J'étais frileux, comme homme. À part l'amour, je ne valais pas grand-chose. À part aller vers l'amour, j'entends. Je ne parle pas de succès, pitié.
La mort n'explique pas tout. L'amour non plus.
Nos regard se croisaient, donc, mais en bon véhicules qu'ils étaient, conduits avec prudence, ils ne se rencontraient pas. Une fois croisés, en quelque sorte, ils se dépassaient sans heurt et poursuivaient leur chemin dans le regard de l'autre, à la recherche d'une réponse.
C'est quand même toujours neuf, l'amour.
J'avais pris une femme de ménage. Elle était entrée dans ma vie comme ça, parce que J'avais tiré sur une petite languette,à la pharmacie.C'etait la dernière des six qu'elle avait prédécoupées au bas de son annonce,scotchée sur la vitrine. Une petite languette de papier verticale ,avec les huit chiffres superposés de son numéro de téléphone. Toutes les languette qui m'eussent intéressé, sauf la sienne ,sa petite dernière, donc,avaient été arrachées. Et je m'étais dit qu'il etait grand temps que je m'y arrête, devant cette vitrine.
Elle s'est donc laissée aller avec cette sorte de chavirement passif que charpente la honte, parfois, chez les femmes quand elles cèdent trop tôt , à leur goût et qu'elles vont se perdre dans les bras de quelqu’un dont elles n'ont pas pris le temps faire le tour, dont elles ont choisi sciemment de ne pas faire le tour.
C'est une bonne chose que les femmes mangent, elles aussi, il n'y a pas de raison, elles sont comme nous, finalement, en tout cas manger les rapprochent de nous, ça les rend plus humaines.
Elle était comme chez elle, maintenant, dans cette voiture, et j'ai pensé qu'on y était bien, oui, qu'on n'avait pas besoin de plus, elle et moi, ce jour-là : un toit sur la tête, des parois près du corps, la possibilité d'ouvrir les fenêtres. Et des roues, bien sûr, avec un petit moteur pour aider.
J ai échangé un regard très bref avec Julien et j ai eu de la chance , il n a rien dit. N' a pas soutenu mon regard. N a pas souri. Ce qui me laissait le champ libre pour exploser ou m'enfourner du sable dans la bouche. Avaler pas mal de sable et me retrouver aux urgences. Ou l'étrangler, lui. Ou dire bonjour.
J ai dit bonjour.
La mort n'explique pas tout. L'amour non plus.