté, Shakira n'est pas une putain ordinaire.
C'est une jeune fille libre, rêveuse, passionnée par les livres et la lecture... elle voue un véritable culte au grand écrivain haïtien Jacques Stépen Alexis qui, en dehors d'avoir été pressenti pour le Goncourt, est connu pour son opposition sans failles au régime de "Papa Doc".
Exilé, il tentera un débarquement clandestin sur son île, tentative qui lui vaudra d'être torturé, exécuté... sa dépouille "inhumée" sans laisser de trace.
Shakira, c'est aussi celle qui va s'éprendre d'un professeur de lettres de trente-six ans son aîné, avec lequel elle a des discussions sur la littérature et autres sujets déroutants pour ses coreligionnaires.
Shakira a un vrai don de voyance... troublant pour lesdites coreligionnaires...
Une dispute va opposer Shakira à sa "mère d'adoption", dispute à la suite de laquelle la jeune fille va disparaître un an sans donner de nouvelles... au grand dam de sa protectrice.
De retour après cette année mystérieuse, la terre va s'ouvrir sous ses pieds et le béton d'un building l'ensevelir douze jours.
Douze jours sans secours, sans eau et sans nourriture.
Douze, un chiffre récurrent dans cette histoire ( je vous laisse découvrir ).
Avant de mourir, elle va confier à la "narratrice" qu'elle a un enfant... quelque part.
Ce va être désormais la raison de vivre de la porte-voix de ces prostituées de Port-au-Prince, désormais immortalisées par l'écrivain... comme les légendaires Fedna-la-pipeuse ou Geralda Grand-Devant.
Un livre à trois voix.
Un livre qui, s'il ne nous apprend pas grand-chose que ne nous aient déjà appris des Lyonel Trouillot, des Denis Laferrière, des Émile Ollivier, des René Philoctère et autres... nous offre des bribes habitées d'un authentique souffle poétique.
Et dans ce genre, les plumes haïtiennes excellent.
Pour conclure, je laisse les mots de la fin à l'auteur :
- "Loin des clichés ou de la complaisance graveleuse, Makenzy Orcel, élève ici un somptueux tombeau à une petite morte qui porte en elle toutes ses soeurs de misère." "On n'a pas fini d'ausculter le corps abîmé d'Haïti, mais les bien-pensants se sont occupés de tout sauf des putes, ces immortelles qui donnent sens, vie et tendresse au corps de la ville", écrit Makenzy Orcel dans ce roman qu'il leur dédie.
Un grand petit bouquin !
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Victoire par K-O pour les prostituées de la Grand-Rue de Port-au-Prince face à l'humble lectrice que je suis, à l'autre bout du monde.
Makenzy Orcel fait honneur, dans ce roman, à celles qui pratiquent, pour diverses raisons, le plus vieux métier du monde et leur rend, par ce court récit, l'hommage qu'elles méritent. Certaines ont survécu au grand tremblement de terre. D'autres sont mortes sous les décombres.
Toutes sont des victimes.
De la furie de la terre.
De l'ignorance des hommes.
De la pauvreté d'un coin de terre.
Du regard des autres.
Du manque d'amour.

Les immortelles est un roman atypique, percutant et sauvage.
Un de ceux qui ne laissent pas indifférent.
Un de ceux qui viennent nous triturer les tripes et les secouer sans ménagement. le vocabulaire est cru, sexuel, violent. C'est celui de la rue qu'on ne peut totalement comprendre que de l'intérieur.

Les immortelles c'est un roman d'amour aux soeurs de galère, à la Petite qu'on a pris sous son aile, à un pays riche de beaux humains mais en manque de tout !
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Haïti 12 janvier 2010.
"A toutes les putes de la Grand-Rue emportées par le violent séisme du 12 janvier 2010"

Mackenzy Orcel signe un roman incantatoire. Trois voix se mêlent à celle de l'écrivain, la pute, la mère et la petite à travers les mots de son journal intime.
La petite se fait appeler Shakira , elle a quitté la maison familiale, fui une mère bigote qui préférait la soumission à la rébellion. Elle s'est réfugiée chez la pute et a appris le métier pour être enfin libre, libre de vivre comme elle l'entend , libre de dévorer les livres , libre d'aimer ...
La Grand-Rue ...
Mackenzy Orcel manie les mots sans tabous ni pudeur.

