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3,74

sur 3135 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je ne vais pas résumer une fois de plus ce livre déjà abondamment commenté.
Je ne vais pas nier que j'ignorais tout de cet épisode de l'histoire du Japon, dont une certaine partie de la population a été victime du mirage du « rêve américain ».
Je ne reviendrai pas sur l'originalité de la technique de narration, dont le désormais fameux « nous » a l'avantage de rendre à merveille la solidarité et la persévérance de ces femmes trompées, avilies puis oubliées, mais a l'inconvénient de créer une certaine distance et d'empêcher une empathie plus profonde entre elles et nous.
Je ne commenterai pas en détails la litanie de litanies que constitue ce roman, dont il ne faut cependant pas penser qu'il n'est qu'une longue plainte de 140 pages sur certains thèmes (le voyage, la rencontre des maris, le travail, les Blancs, les enfants,…), mais dont il faut au contraire saluer le parti pris d'une écriture précise, humble et sans pathos qui fait d'autant plus émerger les émotions du lecteur.
Mais j'insisterai sur le fait l'auteur fait preuve d'un certain don pour nous donner un cours d'Histoire sans avoir l'air d'y toucher, et rien que cela justifie l'existence de ce livre.
Je rajouterai qu'il faut un talent certain pour dépeindre l'abnégation et « l'optimisme du désespoir » de ces femmes au long d'une énumération de jolies phrases toutes simples, qui rappellent le flux et le reflux sans fin des vagues de cette mer que certaines n'avaient jamais vue.
Et je conclurai par une pirouette que certains trouveront facile : certains ne liront jamais ce roman, et c'est dommage pour eux…

Lien : http://www.voyagesaufildespa..
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Certaines n'avaient jamais vu la mer...
Certaines regardaient la photo de leur futur mari, choisi chez une marieuse.
Certaines étaient entassées dans un bateau en direction de l'Amérique, de leur rêve américain.
Certaines avaient quitté leur Japon natal et leur famille dans l'espoir d'une vie meilleure.
Certaines n'avaient même pas quatorze ans et étaient encore vierges.
Certaines allaient se retrouver dans les champs, à travailler durement, ou travailler en tant que femme de ménage, au service des Blancs.
Certaines allaient devoir s'abandonner à leur mari, voire leur patron au prix de leur silence.
Certaines allaient céder au désespoir.
Certaines allaient voir grandir leurs enfants, désolées de les voir si peu enclins à la culture Japonaise.
Certaines allaient devoir affronter les horreurs de la guerre.
Certaines racontaient leurs vies d'exilées et leurs désillusions dans un pays si étranger au leur.

Certaines vous diront que ce livre est véritablement sublime.
Certaines vous diront qu'il est poétique, transcendant, magnifique, tragique, incisif, poignant voire évocateur.
Certaines vous diront que c'est une belle leçon d'histoire.

Certaines n'avaient jamais vu la mer, et n'auraient pas dû...
Commenter  J’apprécie          20016
Je suis toujours très longue à la détente pour lire un roman ayant obtenu un prix. Je me méfie car, en général, je suis déçue. Donc, comme à mon habitude, ce livre ayant obtenu le prix Femina 2012, je ne le lis que maintenant.

Je n'ai pas été déçue cependant. On apprend un épisode de l'Histoire peu connu : l'envoi de jeunes filles japonaises aux Etats-Unis. Comme souvent, on leur a promis la lune. L'Amérique leur offrira tout. Elles partent avec, pour seul bagage, leur kimono. Une photo du futur époux - un japonais ayant émigré depuis plus longtemps - leur permettra de le reconnaître. Mais bien évidemment, la réalité est tout autre.

Julie Otsuka fait en sorte que l'on entre dans le texte aisément. le procédé narratif peut déplaire : à travers le récit d'une migrante, l'on peut entendre des voix multiples s'élevant pour faire entendre leur témoignage. J'ai été conquise par cette pudeur, cette simplicité que l'on retrouve très souvent chez les asiatiques. C'est un très beau roman de l'exil qui m'a fait penser, dans un autre registre, à celui de Philippe Claudel, La Petite fille de Monsieur Linh.
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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De jeunes Japonaises embarquent à bord d'un navire, destination San Francisco. Nous sommes au début du XXe siècle, ces jeunes femmes et jeunes filles dont certaines ne sont pas encore pubères, vont retrouver un mari Américain qu'elles n'ont jamais vu qu'en photo, photographies qui vont se révéler trompeuses, celles-ci ont été prises pour la plupart vingt ans plus tôt.
Julie Otsuka, pour un sujet si grave, a adopté une écriture originale, incantatoire de par sa forme, elle raconte de façon magistrale le quotidien et l'histoire de ces femmes émigrées du Japon. Un livre qui mérite ses prix, un livre à lire, le roman d'une histoire méconnue.
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Elles sont des centaines, elles sont des milliers, dont les voix s'élèvent et se rassemblent dans un même chant de détresse, dans un même choeur d'infortune, une même nef musicale qui retentit en chorale pour laisser résonner une seule et même voix, celle de la femme japonaise brimée, opprimée, maltraitée au long d'une existence d'épreuves et d'exil.
Un coeur unique qui bat à l'unisson pour toutes ces femmes qui ont quitté leur Japon natal et traversé le Pacifique au début du XXème siècle, afin de se marier en Amérique, cette terre en laquelle elles ont mise tant de rêves et d'espoir.

La traversée serait rude et pénible pour ces jeunes filles bien souvent vierges contraintes de voyager dans les cales humides et sombres des bateaux.
Ce ne serait que la première d'une longue et douloureuse série d'épreuves qui verrait se briser leurs rêves de bonheur comme les vagues s'écrasant contre la coque du navire. Elles arriveraient en Amérique la tête emplie de promesses et de croyances ; « nous voilà en Amérique, il n'y a pas à s'inquiéter ». Comme elles auraient tort !

En débarquant sur les quais de San Francisco, elles ne reconnaîtraient pas l'homme qu'elles n'avaient jusqu'ici vu qu'en photographie ; cet homme qui était leur mari et auquel elles appartenaient désormais.
Elles comprendraient alors qu'elles s'étaient fourvoyées, que les belles lettres les incitant à venir en Amérique, n'étaient que des mensonges destinés à ravir leur coeur ; que les promesses de belles situations n'étaient que duperies ; qu'elles avaient tout abandonné pour du vent.

Alors elles devraient apprendre à masquer leur déception et leur dégoût devant un mari qui se révèlerait bien plus âgé dans la réalité. Elles devraient se soumettre à ses façons brutales, à son ivrognerie, à ses coups, à sa condition miséreuse.
Elles devraient se résigner à trimer sans relâche, à travailler en silence de l'aube au crépuscule, à s'écorcher les genoux dans les champs, à se courber jour et nuit sur un lopin de terre, à se tuer au labeur dans des fermes, dans des ranches, aux alentours des villes, et accomplir les besognes que les Américains ne voulaient pas effectuer.
Elles devraient accepter de vivre dans des campements de fortune, dans des bordels, dans des masures délabrées ou des chambres de bonne, quelquefois même à la belle étoile, recroquevillées au pied d'un arbre.
Elles apprendraient à abdiquer devant l'homme blanc, à subir le mépris, la haine, la colère, le racisme d'un peuple dont elles ne comprendraient jamais vraiment les coutumes ni la langue.
Elles donneraient naissance à des enfants pour lesquels elles se saigneraient aux quatre veines et auxquels plus tard, elles inspireraient honte, pitié et compassion amères.
Elles sauraient ce qu'est la misère en pays étranger, elles connaîtraient l'ignominie, l'avilissement, l'infamie, l'indigence et l'humiliation.
Elles verraient leurs beaux visages se flétrir, leurs peaux s'assécher, leurs lèvres s'amincir et se crisper sous les coups d'une âpre destinée faite de coups durs et d'obstacles.