Ce premier roman a reçu le Prix Thyde Monnier de la Société des Gens de Lettres en 2012.
Un roman qui ne peut laisser indifférent.
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Sous forme de stances (l'auteur est poète), ce roman parle des putes de Port-au-Prince. Enfin surtout d'une, Shakira, qui mit 12 jours à mourir sous les décombres du séisme de janvier 2010. La plus belle, la plus convoitée. C'est sa mère d'adoption, celle qui lui a tout enseigné, qui parle. Qui raconte, qui regrette. Qui essaye de comprendre, bien qu'elle soutient le contraire. Pour qu'elle ne soit pas oubliée, qu'elle devienne Immortelle par le miracle de la littérature, elle qui aimait tant lire.
Un roman de l'urgence, pour ne pas oublier les hommes et les femmes morts dans cette catastrophe, qu'ils soient grands pontes ou petites gens. Ou prostituée.
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Port-au-Prince… tremblement de terre… apocalypse…
Une pute de la Grande Rue raconte à un écrivain la terrible agonie d'une de ces jeunes collègues, celui-ci doit écrire son récit en hommage à « la petite ». Son témoignage est bouleversant, elle met « des mots, des silences et des non-dits » au désespoir pour que toujours le souvenir perdure.
J'ai rencontré Makenzy Orcel l'année dernière, il disait entre autre, en parlant de son livre « je suis l'écrivain qui efface ». Effacer ?... La douleur indicible qui parcourait les rues de Port au Prince, le souvenir des gémissements, cris des pleurs… ce livre vous prend aux tripes. La mort, la vie, l'amour, les putes, les bordels, les blessés qui implorent Jésus « mains tendus vers le ciel », l'odeur des cadavres, le chaos de béton… Makenzy Orcel n'a pas peur des mots, la réalité est crue, terrible, mais aussi, simple et dénudée, humaine… «Cette chose », «ça », que l'on ne supporte pas de nommer a tout détruit et « que personne ne vienne me dire qu'on avait une vie avant ça, qu'on en aura une autre après et après. Moi, je me contente de celle qui est là, maintenant, celle qui bat dans ma poitrine, circule dans mes veines, tout en essayant de la vivre pleinement. Point merde. »
Transportée en Haïti, justement dans ce pays-là, dans ces errements au milieu de l'effroyable malheur et de la misère, on ne sort pas indemne de ce livre témoignage empreint aussi d'une immense humanité.
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« Tous les monstres de béton sont tombés. Tous les bordels. La Grand-Rue n'est plus ce qu'elle était. Mais nous, on ne mourra jamais. Nous, les putains de la Grand-Rue. Nous sommes les immortelles. » Les immortelles sont les prostitués de Port-au-Prince. L'une d'elle témoigne après le tremblement de terre de janvier 2010. Elle confie sa parole à l'écrivain. le deal est simple : « Tu me donnes ce que je te demande et toi après tu pourras m'avoir dans tous les sens que tu voudras. » Elle veut laisser couler le sang des mots pour narrer l'histoire de la petite, une gamine fugueuse débarquée chez elle à l'âge de 12 ans et se faisant appeler Shakira. Une fillette devenue l'une des putes les plus courtisées de la capitale. « La petite, elle est morte après douze jours sous les décombres, après avoir prié tous les saints. » La petite avait quelque chose en plus, elle connaissait les livres. Une passion dévorante qui la rendait si singulière. le témoin s'épanche auprès de l'écrivain pour ne pas oublier, pour ne pas sombrer : « Je raconte pour toi, ma petite. Je te raconte et t'appelle de mon exil intérieur. […] Tous les mots de mon corps ne sauraient suffire pour dire la douleur de la terre. »