Au fil du temps, elles apprendraient à s'intégrer, à se sociabiliser, à tirer quelques profits d'une vie de labeur et de privations. Trente ans seraient passés et elles oseraient s'octroyer de petits bonheurs, peut-être même sourire ou même fredonner une chanson de leur pays lointain.
Mais la Guerre dans le Pacifique éclaterait… Et on les tirerait de leurs maisons, de leurs commerces, de leurs champs, de leurs fermes…On les obligerait à partir dans des lieux inconnus et lointains.

Le silence et l'oubli tomberaient alors sur leur souvenir comme si elles n'avaient jamais existée, jamais vécues qu'au travers de ce chant polyphonique, cette complainte de la mémoire que Julie Otsuka fait bruire, s'amplifier, s'intensifier et résonner tout le long de « Certaines n'avaient jamais vu la mer ».
La vie de ces japonais s'inscrit alors dans un « nous » collectif qui fusionne en un vibrant chorus, battant tel le pouls d'un peuple d'immigrants tragiquement englouti dans les méandres du temps, et que le beau livre de Julie Otsuka, à la construction si originale, fait éclore à nouveau en un intense devoir de mémoire.
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Ce livre raconte l'histoire méconnue de jeunes paysannes (pour la plupart) japonaises venues sur la Côte Ouest des Etats-Unis après la première guerre mondiale pour épouser des japonais émigrés et fournir de la main-d'oeuvre docile et bon marché aux blancs de ce pays neuf. C'est le récit de leurs épreuves (puis de celles de leurs familles) jusqu'à l'ultime.
Ce livre coup de coeur est poignant, véridique, et original par l'emploi du nous.
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Malgré son titre romantico-neuneu, ce livre est une description sombre de destins de femmes japonaises émigrées dans les années 1920 aux Etats-Unis.

Elles avaient entre douze et trente-sept ans, elles ont quitté le Japon pour un avenir doré (ou moins gris), poussées par leurs parents espérant pour leur fille une vie moins dure, ou une dot pour eux-mêmes.

Hélas ! Si l'Amérique faisait rêver de loin, elle était beaucoup moins accueillante vis à vis des étrangers, au début du XXe siècle, qu'on ne peut l'imaginer. Sitôt leur arrivée, les jeunes filles déchantèrent sur le mari qui les attendait, et se retrouvèrent à trimer dans les champs à leur côté. Leur sort et leur mise à l'écart étaient le lot "des gens de couleur" et ressemblaient fortement à ceux des Noirs.

La forme du récit peut dérouter : la narratrice s'exprime à la première ou à la troisième personne du pluriel, égrenant ainsi les différents sorts (interchangeables) que ces femmes ont connus dans les étapes de leur vie : traversée, première nuit nuptiale, travail, maternité, etc. Ce style rend parfois la lecture lassante, des coupures s'imposent pour ne pas avoir l'impression de dérouler une liste. Mais cela donne un excellent aperçu en concentré de l'accueil reçu par les Japonais aux USA et de leur difficile intégration.

Encore une fois, je déplore ce titre gentillet qui ne rend pas du tout justice au contenu édifiant et révoltant de l'ouvrage...
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Court et incisif, ce touchant témoignage bien documenté nous ouvre les portes d'un monde peu connu, celui de l'immigration des jeunes Japonaises au début du XXème siècle pour rejoindre des "époux", plus exactement des hommes qu'elles n'ont jamais vus et dont elles ne connaissent que les qualités créées de toutes pièces par les marieuses. Mystification collégiale de milliers de destinées, autant d'innocences fuyant la misère et le désespoir de leur pays pour vivre un rêve américain qui vire rapidement au cauchemar.

Julie Otsuka a choisi de traiter ce thème par une narration impersonnelle, comme une chronique froide aux voix multiples et, paradoxalement, c'est le réalisme des faits rapportés qui lui confère toute son humanité.

Un frisson glacé nous parcourant l'échine, nous découvrons le parcours morbide de ces femmes et de ces filles livrées aux maris, aux patrons, aux maîtresses et destinées à cultiver la terre jusqu'à l'épuisement, à se soumettre aux excès des hommes, à accoucher tous les ans, à voir leurs enfants mourir tôt, à vieillir prématurément et à supporter le pire dans l'espoir que le meilleur arrivera enfin un jour.

Récit de l'immigration qui n'a pas été sans me rappeler l'excellente saga du suédois Vilhelm Moberg, "Les émigrés". Tout m'a plu dans ce texte qui va droit au but, excepté le dernier chapitre où l'on change brusquement de locuteur pour donner la parole à l'opinion publique américaine. J'ai ressenti cette fin à la fois comme un parallèle un peu facile et ostentatoire avec la shoah et comme un blanchiment de conscience collectif, une confession bancale et tardive des "hôtes" américains pour se délester de leurs remords.


Challenge ABC 2014 - 2015
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Un livre magnifique à lire absolument. Je ne connaissais pas du tout ce pan de l'immigration japonaise aux Etas Unis.
Chaque chapitre est consacré à une partie de leur histoire : la traversée en bateau, la première nuit, les blancs, les naissances, les enfants, les traîtres, les derniers jours et la disparition. Un récit sans concession, qui va droit au but.
L'auteure commence souvent ses phrases par certaines ou nous, ce qui rend le texte encore plus puissant. Une écriture superbe et bouleversante à travers les voix de ces femmes.
J'ai découvert l'attente, l'espoir, la vie quotidienne et la déception de ses japonaises déracinées et envoyées aux États Unis afin de se marier avec des japonais déjà installés. Que de déception et de désillusion : le désoeuvrement de ses femmes est total. Rien ne leur sera épargné du début à la fin de leur périple. La vision et le traitement des américains par rapport aux japonais immigrés m'ont laissée sans voix.
Il se dégage de de ce roman une totale injustice, une tristesse infinie et malgré tout, ces femmes possèdent une force et une volonté incroyables.
Un livre à lire absolument afin de connaître cette histoire inspirée de ces immigrants japonais aux États Unis. Un livre bouleversant qui ne laisse pas indifférent une fois refermé.
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En 1919, un bateau quitte le Japon pour la Californie.
De Jeunes Japonaises vont rejoindre leurs maris, travailleurs japonais en Amérique.
Elles ne connaissent ces messieurs que par correspondance, avec une photo bien mise en scène mais le mariage existe bien.
Elles ont tout abandonné car elles imaginent rencontrer des messieurs nantis qui leur fera connaître une vie meilleure.
Le voyage va être éprouvant, parmi la classe pauvre.
Et pourtant des scènes nous paraissent amusantes, voire cocasses comme lorsqu'elles interrogent Charles, un voyageur américain au sujet de son pays, de l'odeur de Américains et c'est qu'il se prête à ce jeu naïf.
Arrivées à destination, tout humour , tout espoir est abandonné; ce ne sont pas des messieurs en costume qui les accueillent mais des travailleurs agricoles en bonnet de laine.
Tout au long du livre, les voix des femmes s'élèvent en utilisant le "nous", tantôt pour des réalités douces, normales brusques, violentes. Leurs maris ont tous des caractères différents. Aucune ne semble exprimer le bonheur sinon les regrets d'avoir laissé leur patrie derrière elle au point d'oublier progressivement qui elles sont.
Elles ne rencontreront aucun respect de la part des Américains.
Un livre très noir dont l'humanité est un peu gommée par l'emploi de ce "nous" qui vient jeter un voile un peu trop anonyme sur le récit.
Un livre qui a le mérité d'exister pour nous faire connaître une période bien regrettable.

Challenge plumes féminines 2018

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