Les immortelles est un chant de ruines. Oui, je dis bien un chant. Un chant lyrique où dominent la souffrance et l'abattement. Toute l'horreur de l'existence à travers de très courts chapitres de moins d'une page. Un style oralisé proche de la poésie en prose la plus libre. C'est brutal et dérangeant. La langue est belle, elle devrait secouer fortement le lecteur. Je dis « devrait » car malheureusement cela n'a pas été le cas pour moi. Difficile de l'avouer mais je suis passé à coté. Suis-je insensible à ce point ? Franchement la question se pose car ce texte avait tout me plaire et pourtant j'y suis resté totalement étranger, comme si je ne faisais que survoler les choses de très haut sans jamais m'immerger dans l'ignoble réalité. Peut-être à cause de la forme du témoignage, trop individuel. En comparaison, le choeur antique s'exprimant dans Certaines n'avaient jamais vu la mer m'a beaucoup plus touché. Je ne dis pas que Les Immortelles est un mauvais premier roman, loin de là. Je dis juste qu'il n'était pas pour moi.

Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Les immortelles un roman bref dont les petits chapitres sont comme un cri du coeur, dans un style poétique, limpide et parfois cru qui décrit le monde de douleur de ces femmes.
Nous somme à Port-au-Prince après le violent séisme du 12 janvier qui a dévasté Haïti et plus précisément dans la Grande-Rue où vivent, travaillent ces prostituées. L'une d'elles va proposer à un client écrivain de coucher sur le papier l'histoire de ses consoeurs qui sont mortes lors de ce tremblement de terre et en échange, un marché simple elle paierait avec la seule chose qu'elle possède son corps. « Editer à compte de sexe ». Elle témoigne surtout l'histoire de Shakira, une petite qui a quitté sa mère à l'âge de douze ans, qui aimait les livres et plus particulièrement ceux de Jacques Stephen Alexis, elle succombera après douze jours sous les décombres.
Un roman caustique dans un style puissant ne m'a pas laissé indifférente à la vie de ces femmes.
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Il y a quelque chose de terriblement touchant dans le premier roman du poète Makenzy Orcel. Une humanité, une tendresse, un regard sans concession, mais attendri sur celles qu'il appelle « les immortelles », qui pratiquent « le plus vieux métier du monde », lesquelles ont disparu de la Grand'Rue de Port-au-Prince après le séisme de janvier 2010. Où sont-elles? Certaines ont-elles survécu? Où sont leurs clients, et ceux avec qui elles avaient un lien plus fort qu'un simple échange commercial?

C'est à elles, à eux, à celles qui sont là depuis toujours, à celle qui a choisi cette vie de plein gré, au prof de littérature qui les fréquente, aux témoins de cette vie d'avant, aux disparus, que le narrateur, « l'écrivain », prête voix dans Les immortelles, allant de l'un à l'autre, de l'une à lui-même, entremêlant les histoires, déroulant le fil de celles-ci, créant ainsi une toile qui se déploie en nous livrant des portraits plus vrais que nature.

Le résultat est un premier roman composé de fragments qui se répondent et s'imbriquent les uns dans les autres, unissant ainsi ces voix qui nous semblent d'abord disparates, mais qui semblent parfois n'en faire qu'une. le cri d'une immortelle prend alors toute la place alors que la mort a pris une des siennes, celle qui aimait tant lire et qui avait choisi ce métier pour s'accorder des pauses avec Jacques Stephen Alexis, dont les livres lui tenaient lieu de maison, de rêve et d'espoir.

D'elles, d'eux, il reste une poignée d'histoires racontées ici sans fausse pudeur, à lire et relire en attendant que la Grand'Rue redevienne ce qu'elle était. Quand vivait encore celle a qui Makenzy Orcel a prêté ces mots : « Pour moi, il existe deux grands voyages. La lecture et le somptueux voyage des corps enlacés. »
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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